OHANIAN, Melik (né en 1969)

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[I-AC.EU] Diplômé des Écoles des Beaux-Arts de Lyon et de Montpellier, Melik OHANIAN représente la France lors de la 26e Biennale de São Paulo en 2004, aux Biennales de Moscou et de Lyon en 2005, aux Biennales de Gwangju et de Séville en 2006, et à la 52e Biennale de Venise en 2007. Il expose à travers le monde, et notamment à la Galerie Chantal Crousel et au Palais de Tokyo à Paris, à la South London Gallery à Londres, De Appel à Amsterdam, à l’Institut d’art contemporain à Villeurbanne, chez Yvon Lambert à New York, au Museum in Progress à Vienne ou encore pour Matucana 100 à Santiago du Chili. En 2015, Melik Ohanian est lauréat du Prix Marcel Duchamp et présente l’exposition Under Shadows au Centre Pompidou. Il participe à la 14e Biennale de Lyon, “Mondes flottants”, en 2017. En 2019, il est lauréat du Prix Visarte 2019 pour son œuvre Les Réverbères de la Mémoire (2010-2018) présentée dans le parc Trembley à Genève, Suisse. Depuis septembre 2021, Melik Ohanian est le huitième invité du programme de résidence d’artistes de la Collection Pinault à Lens.

Melik Ohanian a un background de documentariste et un père photographe, Rajak Ohanian, qui l’initie très jeune à la chambre noire. Melik Ohanian répète régulièrement que “[son] médium, c’est l’image”, un médium qu’il passe son temps à triturer. Arrêtée ou en mouvement, elle lui permet d’explorer différents territoires, spatiaux mais aussi temporels, afin d’ouvrir sur des questionnements tels que l’identité, l’ailleurs, la frontière, la mémoire, la disparition ou l’Autre, notions intimement liées. Parmi une œuvre large et parfaitement cohérente, on peut noter The Hand (2002) qui synthétisait déjà ces différents “espaces” dans un assemblage de neuf moniteurs posés au sol, à envisager comme une sculpture dans l’espace, et où l’on pouvait observer neuf paires de mains de travailleurs arméniens filmées en gros plan, abîmées, usées et salies par le travail. Elles viennent se heurter l’une contre l’autre, à tour de rôle, dans une ritournelle sans parole, en écho au désœuvrement dont est victime chacun des neuf prolétaires qui ne possèdent rien d’autre que leur propre force de travail. Dans Welcome To Hanksville, il partait suivre dans le désert de l’Utah la “Mars Society”, association américaine d’amateurs qui a fondé une station de simulation de la vie sur Mars à… Hanksville et qui se réunit ce jour pour observer Mars, en opposition maximale avec la Terre (phénomène inédit depuis 72 000 ans).

Dans la plupart de ses œuvres, Melik Ohanian analyse la représentation et pointe la duplicité, le camouflage ou l’effet de l’image. Cela peut prendre la forme d’images encodées, de formes filmiques qui produisent une déconstruction optique, transposent les formats ou spatialisent le temps. À travers ces dispositifs, deux grandes problématiques intéressent Melik Ohanian : les questions d’identité et de communauté, qui insufflent à son travail une dimension sociopolitique, et l’intérêt pour d’autres espaces, de vastes territoires inhabités ou des lieux difficilement identifiables, qui orientent son travail vers une approche plus cosmologique.


[RADIOFRANCE.FR, 20 avril 2019] Melik Ohanian, un atelier entre New York et Paris, prix Duchamp 2015, grand arpenteur de biennales (celles de Sao Paulo, Moscou, Venise où il a obtenu le Lion d’or)… Il a le goût des espaces parallèles, des temps élastiques, des comptes à rebours, des migrations du cinéma vers les cimaises, et de la collusion des langages, ceux du cinéma et de la science (l’astrophysique), de la philosophie et de la littérature.

Riche d’une grande culture de l’image, ancien monteur-cadreur, Melik Ohanian s’inspire des différentes procédures propres au cinéma et aux techniques de projections contemporaines pour travailler autour du statut de l’image et du concept de temps. Pour la Biennale de Lyon, il présentait un projet mêlant film, chorégraphie et architecture, intitulé “Borderland — I Walked a Far Piece” :  quatre écrans disposés en carré au centre duquel circule le spectateur, comme une sorte d’explorateur. Un carré calé sur le périmètre du toit de son appartement new-yorkais, avec quatre caméras et autant de mouvements en travelling, qui filment les bords du toit sur lequel se joue une adaptation du roman Planet de Rudolf Wurlitzer, que Melick Ohanian souhaitait depuis longtemps intégrer à une installation.

Ce qui m’a toujours fasciné dans ce roman que j’ai découvert assez jeune, c’est que ce groupe de personnages étaient composé de vagabonds qui se rassemblaient pour une nuit dans un no man’s land, se nommaient avec des noms de villes, comme une espèce de cartographie humaine. Et puis ce rapport entre l’identité et le territoire m’intéressait, dans cette Amérique-là du début des années 20, avec ces “hobos” qui partaient indifférents comme ça, trouver du travail dans d’autres villes, lâchant tous liens d’origine.

Dans cette pièce, il y a l’idée d’un impossible cadrage.

Ces va-et-vient et rebonds du temps, avec ces rappels au passé, ces projections dans le futur, ou ce rappel au présent, forment la permanence de ce que chacun d’entre nous vit intimement. Parfois dans mon travail, le passé prend le dessus, parfois c’est l’anticipation. Une exposition c’est peut-être ça, trouver une stabilité du temps…

Cette idée de cadrage spatio-temporel impossible irrigue une partie de son œuvre, comme dans la pièce Seven Minutes Before présentée à la Biennale de Sao Paulo en 2004, dans laquelle sept écrans montraient simultanément différents points de vue des minutes précédant l’explosion d’un camping-car dans le Vercors. La bande-son de chacun des sept plan-séquences nous emmenait en Arménie avec un joueur de kamantcha, au Japon avec une joueuse de koto, en Angola auprès d’une enfant jouant au bord de la rivière Kwanza.

Melick Ohanian donne à voir, tout en complexifiant les conditions de perception de la monstration, comme dans sa pièce de 2005 Invisible Film, qui consistait en une projection du film de Peter Watkins, Punishment Park, dans le désert, mais sans écran, sans support pour le rattraper ou le refléter. Les images surgissaient, pour in fine, se dissoudre dans le paysage. Dans cette masterclass, l’artiste nous parle de son processus de création, du point de départ… :

Un perpétuel questionnement. J’ai toujours considéré une œuvre comme un point de réflexion, c’est le lieu d’une expérience tout d’abord. Je considère le spectateur comme un élément très important de cette expérience. Je me pose la question de sa position, de sa possibilité de perception, et donc je le considère aussi comme un dispositif propre de projection, c’est-à-dire que si l’on vient pratiquer une œuvre et que l’on n’y projette rien, on ne recevra rien ! 

… au point d’achèvement de l’œuvre :

Le moment du vernissage est le moment où l’œuvre qu’on aura fabriquée, protégée, qui aura été le lieu de plein de choses, va changer de monde, va être délivrée, sans parler du moment d’une dépossession, car pour moi ça ne ressemble pas du tout à ça. Au contraire, c’est le point d’une rencontre avec le monde. 


[LEQUOTIDIENDELART.COM, 21 juin 2023] Au cœur de la crypte du Mémorial de la Shoah tombe, du puits de lumière circulaire, une pluie de larmes en béton, très exactement 3451. Ce nombre renvoie aux kilomètres qui séparent Paris d’Erevan, soit à ceux qu’ont parcouru les Arméniens qui ont pu échapper au génocide orchestré par l’Empire ottoman en 1915 et 1916, pendant que d’autres empruntaient le chemin de la mort vers le désert syrien.

Au cœur de cette pluie hypnotique, seules sept larmes se détachent car elles sont translucides. Convoquer cette mémoire a un goût amer aujourd’hui, alors que le drame se rejoue dans le Haut-Karabakh, avec un nouvel agresseur, l’Azerbaïdjan. Dans cette exposition, l’artiste réunit d’autres œuvres mémorielles comme les Réverbères de la Mémoire, une commande de la ville de Genève en 2010 dont l’installation a été contestée et qui avait été présentée sous une forme “démantelée” dans le pavillon de la République d’Arménie à Biennale de Venise en 2015 (Lion d’or du meilleur pavillon national) et Pulp off. Pour cette dernière, l’artiste a récupéré en 2014 des exemplaires du livre de Janine Altounian, Mémoires du génocide arménien – Héritage traumatique et travail analytique qui devait partir au pilon. Si l’original est entré au département des Manuscrits de la BnF en 2022, Melik Ohanian lui donne ici une seconde vie […]. [Sur le montage de l’œuvre, cliquez ici]


[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation, correction et décommercialisation par wallonica.org | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : image en tête de l’article : “The Hand” (2002) © André Morin ; “Concrete Tears” © lequotidiendelart.com


Plus d’arts des médias en Wallonie et à Bruxelles…

CHARLIER : Groupe Total’s / Drapeau transparent / Bruxelles / 24 avril 1967 (s.d., Artothèque, Lg)

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CHARLIER Jacques, Groupe Total’s / Drapeau transparent / Bruxelles / 24 avril 1967

(impression offset sur plexiglas, 40 x 30 cm, s.d.)

Dès le début de sa carrière, Jacques CHARLIER s’inscrit dans les grands mouvements des années 1960, dont le Pop Art. Avec Marcel Broodthaers, il fréquente les galeries belges les plus en vue, imprégnées d’art minimal et conceptuel. Dès 1975, Charlier continue sa carrière seul.  Il interroge et remet en question  avec humour le système de l’art. Il s’approprie tous les médias : la peinture, la photographie, l’écriture, la BD, la chanson, l’installation. Il se met en scène en personnage flamboyant et joue avec les codes de la publicité et des médias. (d’après MAC-S.BE)

Jacques Charlier lance en 1966 une petite revue polycopiée, ainsi qu’un groupe organisant des happenings : Total’s. [Total’s] n’est ni doctrine, ni philosophie, ni politique, ni anarchiste, ni beatnik, ni provo, ni tout ce beau vocabulaire journalistique déformé pour la consommation engendrant un racisme artificiel entre générations et groupes sociaux. Total est le spectacle de la vie et de notre propre vie.” L’un des happenings les plus marquants est celui durant lequel Total’s, un jour de manifestation contre le nucléaire en 1967, défila dans les rues de Bruxelles en distribuant des tracts transparents et en brandissant un drapeau qui l’est tout autant. (d’après JACQUESCHARLIER.BE)

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : ©  Jacques Charlier | remerciements à Bénédicte Dochain, Frédéric Paques et Pascale Bastin

KAPWANI KIWANGA (née en 1978)

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[LESPRESSESDUREEL.COM] Dans ses travaux, Kapwani Kiwanga (née en 1978 à Hamilton, Ontario, vit et travaille à Paris) met à profit sa formation dans le champ des sciences sociales afin d’élaborer des projets de recherches singuliers dans lesquels elle incarne le rôle d’un chercheur. Sa méthode consiste à créer des systèmes et des protocoles qui agissent comme des filtres au travers desquels elle observe les cultures et leurs capacité de mutation. Ses projets donnent lieu à des installations, des vidéos, des œuvres sonores ou des performances. De manière générale, sa pratique interroge des notions telles que l’afrofuturisme, les luttes anticoloniales et leur mémoire, ainsi que les cultures populaires et vernaculaires.

Kapwani Kiwanga a fait des études d’anthropologie et de religions comparées à l’université McGill (Montréal, Canada). Elle a suivi le programme La Seine à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris, puis celui du Fresnoy (Studio national d’art contemporain) à Tourcoing. Elle fut artiste en résidence à la MU Foundation à Eindhoven (Pays-Bas) et à la Box, à Bourges. Kapawni Kiwanga a été nommée Commissioned Artist par The Armory Show, où elle a présenté en parallèle une exposition monographique en 2016. Deux fois nominés aux BAFTA, ses films ont reçu plusieurs récompenses lors de festivals internationaux. Elle est lauréate du prix Marcel Duchamp 2020.

Les œuvres de Kapwani Kiwanga ont déjà été présentées au Centre Pompidou et au Jeu de Paume à Paris, au Glasgow Center of Contemporary Art, au Museum of Modern Art de Dublin, à la Biennale internationale d’art contemporain d’Almeria, à Salt Beyoglu à Istanbul, à la South London Gallery, au Kassel Documentary Film Festival, au Kaleidoscope Arena Rome ou encore à Paris Photo. Kapwani Kiwanga a été sélectionnée pour représenter le Canada à la Biennale de Venise 2024.


“Flowers for Africa” (2020)

[CENTREPOMPIDOU.FR, 13 novembre 2020] Anthropologue de formation avant d’aborder les arts visuels, Kapwani Kiwanga, 42 ans, utilise des méthodes issues de champs disciplinaires variés. Elle inscrit sa démarche dans une pluralité d’histoires pour mieux déconstruire les récits qui sous-tendent la géopolitique contemporaine et les asymétries de pouvoirs. Le projet Flowers for Africa a été initié en 2013 et se poursuit aujourd’hui. En effectuant des recherches iconographiques, l’artiste canadienne s’est concentrée sur la présence des fleurs lors d’événements diplomatiques liés à l’indépendance de pays africains. Disposées sur les tables des négociations, sur les estrades lors d’allocutions, ces compositions florales deviennent des témoignages ambigus de ces moments historiques. Chaque œuvre de la série prend la forme d’un protocole selon lequel l’artiste demande à son détenteur de recréer, pour pouvoir l’exposer, la composition florale de l’image d’archive de référence aussi précisément que possible, tout en intégrant une part inévitable d’interprétation. Vouées à faner tout au long de leur présentation, ces fleurs invitent à une réflexion sur le temps, au-delà de l’idée du monument et de la commémoration, pour s’inscrire dans la tradition des vanités.

Parlez-nous du travail que vous avez présenté pour le prix Marcel Duchamp

Kapwani Kiwanga – C’est un travail qui a commencé en 2013. J’étais au Sénégal en résidence et je cherchais dans leurs archives. Je me suis intéressée à la question des indépendances africaines. Il m’a semblé que la meilleure façon d’aborder cette idée était à travers les arrangements floraux, présents dans les images fixes et les images en mouvement. La plupart des images que je regardais au Sénégal étaient des images fixes. J’ai commencé à me demander comment je pouvais recréer, repenser, réagir à ces moments à travers ce point d’entrée, en tant que témoin de ces événements.

L’idée était d’éviter de faire une déclaration permanente ou une sculpture comme une sorte de monument à un moment passé comme si on essayait de s’y accrocher. Il s’agissait plutôt de le reconnaître et de le laisser s’évanouir dans l’histoire – c’est là qu’est née l’idée des fleurs coupées.

Kapwani Kiwanga

Pour être en accord avec la réalité du passé – que l’on peut revisiter mais qui a disparu – l’idée était d’éviter de faire une déclaration permanente ou une sculpture comme une sorte de monument à un moment passé comme si on essayait de s’y accrocher. Il s’agissait plutôt de le reconnaître et de le laisser s’évanouir dans l’histoire – c’est là qu’est née l’idée des fleurs coupées, pour leur permettre de suivre leur cours et de se dessécher et se flétrir, ce qui est important. Il semble que ce sera le travail de ma carrière, ou plutôt de ma pratique…

Vous avez étudié la littérature, l’anthropologie et la religion comparée à l’université McGill, quelle influence cela a-t-il dans votre travail ?

KK – J’étais inscrite à l’origine en littérature, mais les références ne me parlaient pas. Je cherchais plus de diversité et j’ai trouvé cela en anthropologie. La religion comparée, comme on l’appelait, était pour moi une façon d’étudier la philosophie du point de vue de différents milieux culturels. Cela m’a aussi donné beaucoup de liberté au sein du département des religions – j’ai pu aussi faire beaucoup de projets indépendants. J’ai pu graviter autour de professeurs que je trouvais intéressants et poursuivre des études indépendantes.

Pouvoir sauter d’une discipline à l’autre, d’une idée à l’autre, avec une liberté de curiosité, de ne pas avoir à diviser le monde en disciplines : l’art m’a permis de faire cela.

Kapwani Kiwanga

Ce que j’ai étudié en religion n’a fait que compléter l’anthropologie en termes de visions du monde diverses et variées. Il se trouve que les institutions séparent les sujets et font des divisions taxonomiques, puis à un moment donné, elles décident que ce sera une nouvelle discipline. Mais c’est vraiment la même chose. C’est une exploration. Il y a différentes méthodes. En anthropologie il y avait tant de façons créatives et expérimentales d’écrire l’ethnographie. Elles sont toutes aussi importantes.

Comment êtes-vous devenue artiste ?

KK – C’est une sorte de route – une longue route ! Au cours de ma deuxième année d’université, je me suis dit que je voulais faire du cinéma documentaire. Je suis donc partie en Europe. J’ai plus ou moins appris par moi-même en ayant la chance de recevoir des commandes pour travailler pour la télévision. J’ai fait cela pendant quelques années puis je me suis dit : Pourquoi ne pas essayer l’art contemporain ou visuel – même si je ne savais pas ce que cela signifierait pour moi ? Et c’est là que je suis venue en France et que j’ai suivi deux programmes de troisième cycle différents, où j’ai pu explorer ce que serait la création artistique pour moi. C’est ainsi que tout a commencé.

Je m’intéresse souvent à des structures historiques. Dans le monde dans lequel nous vivons, il y a beaucoup d’asymétries de pouvoir. Je les reconnais, je les vois, nous les observons tous. La question est de savoir comment elles sont apparues…

Kapwani Kiwanga

Je suis désormais à Paris, cette ville que j’aime et que je déteste en même temps… il y a quelque chose d’intéressant dans ce genre de double attraction. Pouvoir sauter d’une discipline à l’autre, d’une idée à l’autre, avec une liberté de curiosité, de ne pas avoir à diviser le monde en disciplines : l’art m’a permis de faire cela.

Comment travaillez-vous ?

KK – Cela change à chaque projet. En ce moment, mon studio est chez moi, je suis donc ici tous les jours. Je n’ai pas de studio au sens très classique du terme, avec un seul matériau que je découpe chaque jour. Je travaille sur tellement de supports différents. Mon studio est plutôt un endroit où l’on assemble des choses, où on les accroche, où l’on voit comment elles fonctionnent ensemble, où l’on fait des recherches. Mais souvent, la production proprement dite se fait en dehors de mon studio et dans les ateliers des autres…

Vous avez déclaré : “Les asymétries de pouvoir sont probablement l’idée qui me pousse le plus dans mon travail”. Expliquez-nous…

KK – Je m’intéresse souvent à des structures historiques. Dans le monde dans lequel nous vivons, il y a beaucoup d’asymétries de pouvoir. Je les reconnais, je les vois, nous les observons tous. La question est de savoir comment elles sont apparues… Dans quel monde sommes-nous ? Où nous trouvons-nous ? Le pouvoir est toujours là. C’est très compliqué de ne pas le voir. Pour moi, du moins. Peut-être que d’autres personnes ne le voient pas. Mais c’est comme ça que je vois le monde. Les rapports de pouvoir sont une structure récurrente et une façon de comprendre nos interactions.

Quelle œuvre d’art vous a le plus marquée ?

KK – On me pose souvent cette question, et je ne sais jamais comment y répondre. C’est très difficile pour moi de dire qu’il y a eu un mouvement, un artiste ou une œuvre qui m’a marquée. Il y a plutôt une masse d’expériences, de lectures et de points de vue. Je commence à les formuler ensemble pour voir les liens. C’est plus un réseau ou des écosystèmes d’idées et de pensées – il n’y en a pas une qui soit centrale.

Qu’est-ce que cela signifie pour vous d’exposer ici au Centre Pompidou, avec les trois autres artistes nommés ?

KK – Pour moi, c’est vraiment symbolique, parce que j’ai vraiment commencé à faire mon travail d’artiste en France. Faire une exposition au Centre Pompidou, c’est bien sûr toujours agréable. La visibilité est importante, mais pour moi, cela a été une belle année de collégialité, cela ressemblait plus à de la solidarité qu’à de la compétition. J’ai déjà participé à des expositions collectives, pas dans ce contexte particulier. Je veux que mon travail soit vu par les gens, et pas seulement par les gens de l’art. C’est une invitation à parler, à penser, à explorer. J’essaie de créer des espaces ou des œuvres qui invitent à la réflexion. Les gens en tireront ce qu’ils veulent. Je n’ai pas envie d’essayer d’imposer un point de vue à qui que ce soit.

Propos recueillis par Sabine Mirlesse


[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : compilation, partage, édition et iconographie | sources : lespressesdureel.com ; centrepompidou.fr  | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : en-tête, Remediation (2023) © Carey Shaw ; Flowers for Africa (2020) © Bertrand Prévost.


Plus d’arts visuels en Wallonie…

 

 

SALEMI : L’Enfer du Nord (s.d., Artothèque, Lg)

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SALEMI Jean-Claude, L’Enfer du Nord

(lithographie, 40 x 30 cm, s.d.)

Illustrateur, graveur, mais également guitariste, Jean-Claude SALEMI (né en 1950 à Casablanca, au Maroc) est spécialisé en linogravure comme en swing-musette, il est par ailleurs guitariste dans le groupe Swing-O-Box. D’où sa passion d’illustrations musicales, notamment aussi dans le livre Un Monde de Musiques édité par Colophon en collaboration avec La Médiathèque.  Il est membre d’un atelier collectif de gravure et lithographie : l’Atelier RAZKAS et, dans ce cadre, participe à l’édition de plusieurs portfolios de gravures. (d’après JAZZINBELGIUM.BE)

Cet ensemble de croquis semblent réalisés sur le vif. Ils nous montrent des cyclistes engagés dans le célèbre Paris-Roubaix. La technique lithographique permet à Jean-Claude Salemi de s’exprimer d’un trait sûr et souple, agrémenté d’aplats et de lavis au pinceau.

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : ©  Jean-Claude Salemi | remerciements à Bénédicte Dochain, Frédéric Paques et Pascale Bastin

RANSONNET : Sans titre (2003, Artothèque, Lg)

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RANSONNET Jean-Pierre, Sans titre

(xylogravure, 42 x 32 cm, 2003)

Jean-Pierre RANSONNET, né à Lierneux en 1944, est un artiste belge. Il vit et travaille à Tilff, en Belgique. Formé à l’École supérieure des Arts Saint-Luc de Liège (1962-1968), Jean-Pierre Ransonnet séjourne en Italie en 1970 grâce à une bourse de la fondation Lambert Darchis. Il enseigne le dessin à l’Académie des Beaux-Arts de Liège de 1986 à 2009.

Cette série de gravures sur bois de Jean-Pierre Ransonnet est une variation sur des formes plastiques abstraites, ou évoquant des sapins. L’artiste use de l’expressivité du bois gravé, laissant transparaître les veines du bois, matière même de son discours.

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Jean-Pierre Ransonnet ; mu-inthecity.com | remerciements à Bénédicte Dochain, Frédéric Paques et Pascale Bastin

SEMPE : Sans titre (s.d., Artothèque, Lg)

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SEMPE, Sans titre

(sérigraphie, 35 x 30 cm, s.d.)

Jean-Jacques SEMPÉ (1932-2022) est un dessinateur humoriste français. Il est notamment l’illustrateur des aventures du Petit Nicolas dont l’auteur est René Goscinny. Dans les années cinquante, il connait le succès grâce à ses collaborations régulières avec Paris Match. De 1965 à 1975, Françoise Giroud l’invite à L’Express auquel il donne chaque semaine ses dessins et dont il est durant une quinzaine de jours l’envoyé spécial aux États-Unis en 1969. En 1978 Sempé réalise sa première couverture pour le New Yorker, célèbre magazine culturel américain. Il en créera plus d’une centaine par la suite. Après le succès du Petit Nicolas, à partir de 1962 (“Rien n’est simple”), Sempé publie presque chaque année un album de dessins chez Denoël, quarante jusqu’en 2010 (source Wikipedia).

Cette lithographie est tirée d’un dessin à l’aquarelle d’une grande délicatesse. Un enfant suivi de son chien, se promène en banlieue au coucher du soleil. L’échelle entre le décor et les personnages, la qualité du trait et le rendu de l’expression de l’enfant : cela semble tout droit sorti de l’univers du Petit Nicolas.

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Sempé  | remerciements à Bénédicte Dochain, Frédéric Paques et Pascale Bastin

HERRERA, Carmen (1915-2022)

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[LIBERATION.FR, 15 février 2022] Mieux vaut tard que jamais. Cette expression est particulièrement vraie en ce qui concerne la peintre Carmen HERRERA, décédée le 12 février à 106 ans dans son loft de Manhattan.

Travaillant incognito pendant toute sa carrière, exposant sans relâche mais sans vendre aucune toile, la pionnière de l’abstraction géométrique a connu le succès tardivement, à la suite d’une exposition collective à la Latin Collector Gallery à New York en 2004. C’est à cette période qu’elle vend sa première œuvre à l’âge de 90 ans. Pour aller jusque sur les cimaises du Whitney Museum qui lui consacre une rétrospective en 2016. Ses tableaux et sculptures, joyeux cocktail de triangles, de rectangles, de lignes brisées et de couleurs contrastées ont alors rencontré un très grand succès aux enchères et dans les foires. Le fait d’être une femme latino-américaine dans le milieu de la peinture minimaliste volontiers sexiste explique son succès tardif.

Continuant sa peinture comme si de rien était, Carmen Herrera n’a été ni arrêtée ni freinée par le manque de reconnaissance. Coûte que coûte, elle a continué à peindre par “amour de la ligne pure”, comme elle l’a confié au New York Times en 2009, considérant que “la gloire était quelque chose de vulgaire”. “C’est comme un bus, que j’ai attendu pendant près de cent ans”, a-t-elle aussi déclaré.

Gemini (2007) © Sheldon Museum of Art

La recherche des couleurs et des formes pures

Née à La Havane en 1915, l’artiste grandit dans une famille progressiste : son père est le fondateur d’El Mundo à Cuba et sa mère, féministe, exerce le métier de reporter. C’est à Paris et à La Havane que Carmen Herrera étudie l’art, l’histoire de l’art et l’architecture. Pendant la guerre, étudiante à l’Art Students League de New York (1942-1943), elle rencontre Barnett Newman et Ellsworth Kelly, grandes figures de l’expressionnisme abstrait. Dans les années 50, l’artiste cubano-américaine expose au Salon des réalités nouvelles à Paris, un vivier de l’abstraction, de l’art concret et de l’art géométrique. Si elle vit entre La Havane et Paris dans les années 30 et 40, elle s’installe définitivement à New York en 1954. Et persévère sans fléchir, vivant de peu, soutenue financièrement par son mari, dans sa recherche des couleurs et des formes pures. En 2004, son style est comparé par un critique du New York Times à celui de Piet Mondrian, Ellsworth Kelly et Lygia Clark  : sa réussite éclate enfin. Aujourd’hui, ses toiles font partie des collections du Moma, de la Tate Modern ou du Walker Art Center de Minneapolis. A Paris, en 2021, deux de ses tableaux ont été remarqués dans l’exposition Elles font l’abstraction au Centre Pompidou.

Clémentine Mercier


© Richard Drew – AFP

[CONNAISSANCEDESARTS.COM] La galerie Lisson a annoncé la mort de Carmen Herrera qu’elle exposait depuis 2010. Elle est décédée “paisiblement dans son sommeil” à 106 ans dans son appartement de New York.

Toute sa vie passionnée par l’art abstrait et les figures géométriques, son travail, en tant que femme artiste, n’a pas été reconnu avant les années 2000. “Il en aura fallu du temps, grand Dieu, ils auront attendu longtemps“, a-t-elle pu déclarer, visiblement peu rancunière. Encore active pendant ces vingt dernières années, où sa cote sur le marché de l’art a explosé, elle prévoyait une exposition chez Lisson en mai prochain pour son anniversaire.

La beauté de la ligne droite

Je crois que je serai toujours en admiration devant la ligne droite, sa beauté est ce qui me fait continuer à peindre.” Carmen Herrera s’est inspirée toute sa vie de la ligne rigoureuse. Pendant 80 ans, elle a proposé des œuvres structurées, sobres et colorées. Elle s’oppose à une vision sensitive de la peinture. Ses peintures témoignent d’un travail sérieux de l’espace et des séparations sur la toile. Elle commençait par des dessins à l’échelle sur papier-calque, annotait des mesures et finalement reproduisait le rendu final à l’acrylique sur la toile. Le conservateur Jonathan Watkins, un des premiers à lui proposer une exposition dans la galerie anglaise Ikon en 2009, résumait : “Nous avons eu la chance de travailler avec quelqu’un qui était à la fois intransigeant sur le plan esthétique et si généreux.”

Régime végétarien ou presque

Carmen Herrera est née à La Havane à Cuba en 1915. Son père rédacteur en chef du journal El Mundo meurt en 1917 pendant la révolution. Sa mère, également journaliste, pionnière et engagée dans le féminisme, lui a servi de modèle. Elle commence des études d’art à Cuba puis à Paris. Francophone, elle y vivra à nouveau avec son mari Jesse Loewenthal pendant l’après-guerre. De retour à New York dans les années 50, elle y est restée pour le reste de sa longue vie. Interrogée sur son secret de longévité une fois passée le centenaire, elle évoque le régime végétarien et un verre de scotch quotidien. “Rien d’extraordinaire”, résume-t-elle. “Faire ce qu’on aime, et le faire tous les jours. C’est ce que je fais. Je me lève, je petit-déjeune et je me mets à travailler.

La reconnaissance à 89 ans

C’est par hasard quand une autre artiste se désiste pour l’exposition sur l’abstraction géométrique latino-américaine à la Latin Collector Gallery de TriBeCa à New York en 2004 que les œuvres de Carmen Herrera sont vues sous une lumière nouvelle et plus vaste. Elle est alors âgée de 89 ans. Le réputé Whitney Museum of American Art lui consacre une importante rétrospective en 2016, Carmen Herrera : Lines of Sight. Ses œuvres se trouvent maintenant dans plusieurs collections permanentes de musées, dont le Guggenheim d’Abu Dhabi, le MoMA à New York et la Tate Modern à Londres. Elle expose d’imposantes structures d’aluminium dans le City Hall Park de New York nommées Estructurales monumentales en 2019.

Elle n’est pas naïve quant à l’oubli de son art par l’histoire et les professionnels pendant de si longues années. Son statut de femme est clairement ce qui l’a écarté de la notoriété. Elle raconte dans un documentaire qui lui est consacré en 2015, The 100 years show, qu’une femme galeriste lui a un jour dit qu’elle était une meilleure peintre que beaucoup de ses contemporains masculins les plus célèbres, mais  “qu’il n’y aurait pas de spectacle parce que vous êtes une femme“. L’artiste a déclaré: “Je suis sortie de là comme si quelqu’un m’avait tapé dessus. Une femme à une femme ?

Flight of Colours (1949) © Sheldon Museum of Art

Un monde d’hommes… et Georgia O’Keeffe

Son œuvre se rapporte au mouvement esthétique abstrait de l’hard edge, typique de l’art américain à succès dans la seconde moitié du XXème siècle. Elle est aussi l’une des premières à utiliser la peinture acrylique à base de solvants à cette époque. Des artistes, hommes et blancs, qui effectuaient un travail très similaire comme Ellsworth Kelly et Barnett Newman bénéficiaient eux d’une visibilité tout autre. “Tout était contrôlé par les hommes, pas seulement l’art. Je connaissais [le peintre] Ad Reinhardt et il était terriblement obsédé par Georgia O’Keeffe et son succès. Il la détestait. Je la détestais  ! Georgia était forte, et ses peintures étaient exposées partout, et il était jaloux.” dénonce-t-elle en 2016 une fois que sa voix était davantage entendue à force que son art soit vu et respecté.

Louise Bernard


[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : compilation, partage, édition et iconographie | sources : liberation.fr ; connaissancedesarts.com | contributeur : Philippe Vienne & Patrick Thonart | crédits illustrations : en-tête, Lines of Sight © Whitney Museum ; © Sheldon Museum of Art ; © Richard Drew – AFP.


Plus d’arts visuels en Wallonie…

WOKE : Un musée anglais retire un tableau de nymphes nues pour lancer un débat sur le sexisme | HUSTVEDT : Une femme regarde les hommes regarder les femmes (2021)

Temps de lecture : 3 minutes >

[SLATE.FR, 1 février 2018, d’après The Guardian] À la Manchester Art Gallery, une peinture du XIXe siècle a été remplacée par une affiche avec des commentaires sur la représentation du corps des femmes dans l’art.

Le tableau Hylas et les nymphes du peintre britannique John William Waterhouse n’est plus exposé à la Manchester Art Gallery depuis le 26 janvier. À la place de cette oeuvre préraphaélite, le musée a accroché une feuille de papier qui explique sa disparition :

Cette galerie présente le corps des femmes soit en tant que “forme passive décorative” soit en tant que “femme fatale”. Remettons en cause ce fantasme victorien ! Cette galerie existe dans un monde traversé par des questions de genre, de race, de sexualité et de classe qui nous affectent tous. Comment les œuvres d’art peuvent-elles nous parler d’une façon plus contemporaine et pertinente?»

Les visiteurs sont invités à écrire leurs commentaires sur des petits papiers ou à en discuter sur Twitter [AKA X]. Jusqu’ici, la plupart des réactions sont critiques et certains accusent le musée de censurer une œuvre sous prétexte de ‘débattre’ et de ‘contextualiser’.

“Bon sujet de débat mais, svp, remettez la toile à sa place et ANALYSEZ-la dans son CONTEXTE.” © Manchester City Galleries

Plus de cent personnes ont signé une pétition pour que le tableau soit remis à sa place. Le texte dénonce une “censure politiquement correcte.”

Le décrochage du tableau a été filmé et fait partie d’une performance de l’artiste Sonia Boyce, dont le travail sera exposé au musée à partir de mars. La boutique du musée cessera aussi de vendre toute reproduction de cette œuvre.

La salle dans laquelle Hylas et les nymphes était exposée s’appelle Recherche de la beauté et contient de nombreuses peintures du XIXe siècle représentant des femmes dénudées. Or pour Clare Gannaway, la conservatrice à l’origine de cette initiative, le titre est gênant car il s’agit seulement d’artistes hommes qui s’intéressent à des corps de femmes. Elle explique que le mouvement #MeToo a influencé sa décision de lancer ce débat et que le tableau pourrait bientôt être réexposé, mais avec une ‘contextualisation’ différente.

Le critique d’art du Guardian a vivement critiqué le retrait du tableau, expliquant que ce genre de discussion sur la représentation des femmes devrait se faire devant l’œuvre elle-même, pas en la censurant.

Claire Levenson


EAN 9782330157104

Une femme regarde les hommes regarder les femmes (2021). Siri Hustvedt, fidèle à son engagement envers la cause des femmes, analyse ici la nature et les implications du regard, bien souvent manipulateur, voire prédateur, que les artistes de sexe masculin tendent à poser sur les femmes (quelles soient ‘simples’ modèles ou elles-mêmes artistes). Mais elle s’attache surtout à identifier les partis pris, conscients et inconscients, qui affectent notre manière de juger l’art, la littérature et le monde en général. Convoquant entre autres les œuvres de Picasso, De Kooning, Max Beckmann, Jeff Koons, Robert Mapplethorpe, en passant par Pedro Almodovar, Wim Wenders, Louise Bourgeois ou Emily Dickinson, l’auteur d’Un monde flamboyant développe une réflexion sur l’art dans ses rapports avec la perception ; elle interroge la façon dont nous évaluons la notion de créativité et montre que les critères d’appréciation se modifient constamment dès lors que nous nous déplaçons d’une culture à une autre ou d’une période de l’histoire à la suivante – alors même que d’aucuns prétendent que tout art digne de ce nom relève de critères tout à la fois universels, intemporels et quasi immuables. S’insurgeant contre un tel postulat, Siri Hustvedt, respectueuse de l’éthique intellectuelle dont elle a toujours fait preuve en tant qu’essayiste, privilégie les questions par rapport aux réponses et se montre avant tout soucieuse d’ouvrir des espaces de libre discussion, invitant le lecteur à adopter divers angles d’approche, comme pour mieux lui laisser le choix ultime de celui qu’il fera sien.” [d’après ACTES-SUD.FR]


[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : compilation, édition et iconographie | sources : slate.fr | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : en-tête, WATERHOUSE John William, Hylas and the Nymphs (1896, non-censuré dans wallonica.org) © Manchester City Galleries ; © Actes Sud.


Plus d’engagement en Wallonie…

DESIR : Moissac (2013, Artothèque, Lg)

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DÉSIR Marie-Jeanne, Moissac

(impression photographique, 33 x 55 cm, 2013)

Marie-Jeanne DESIR a participé à l’atelier “Gravure” du Centre culturel de Marchin. Pour elle, graver, c’est élaborer un projet, penser son sens et son graphisme, revenir sans cesse sur l’ouvrage, travailler, imprimer, travailler… Ce qui lui plaît, in fine, c’est le corps, les mains qui fabriquent et expriment “au plus juste” des émotions. Marie-Jeanne Désir est également écrivaine et a publié plusieurs livres (d’après CENTRECULTURELMARCHIN.BE)

Marie-Jeanne Désir utilise des reproductions de vieux documents des chemins de fer français. Son intervention colorée vient apporter un regard décalé, un commentaire amusé qui tranche avec l’austérité un peu désuète du document original. Ici, à côté d’une coupe altimétrique d’un chemin de fer, l’artiste ajoute des masses colorées rappelant les reliefs sur les cartes géographiques.

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Marie-Jeanne Désir ; culture.uliege.be  | remerciements à Bénédicte Dochain, Frédéric Paques et Pascale Bastin

WUIDAR : La Chanteuse (1987, Artothèque, Lg)

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WUIDAR Léon, La Chanteuse

(sérigraphie, 56 x 38 cm, 1987)

Léon WUIDAR (né en 1938) est un artiste multiple : peintre, graveur, dessinateur, illustrateur de livres… Très attiré par l’architecture, persuadé de la complicité entre l’architecte et le plasticien, il réalise de nombreuses intégrations pour divers édifices publics (restaurant universitaire du Sart-Tilman, lambris émaillés au CHU à Liège et dans une crèche à Paris, grille en façade du Centre administratif du MET à Namur…). Si les compositions de Léon Wuidar reposent sur l’ordonnance des formes géométriques, des lignes et des couleurs, leur structure interne est stimulée par une dynamique empruntée aux jeux de mots (le cadavre exquis le passionne), aux jeux de formes (le Tangram chinois, les anciens almanachs sans textes), à la conception d’objets de tradition artisanale. (d’après MUSEEROPS.BE)

La Chanteuse est une sérigraphie d’apparence abstraite. Son titre incite pourtant le spectateur à y voir quelque chose. En y regardant bien, peut-être peut-on y voir une boîte munie d’une poignée rouge contenant une paire de notes de musique recroquevillées, prêtes à reprendre forme une fois le couvercle ouvert. Le clapet fermé, la chanteuse reste cependant muette…

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Léon Wuidar ; Librairie Pax  | remerciements à Bénédicte Dochain, Frédéric Paques et Pascale Bastin

MEHADJI, Najia (née en 1950)

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[NAJIAMEHADJICOM] Najia MEHADJI, née en 1950 à Paris d’un père marocain et d’une mère française, est une artiste franco-marocaine. Elle vit et travaille entre Paris et Lamssasa (près d’Essaouira). Sa double origine l’amène à créer très tôt dans ses œuvres une synthèse entre cultures occidentale et orientale et à s’ouvrir à d’autres expressions comme la performance et la musique dans un processus expérimental.

Le travail de Najia Mehadji peut se diviser en plusieurs grandes périodes de création. Après des peintures d’empreintes (1980-1990) influencées par la musique contemporaine, puis des peintures/dessins, monochromes sur tissu de lin, aux formes symboliques universelles (1990-2010). Elle développe depuis 2010 des œuvres centrées sur le geste en s’inspirant de la calligraphie orientale, du soufisme et de la danse. Elle crée ainsi sa propre écriture tout en lignes continues et dynamiques, dans une performance physique et mentale. Elle réalise parallèlement des œuvres numériques engagées contre la barbarie de la guerre (notamment sur le sort des femmes) et contre la peine de mort dans le monde .

Ses principales expositions personnelles ont eu lieu, en France, aux musées des beaux-arts de Poitiers, de Caen et d’Épinal ; à la galerie Montenay (Paris) ; à la salle Saint-Jean (Mairie de Paris) ; à la galerie La Navire (Brest). Au Maroc, à la Galerie Nationale Bab Rouah (Rabat) ; à l’espace Actua de l’Attijariwafabank (Casablanca) ; à la galerie Delacroix (Tanger) ; à la galerie Shart et la galerie d’art l’Atelier 21 (Casablanca). Au Qatar, à l’Anima Gallery à Doha. Elle a également exposé à Amman (Fondation Shoman), à la foire de Bâle , à l’Arco de Madrid, au FI:AF (French Institut:Alliance Française) à New York et dans de nombreuses institutions dans le monde.


Najia Mehadji © animagallery.com

[AEMAGAZINE.MA, 10 avril 2024] L’artiste plasticienne Najia Mehadji réinvestit la galerie d’art L’Atelier 21 à Casablanca, du 23 avril au 24 mai 2024, pour une quatrième exposition individuelle intitulée Rosebud.

Dans le texte du catalogue d’exposition, l’auteur et historien de l’art Brahim Alaoui fait la lumière sur le travail récent de l’artiste en ces termes : “Najia revient sur la série War Flower qu’elle réinterprète en 2023 dans une version qu’elle dénomme Rosebud (bouton de rose), en référence au mot murmuré par le richissime héros mourant dans le film mythique d’Orson Welles, Citizen Kane, et dont on comprend à la fin que Rosebud est l’incarnation de l’amour qui surpasse le pouvoir et la réussite matérielle. Dans cette série Rosebud, Najia remet à l’honneur la rose, “symbole d’offrande, d’amour, de beauté, d’éphémère, en contrepoint à la mort”, pour manifester sa compassion pour la tragédie humaine en cours en Palestine et ailleurs. Elle métamorphose la rose en une gestuelle tout en rondeur qu’elle déploie énergiquement par l’entremise d’une peinture fluide, et d’un large pinceau sur ses toiles monochromes, afin de la faire surgir dans l’intensité de l’instant.” Et de poursuivre : “Dans ces œuvres conjuguant la dextérité, l’impulsion, la liberté, où le corps s’implique et se lie en un geste continu porté par l’élan de la main et de l’esprit, Najia Mehadji nous livre la quintessence de son expérience et de sa réflexion à travers l’invention de sa propre calligraphie unissant le sensuel et le spirituel qui célèbre la lumière de la vie.”

Dès les années 80, l’œuvre de Najia Mehadji effectue une synthèse entre un art contemporain qui renouvelle la peinture et des éléments de l’art islamique tels que la coupole, le polygone, le floral, l’arabesque ou la calligraphie, au bénéfice de nouveaux concepts et de nouvelles formes au sein desquels l’artiste invente son propre style. Considérée comme l’une des artistes majeures de la scène africaine, Najia Mehadji ne cesse de renouveler son art en lui ouvrant à chaque fois de nouvelles possibilités d’expression. Une constante demeure toutefois dans les œuvres de l’artiste : un geste reconnaissable entre tous et qui permet d’identifier immédiatement l’auteur des peintures et des dessins. Cette gestuelle à la fois libre et parfaitement maîtrisée s’impose dans les œuvres de Najia Mehadji comme une tentative de percer le mystère même de la peinture.

Les œuvres de Najia Mehadji font partie de nombreuses collections dont celle de l’Institut du monde arabe (France), du Fonds National d’art contemporain de Paris (France), du Musée d’art moderne et contemporain du Centre Georges Pompidou (France), du Musée d’art moderne de Céret[ (France), du Musée des Beaux-Arts d’Amman (Jordanie) et du Musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain (Maroc). L’artiste vit et travaille entre Paris et Essaouira.


Najia Mehadji, “Gwana Soul” © Najia Mehadji

[OFFICIEL-GALERIES-MUSEES.FR, 20 octobre 2023] Le pinceau en mouvement. Cela pourrait sans doute être le mantra de cette artiste reconnue. Dans ses toiles se déploient des dégradés de couleurs expressives qui suggèrent l’ondulation ou l’expansion. Najia Mehadji peint le geste et réussit à saisir chaque moment éphémère et particulier où le pinceau s’exprime pour montrer toute sa beauté. Dans son art, l’espace pictural est sublimé par une esthétique sobre et subtile. Franco-marocaine, l’artiste partage sa vie entre son atelier parisien et son atelier marocain près d’Essaouira. Elle utilise sa double culture pour produire un art qui floute les frontières, fusionnant les influences occidentales et orientales. Diplômée de l’Ecole des Beaux-arts de Paris, elle s’intéresse très tôt au théâtre nô japonais et aux performances de musique contemporaine. La craie sanguine, le fusain ou encore l’encre font partie de ses matériaux de prédilection.

Cette exposition [à la Galerie 110 à Paris] sera l’occasion de (re)découvrir “Ligne de vie”. Cette œuvre énergique créée en mars 2020, lors de la pandémie de COVID-19. Ses tons intenses turquoise nous invitent à la l’évasion et à l’espoir. La Galerie 110 Véronique Rieffel expose également la série W&W (women & war) qui combine peinture et sérigraphie et fait référence au sort des femmes ukrainiennes et iraniennes.

Najia Mehadji privilégie l’usage du noir et du blanc, couleurs phares du soufisme dont elle s’inspire et se nourrit. La bichromie confère à son travail une réelle profondeur. Lorsque nos yeux se posent sur ses créations, ils sont frappés par le contraste de ces lignes qui se croisent et se percutent. Dans ses peintures ou ses dessins, sa calligraphie semble surgir des entrailles d’un océan caché. De cet océan, l’on aperçoit des fleurs qui brillent d’une lumière majestueuse et douce. Najia Mehadji construit des rubans de pétales qui dansent librement sur ses toiles.

La liberté, très chère à cette artiste engagée, se retrouve dans l’ensemble de son travail artistique. Elle s’inspire des danses mystiques du soufisme ainsi que de son expérience personnelle des arts vivants. La Valse de Camille Claudel constitue également une de ses inspirations principales. Son œuvre, à la croisée des arts tire toute sa singularité de la poésie qui émane de sa calligraphie, véritable hymne à la spiritualité. Najia Mehadji réalise des pièces irriguées par la vie qui propagent une énergie pure, un vent puissant et rafraîchissant. Avec son langage artistique, elle nous montre tout aussi bien l’élégance d’une mer tranquille que la tempête d’une pensée en mouvement.


[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation, correction et décommercialisation par wallonica.org | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : image en tête de l’article : Série “W & W” © Najia Mehadji 


Plus d’arts visuels en Wallonie et à Bruxelles…

LO BIANCO : Jambes habillées (2010, Artothèque, Lg)

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LO BIANCO Audrey, Jambes habillées

(eau-forte, 22 x 22 cm, 2010)

Audrey LO BIANCO est née en 1984. Licenciée en arts plastiques, visuels et de l’espace, recherches picturales et tridimensionnelles de l’Académie des Beaux-arts de Liège, Audrey Lo Bianco a reçu différents prix en Belgique et au Luxembourg, et a exposé à différentes éditions de la Biennale internationale de gravure (Liège), à la Bienal internationale de Villa Nova de Cerveira (Portugal), au Centre culturel des Chiroux et dans de nombreuses galeries belges et étrangères. (d’après OUT.BE)

A travers une série de gravures minimalistes, Audrey Lo Bianco aborde avec délicatesse le monde de l’enfance. L’eau-forte permet un trait fragile et tremblé, les ratures et le fonds grisâtre évoquent une vieille photographie. Silhouettes, jambes, chaussures… les détails s’accumulent, comme autant de fragments nostalgiques ou de trésors inestimables et dérisoires.

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Audrey Lo Bianco ; academieroyaledesbeauxartsliege.be  | remerciements à Bénédicte Dochain, Frédéric Paques et Pascale Bastin

PINELLI : Heinz Von Furlow, Hollande, 1929 (2014, Artothèque, Lg)

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PINELLI Joe Giusto/Hans Von Furlow, Hollande, 1929

(lavis à l’encre de chine, 30 x 2o cm, 2014)

Joe G. (Giusto) PINELLI (né en 1960) est un illustrateur, dessinateur et scénariste de bande dessinée.  Il arrive à Liège à la fin des années 1970, pour y suivre le cours de bande dessinée de Jacques Charlier à l’Académie Royale des Beaux-Arts. Lorsqu’il commence à réaliser ses premières bandes dessinées, il décide de se raconter, de mettre en image son quotidien. De nombreux extraits de ces récits autobiographiques, sont publiés dans des fanzines, tant en Belgique qu’en France ou encore aux Pays-Bas. Son graphisme libéré et tendu en fait l’un des auteurs importants de la Bande dessinée indépendante.

Ce dessin au lavis d’encre de chine fait partie des carnets de dessins du peintre fictif Hans Von Furlow, créé par Joe G. Pinelli et évoqué notamment dans son album Féroces Tropiques (Dupuis, sur scénario de Thierry Bellefroid). A travers la biographie d’un autre peintre fictif, celle de Kurt Hix, Pinelli évoque en filigrane la première guerre mondiale et plus tard, dans une série de fanzines, la montée du nazisme.

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

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VAN MALDEREN : 1_2D+AD (1993, Artothèque, Lg)

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VAN MALDEREN Luc, 1_2D+AD

(linogravure, 66 x 50 cm, 1993)

Luc Van Malderen (1930-2018) est diplômé en 1951 de l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture et des Arts décoratifs. Il ouvre un bureau de création graphique en 1958, qu’il fermera en 1978 pour se consacrer à la peinture et à la sérigraphie. Professeur à l’ENSAV de La Cambre à Bruxelles, il exerce, tant en Belgique qu’à l’étranger, une activité de recherches et de diffusion des arts. Il a enseigné dans une vingtaine d’universités principalement aux USA (d’après CENTREDELAGRAVURE.BE).

L’univers iconographique revisite de façon ludique le thème de l’architecture, pour en dresser un inventaire rigoureusement subjectif. Comme le dit lui-même l’artiste : “Je ne suis pas un architecte. Je suis un fabricant d’objets qui représentent l’architecture via des fausses projections obliques, des schémas élémentaires, des configurations aléatoires (et parfois industrielles), des volumes naïfs…” (d’après CENTREDELAGRAVURE.BE)

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RANSONNET : Sans titre (2003, Artothèque, Lg)

Temps de lecture : 2 minutes >

RANSONNET Jean-Pierre, Sans titre

(xylogravure, 42 x 32 cm, 2003)

Jean-Pierre RANSONNET, né à Lierneux en 1944, est un artiste belge. Il vit et travaille à Tilff, en Belgique. Formé à l’École supérieure des Arts Saint-Luc de Liège (1962-1968), Jean-Pierre Ransonnet séjourne en Italie en 1970 grâce à une bourse de la fondation Lambert Darchis. Il enseigne le dessin à l’Académie des Beaux-Arts de Liège de 1986 à 2009.

Cette série de gravures sur bois de Jean-Pierre Ransonnet est une variation sur des formes plastiques abstraites, ou évoquant des sapins. L’artiste use de l’expressivité du bois gravé, laissant transparaître les veines du bois, matière même de son discours.

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Jean-Pierre Ransonnet ; mu-inthecity.com | remerciements à Bénédicte Dochain, Frédéric Paques et Pascale Bastin

HODLER, Ferdinand (1853-1918)

Temps de lecture : 6 minutes >

“Plus je m’approche de la grande Unité, plus je veux que mon art devienne simple et grand.”

[MOREEUW.COM] L’artiste peintre suisse Ferdinand HODLER naît le 14 mars 1853 à Berne. Il est considéré de son vivant comme l’un des chefs de file de la modernité. Ferdinand Hodler décède le 19 mai 1918 à Genève.

La mère de Ferdinand Hodler meurt en 1867, le laissant orphelin à 14 ans. De 1868 à 1870, il effectue son apprentissage à Thoune chez le peintre Ferdinand Sommer. En 1871, Ferdinand Hodler se rend à Genève pour y copier les tableaux d’Alexandre Calame et de François Diday.

Ferdinand Hodler vit à Genève jusqu’à sa mort en 1918, mais il accomplit, après des débuts difficiles, une carrière européenne, jalonnée de scandales et de succès. Membre des grandes Sécessions, il voit son œuvre saluée à Vienne, Berlin et Munich à partir des années 1900.

Mais, c’est Paris qui lui offre sa première consécration en 1891 lorsqu’il y présente son tableau manifeste, La Nuit (1889-1890), interdit d’exposition pour inconvenance par la ville de Genève. Salué par Puvis de Chavannes, Rodin et la critique française, ce tableau lance la carrière internationale de Hodler et en fait un des représentants majeurs du symbolisme.

Au tournant du siècle, Zurich, Genève, Iéna ou Francfort lui passent d’importantes commandes publiques qui sont autant d’occasions pour l’artiste d’expérimenter son goût pour une peinture simplifiée, monumentale et décorative. Il met en scène des épisodes fondateurs de l’histoire de la Confédération suisse (La bataille de Morat, 1917) et des figures emblématiques comme les faucheurs et bûcherons.

Ferdinand Hodler s’impose ainsi dès la fin des années 1890 comme le peintre national suisse par excellence. Dans sa peinture de paysage, il s’attache à magnifier la nature, et en particulier les montagnes, renouvelant profondément le genre. La fidélité à la topographie des lieux s’accompagne d’une stylisation rigoureuse, imposant Hodler comme un paysagiste hors pair, à l’égal de Cézanne.

Convaincu que la beauté repose sur l’ordre, la symétrie et le rythme, Ferdinand Hodler fonde ses compositions sur ce qu’il appelle le “parallélisme” (“répétition de formes semblables“).

Ferdinand Hodler est également un portraitiste profondément novateur : en témoignent des effigies de collectionneurs (Portrait de Gertrud Müller, 1911), de poètes et de critiques qui l’ont soutenu, mais aussi des autoportraits sans concession (Autoportrait aux roses, 1914), qui préfigurent le cycle de Valentine, sans équivalent dans l’histoire de l’art. De sa compagne à l’agonie, Hodler tire entre 1914 et 1915 une série de portraits qui sont autant de témoignages bouleversants de l’avancée de la maladie et de la mort (Valentine sur son lit de mort, 1915). Après ce cycle, Hodler poursuit sa méditation sur la mort à travers une série de vues presque abstraite du lac de Genève où culmine la quête de simplicité et d’unité que le peintre n’a cessé de radicaliser.

Expositions Ferdinand Hodler (sélection)

      • 2013 : Ferdinand Hodler – Fondation Beyeler, Bâle,
      • 2007 : Ferdinand Hodler – Musée d’Orsay, Paris. L’exposition du musée d’Orsay a pour ambition de redéfinir les sources et la géographie de l’art moderne et de contribuer à rendre à Ferdinand Hodler la place centrale qui fut la sienne au sein des avant-gardes européennes du tournant du XXe siècle. Lié au symbolisme, Hodler a en effet ouvert des voies décisives vers l’abstraction mais aussi l’expressionnisme. L’exposition rassemble 80 tableaux majeurs jalonnant la carrière de l’artiste, à partir du milieu des années 1870 jusqu’aux paysages ultimes de 1918 : tous les genres abordés par le peintre, grandes compositions de figures symbolistes, tableaux d’histoire, paysages et portraits sont représentés. Deux cabinets d’arts graphiques, autour des compositions symbolistes (Le Jour III, 1909-10 et la Vérité II, 1903) et des peintures d’histoire, permettent de comprendre les processus de création de Hodler, dessinateur inlassable. Une quarantaine de photographies, prises par des proches et en particulier par Gertrud Dubi-Müller, amie, collectionneuse et modèle de Hodler, nous font entrer dans l’atelier du peintre.
      • 2005 : Ferdinand Hodler et Genève – Musée Rath, Genève. Le Musée d’art et d’histoire de Genève possède une des collections publiques consacrées à Ferdinand Hodler parmi les plus significatives pour la compréhension de sa trajectoire, tant par le nombre d’œuvres que par la richesse thématique représentée. L’ensemble comprend 142 peintures, 657 dessins, ainsi que 241 carnets de dessins. La collection illustre non seulement tous les thèmes abordés par l’artiste – que ce soient les portraits, les autoportraits, les scènes de genre, la peinture d’histoire, le symbolisme ou encore le paysage -, mais également l’ensemble des étapes qui se succèdent dans sa pratique artistique. Le parcours chronologique débute, en effet, par une des toutes premières “vues suisses”, réalisée alors qu’il est apprenti chez Ferdinand Sommer à Thoune, et s’achève avec un dernier paysage, laissé inachevé sur le chevalet face à cette rade de Genève qu’il a peinte jusqu’à son dernier souffle. La collection que conserve le Musée d’art et d’histoire est trop vaste pour y être exposée intégralement. Mise en résonance avec un nouvel accrochage dans les salles de Charles-Galland, l’exposition Ferdinand Hodler et Genève, collection du Musée d’art et d’histoire, présentée au Musée Rath, réunit un ensemble de plus de 80 toiles de ce fonds et sera, à la suite de Ferdinand Hodler. Le paysage, l’occasion d’une redécouverte des aspects essentiels de la recherche menée depuis Genève par Ferdinand Hodler tout au long de sa vie.

“Femme joyeuse”, ca. 1911 © hiltiartfoundation.li

Ferdinand Hodler, de la Nuit à la lumière

[EXPOREVUE.COM] Considéré de son vivant comme un peintre important de la modernité, son parcours est parsemé de succès et de scandales. Il prit effectivement part à de nombreuses expositions sécessionnistes, invité notamment à Vienne par Koloman Moser ou à La Libre Esthétique de Bruxelles.

S’attachant d’abord aux thèmes des paysages et de la figure dans un style réaliste, il se dirige ensuite vers le symbolisme en élaborant sa propre théorie esthétique dès 1897, s’inspirant entre autres des travaux de Puvis de Chavannes. Celle-ci est conçue sur l’observation des parallélismes, répétitions et effets de symétrie comme étant des lois immuables de la nature, à partir desquelles il construit ses compositions.

Mais Hodler précise toutefois : “Le dessin et la couleur sont mes seuls moyens d’expression. La signification intime de mes œuvres est représentée directement par la ligne, la composition et la couleur, il n’y a rien à deviner, il n’y a qu’à voir. Je ne suis ni allégoriste, ni danseur de cordes, ni symboliste car mes œuvres ne représentent rien de surnaturel, d’invisible, qu’il faille expliquer ; ce n’est que la vérité telle que je la vois. Je suis un synthétiste.” (Loosli, 1921-1924, repris in Ferdinand Hodler (1853-1918))

Après des débuts modestes et souvent difficiles, le succès viendra du scandale que suscite la présentation à Genève de La Nuit (1889-1890), l’une des toiles majeures présentées à Orsay. Cette œuvre monumentale représente l’artiste assailli par une inquiétante figure drapée de noir, alors que six autres personnages sont allongées autour de lui, dont sa femme et sa maîtresse. Cette dernière est présentée de dos dans une nudité qui fut jugée indécente à Genève et conduisit à sa censure.

Avec plus d’une centaine d’autoportraits, l’exposition démontre le rôle important de l’introspection dans l’œuvre de Hodler et permet d’en retracer son évolution artistique. La série de toiles et de dessins réalisée au cours de l’hiver 1914 lors de la maladie et de l’agonie de sa maîtresse Valentine Godé-Darel, nous introduit presque de manière indécente dans leur intimité, mais aussi dans la vision du peintre de la maladie, du corps et finalement de la mort de celle qu’il a aimé. Par l’acidité de certaines couleurs, de traits acérés et anguleux, ses figures évoquant parfois des portraits et autoportraits d’Egon Schiele, il trace âprement les contours des corps, telles de sèches arrêtes, douloureux contenant physique et mortel.

Avec ses paysages, le peintre propose une alternative à l’impressionnisme à travers laquelle se devine déjà la montagne Sainte-Victoire de Cézanne, comme est également perceptible une certaine filiation avec la peinture romantique allemande tel que Friedrich. Ses paysages sont directement tirés de son environnement immédiat avec un sentiment de grandiose et de sublime, accentués par des formats monumentaux d’où se dégagent la prédominance du vide sur la matière et les vibrations de la couleur. Leur construction, dont il réduit les lignes à l’essentiel pour en extraire la beauté naturelle, peut également s’apparenter à la série d’arbres de Mondrian. Dans le contexte de la rétrospective, l’actualité de sa peinture est soulignée par le parallèle établi avec le peintre Helmut Federle, dont l’œuvre 4,4 The Distance (2002) y est exposée.

En quête d’une reconnaissance artistique et critique sur la place de Paris tout au long de sa vie, cette rétrospective permet de le resituer dans cette période de l’histoire de l’art et met en lumière les nombreuses correspondances à établir avec ses contemporains et successeurs. Tourments, sensibilité, émotion, principaux moteurs de la peinture de Ferdinand Hodler, en font un artiste universel et intemporel.

Jennifer Beauloye, Paris, décembre 2007


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Plus d’arts visuels en Wallonie et à Bruxelles…

CORBISIER : Sans titre (2006, Artothèque, Lg)

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CORBISIER Brigitte, Sans titre

(technique mixte, 26 x 26 cm, 2006)

Brigitte CORBISIER, née en 1946, est diplômée de l’Académie royale des Beaux-Arts de la Ville de Liège, est graveur et plus récemment auteur d’animations vidéo où elle met en scène des gravures et croquis animés. Incisant le zinc, creusant le plexiglas, la pointe sèche est son instrument de prédilection, parfois combinée à l’aquatinte ou encore à la linogravure. Inspirée par la nature, et essentiellement la terre, c’est son jardin au quotidien qui s’illustre par étape dans ses œuvres.

Brigitte CORBISIER réalise une composition de motifs organiques en jouant sur les supports d’impression (papier et feutre), qui offrent des sensations visuelles très différentes, à la fois par leur texture mais aussi par la manière dont ils absorbent l’encre. La matérialité de l’œuvre est soulignée par le traitement brut, autant de la technique gravée que de l’assemblage des matériaux.

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Brigitte Corbisier | remerciements à Bénédicte Dochain, Frédéric Paques et Pascale Bastin

MATHY : Sans titre (2016, Artothèque, Lg)

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MATHY Vincent, Sans titre

(impression numérique, 40 x 30 cm, 2016)

Vincent MATHY, né à Liège en 1971, a suivi les cours de l’école Saint-Luc de Bruxelles. Son dessin, qui mêle techniques traditionnelles et numériques a très vite séduit. Illustrateur de talent, il a publié une trentaine d’albums jeunesse (Gallimard Jeunesse, Albin Michel, Bayard, Milan, L’Ecole des Loisirs…) et de bandes dessinées. Il est notamment co-auteur de la série “Ludo” chez Dupuis. (d’après  GALLIMARD-JEUNESSE.FR)

Cette image est tirée d’un ensemble publié par l’éditeur liégeois Ding Dong Paper en 2016. Ici Vincent Mathy développe un vocabulaire fait de formes simples, géométriques, et de couleurs vives, dans la lignée d’illustrateurs comme le Russe Vladimir Lebedev, l’Anglais Fredun Shapur ou l’Italien Bruno Munari.

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

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ANDRE, Carl (1935-2024)

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[CONNAISSANCEDESARTS.COM, 25 janvier 2024] Derrière l’austérité de l’homme se cachait le talent d’un grand artiste qui a révolutionné la sculpture. Carl ANDRE, pionnier de l’art minimal et maître de l’épure, est décédé mercredi 24 janvier à l’âge de 88 ans.

Lorsque l’on demandait à Carl Andre (né en 1935) ce que représentait pour lui la rétrospective organisée en 2016 par le musée d’Art moderne de Paris, qui couronnait plus d’un demi-siècle de création, la réponse était à l’image du personnage, modeste : “Rien, si ce n’est que j’ai toujours espéré que mes œuvres soient une source de plaisir pour celui qui les regarde, comme elles le sont pour moi lorsque je les crée”. Pionnier de l’art minimal, l’artiste est décédé le 24 janvier 2024 à l’âge de 88 ans. En 1988, il avait été accusé puis acquitté du meurtre de son épouse, l’artiste Ana Mendieta, décédée le 8 septembre 1985 d’une chute depuis le 34e étage de l’immeuble où résidait le couple à New York.

Une œuvre à la beauté épurée

L’artiste au Dia: Beacon à New York en 2015 © Bill Jacobson studio

Depuis le milieu des années 1960, Carl Andre avait développé une œuvre à la beauté épurée, qui n’a jamais cessé de se développer et de s’intensifier, tout en restant fidèle à des principes définis dès le temps des premières sculptures : il ne sera jamais question de figuration, mais simplement de forme, de matière et d’espace. Après ses études à la Phillips Academy d’Andover, près de Boston, Carl Andre a débuté par la peinture dans les années 1952-1953, à l’époque où l’expressionnisme abstrait (Jackson Pollock, Willem de Kooning…) régnait en maître aux États-Unis.

“Supprime le langage en toi.”

En 1954, lors d’un voyage en Europe, il avait découvert les œuvres de Constantin Brancusi (1876-1957) et s’était émerveillé devant la pureté minérale et l’ordonnancement parfait des mégalithes du site de Stonehenge. Arrivé à New York trois ans plus tard, Carl Andre avait partagé un temps l’atelier de Frank Stella. En 1958, alors en pleine réalisation de ses Black Paintings aux lignes labyrinthiques, ce dernier avait prodigué à son camarade le conseil suivant : “N’imite pas mon travail. Supprime le langage en toi, et travaille directement avec le matériau concret tel qu’il se présente dans la réalité”. Il n’en n’avait pas fallu plus à Carl Andre pour ranger ses pinceaux et décider de se consacrer à l’art en trois dimensions, tout en composant en parallèle une série de poèmes, à partir d’associations de mots qu’il choisit tant pour leur sens et leur pouvoir d’évocation que pour leur beauté visuelle et leur sonorité.

Il a procédé de la même manière en sculpture. Dès la fin des années 1950, les œuvres de Carl Andre résultaient en effet, elles aussi, d’assemblages d’éléments indépendants, qu’il sélectionnait pour leurs formes géométriques simples et leur matière brute ou industrielle (le bois, la pierre, la brique, le métal). En 1959, l’artiste avait produit sa toute première série, Pyramid, hommage non dissimulé à la Colonne sans fin de Constantin Brancusi. Pour des raisons financières, il avait ensuite travaillé durant cinq ans en tant que mécanicien et conducteur pour la Compagnie des chemins de fer de Pennsylvanie, dans le New Jersey.

Vers une sculpture horizontale

C’est au milieu des années 1960 que l’artiste avait pris son envol. Sa première exposition personnelle a eu lieu en 1965, à la galerie Tibor de Nagy, à New York, un an avant la manifestation fondatrice de ce que l’on appellera l’art minimal, ou le minimalisme. Organisée au Jewish Museum de New York, Primary Structures : Younger American and British Sculptors réunit pour la première fois Donald Judd, Dan Flavin et Carl Andre, qui est alors le seul à proposer une œuvre sculpturale plane, un alignement d’une centaine de briques posées sur le sol.

Certes, Carl Andre a été l’un des pionniers du minimalisme. Mais il détestait les étiquettes. “Les mots en “isme”, c’est de la connerie. La seule chose qui compte, c’est l’art”, affirmait-il, en expliquant que le minimalisme était d’abord, à ses yeux, un état d’esprit. Pour créer, il avait besoin de faire le vide, de se libérer de ce qu’il savait de l’art et de la sculpture, afin de proposer quelque chose de nouveau. Très vite, il a révolutionné  la sculpture en abandonnant la verticalité, celle de la grande statuaire et des bustes classiques, pour développer un travail qui se déploie principalement à l’horizontale, au gré d’installations au sol qui font corps avec l’espace. L’inspiration d’une sculpture naissait d’ailleurs, le plus souvent, de l’endroit où elle devait être installée.

3 œuvres phares 

      • Vues de poèmes (1958-2010, installation),
      • Lament for the children (1976, installation),
      • Margit endormie (1989, technique mixte, dimensions variables)

Carl Andre n’avait pas d’atelier, ou plutôt, il en avait des milliers. “Je ne réalise pas de dessins, pas d’esquisses préparatoires, pas de maquettes. J’ai simplement des matériaux, un espace, et la chance de pouvoir travailler”, résumait l’artiste. Chacune de ses créations résulte d’un assemblage de modules, qu’il qualifiait d’éléments ou de particules. Si l’œuvre finale est souvent monumentale, elle est toujours composée d’unités de taille modeste. Pour que l’artiste puisse les porter, les déplacer et les agencer à sa guise, sans avoir à mobiliser une armée d’assistants.

Un nouveau rapport à l’œuvre

Carl Andre s’est imposé comme un maître de l’épure qui juxtaposait, empilait, construisait, plus qu’il ne sculptait. “Les origines de mon travail se situent dans le savoir-faire de la classe ouvrière : pose de briques, carrelage et maçonnerie. Ce n’est pas l’aspect visuel des briques que j’aime dans ma sculpture, c’est le fait de pouvoir les placer, de créer en tant qu’individu une œuvre de taille relativement conséquente, en manipulant moi-même les briques”, confiait-il en 2015, à l’occasion de l’exposition Icônes américaines, organisée au Grand Palais, à Paris.

Carl Andre avec sa grande barbe des années 1970 © Keystone

Si le principe de l’installation est répandu dans l’art contemporain, il n’en était pas de même dans les années 1960. Au même titre que Donald Judd (ses Stacks constitués d’éléments alignés verticalement, accrochés au mur), Carl Andre a bouleversé l’idée que l’on se faisait du statut de l’œuvre d’art, en s’effaçant derrière elle, en ne transformant pas la matière. En la désacralisant aussi. Si l’œuvre est minimaliste, le geste de l’artiste l’est tout autant. La nature même de son travail in situ instaure un nouveau rapport avec le spectateur, qui découvre ses pièces en se déplaçant, en les traversant, en marchant dessus (Zinc-Lead Plain ou encore 144 Tin Squares, créée à New York en 1975 et faite de carrés d’étain).

Habiter l’espace

La question de l’espace est centrale. Celui de l’œuvre, mais aussi celui qu’elle occupe. D’où le titre de la rétrospective organisée en 2016 au musée d’Art moderne de la Ville de Paris, La sculpture comme lieu. L’artiste jouait avec les volumes, les proportions, la géométrie, la symétrie, les perspectives, les rythmes, selon un principe de série, de répétition, de variations (les Équivalents, un ensemble d’œuvres comprenant toutes le même nombre de briques, mais assemblées différemment). Épurées, silencieuses, ses pièces ne relèvent ni du décor, ni de l’architecture.

Il s’agissait pour Carl Andre de trouver l’équilibre parfait, pour que chaque œuvre habite l’espace, qu’elle y affirme sa présence sans le contredire, ni le saturer. C’est dans cet esprit qu’avait été conçue cette exposition (la première depuis celle du musée Cantini, à Marseille, en 1997), qui réunissait aux côtés de poèmes, de photographies et d’objets, une quarantaine de pièces emblématiques, de toutes époques. “La sélection a été en partie dictée par la disponibilité des pièces… Un collectionneur, par exemple, a refusé de nous prêter une petite œuvre en métal. Je lui avais demandé, et il m’a répondu qu’il ne pouvait pas, car son chat dormait dessus chaque nuit. J’ai trouvé cela magnifique ! “, avait déclaré l’artiste.

Guillaume MOREL


[I-AC.EU] Carl Andre est l’un des principaux représentants de l’art minimal américain. Après ses études d’art à la Phillips Academy à Anhover, il voyage en Europe. En 1957, il s’installe à New York où il travaille dans une maison d’éditions et partage un atelier avec Frank Stella. Influencé par Brancusi et la peinture de Stella, il commence à s’orienter vers la sculpture. En 1965, il réalise sa première exposition personnelle à la Galerie Tibor de Nagy à New York et, en 1970, une autre au Musée Guggenheim de New York. À partir des années 1970, ses œuvres sont exposées dans les musées du monde entier, entre autres, en 1987 au Stedelijk Van Abbemuseum à Eindhoven, en 1996 au Museum of Modern Art à Oxford et en 2005 à la Kunsthalle de Bâle. De 2014 à 2017, une exposition rétrospective Carl Andre: Sculpture as Place, 1958-2010 lui est dédiée et est présentée au Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía (Madrid), à la Nationalgalerie im Hamburger Bahnhof (Berlin), et au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris (Paris).

Né dans un milieu de bâtisseurs (son père était menuisier dans un chantier naval), il en garde une prédisposition et un goût pour l’élémentaire, le matériau, confirmés plus tard par ses amitiés artistiques : la proximité de Frank Stella lui apporte une sorte d’exemple moral et formel. Fidélité au matériau, rigueur de l’élaboration, refus de tout symbolisme, nécessité de l’acte créateur éliminant ce qui ne le sert pas strictement sont toujours prioritaires dans ses recherches. Dans un laps de temps très court, Carl Andre aborde les problèmes fondamentaux de la sculpture : rapport au sol, taille directe, signes distinctifs du savoir-faire classique. Considérant que le bois est finalement bien plus intéressant avant d’être découpé, il opte définitivement pour la non-intervention sur le matériau, quel qu’il soit, et l’utilise tel que peut le livrer l’industrie (briques, billots de bois, blocs de béton synthétiques standard, plaques de métal, etc.).

Un axiome essentiel est au fondement de toute l’œuvre de Carl Andre : forme = structure = lieu. Toute réalisation est un objet en relation avec son environnement. Il ne peut donc y avoir de signification, pas d’évocation, pas de savoir-faire de l’artiste. L’œuvre est le signe qui rend présente l’idée, mais la visualisation de l’idée doit être la plus élémentaire possible, afin que l’image (ce qui est vu) fasse le moins appel à l’imaginaire, évite au maximum de solliciter les affects. Ramené ainsi au minimum, c’est davantage le signe d’un volume que le volume lui-même qui prime. Ainsi, de minces plaques posées au sol permettent une appréhension différente de l’objet : on ne tourne plus autour, on marche dessus… L’œuvre échappe alors de manière salutaire à l’immortalité traditionnelle de l’œuvre d’art : comme tout objet, elle peut et doit s’user.

Le refus du façonnage et de ce que Carl Andre appelle ‘l’art d’association‘ le différencie singulièrement des autres artistes minimalistes. Il résulte d’un souci d’évidence et d’un goût pour le contact direct préférés à tout autre considération, formelle, symbolique ou psychologique.

L’art d’association fait que l’image est associée avec d’autres choses que ce que l’œuvre d’art est par elle-même. L’art d’isolation a sa propre localisation sur un minimum d’associations avec des choses autres que l’œuvre elle-même. L’idée est l’exact opposé de l’art d’association. J’essaie de réduire dans mon travail la fonction de production d’image au degré le plus faible…

Carl Andre


[INFOS QUALITÉ] statut : validé | mode d’édition : partage, décommercialisation et correction par wallonica | sources : Connaissance des arts ; IAC | commanditaire : wallonica.org | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © nytimes.com ; © Keystone.


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LEVAUX : Triste petit pion (s.d., Artothèque, Lg)

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LEVAUX Aurélie, Triste petit pion

(sérigraphie, 47 x 37 cm, s.d.)

Formée à l’ESA Saint-Luc de Liège, où elle enseigne aujourd’hui le dessin, Aurélie William LEVAUX (née en 1981) travaille à la croisée des genres, quelque part entre la bande dessinée, la littérature et l’art contemporain. Elle commence à faire de la bande dessinée au sein du collectif Mycose en 2003. La relation à l’intime que permet ce médium lui permet de se raconter dans des histoires au ton doux-amer, frôlant l’autobiographie (d’après OUT.BE).

Cette sérigraphie a été réalisée par l’imprimerie française Trace. Une femme à la langue démesurée lèche un petit personnage en costume-cravate qu’elle tient dans ses mains. La composition très symétrique et la grande figure féminine tenant dans ses mains un petit homme ramène à l’image classique de la vierge à l’enfant. Mais ici, l’ “enfant” en question est un politicien en costume cravate tenant une pipe à la main.

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Aurélie Levaux ; parismatch.com | remerciements à Bénédicte Dochain, Frédéric Paques et Pascale Bastin

OPRL : Les peintures d’Edgar Scauflaire

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[OPRL.BE] Réalisées entre 1952 et 1954, les 16 peintures murales du peintre liégeois Edgar SCAUFLAIRE (1893-1960) rehaussent la Salle Philharmonique de l’OPRL (Orchestre Philharmonique Royal de Liège) d’un ensemble iconographique exceptionnel inspiré de thèmes musicaux.

Depuis l’inauguration de la Salle Philharmonique (1887), les murs de scène n’offraient à la vue que de grandes surfaces planes sobrement délimitées par des cadres moulurés dorés. Au début des années 1950, M. Christophe, Directeur général au département des Beaux-Arts et de l’Instruction publique, eut l’excellente idée de commander à Edgar Scauflaire (1893-1960), peintre liégeois de renom, de grandes peintures murales destinées à orner les panneaux demeurés vierges de toute décoration. Scauflaire, qui avait déjà eu l’occasion de réaliser des compositions de grandes dimensions (dessins au pastel, vitraux, peinture sur verre, rideaux de théâtre, etc.) adopta ici la technique de la peinture à l’huile. Il fut aidé pour la réalisation par les peintres Jean Debattice, José Delhaye et Valère Saive. Compartimenté en 16 panneaux de dimensions variées, les trois murs de scène firent l’objet de deux campagnes de travaux. La première, achevée en 1952, comprenait la décoration des panneaux inférieurs des parois latérales. La seconde, qui intégrait les panneaux restants, ne fut clôturée qu’en 1954.

La Naissance de la Musique © Thierry Lechanteur

Présentant de nettes similitudes avec sa peinture de chevalet (symétrie, juxtaposition de surfaces colorées en guise de fond, influence modérée du cubisme), les peintures murales de Scauflaire constituent un très bel exemple d’intégration d’art moderne dans une œuvre d’art ancien. La menace de les recouvrir d’un badigeon uniforme, exprimée en son temps par des détracteurs, fut à l’origine d’un mouvement de protestation qui aboutit au classement du bâtiment, le 27 mai 1986.

De 1998 à 2000, ces peintures ont fait l’objet d’une campagne de nettoyage, dans le cadre de la restauration de la Salle Philharmonique. En 2023, Thierry Lechanteur a photographié 8 des 16 panneaux en haute définition. En septembre et octobre de la même année, à l’occasion du centenaire de sa toute première exposition, Scauflaire fut mis à l’honneur par Les Amis de l’Orchestre Philharmonique Royal de Liège, dans le cadre de deux expositions proposées, l’une à la Salle Philharmonique (dessins, fusains, pastels), l’autre à la Galerie des Beaux-Arts (peintures).

Si les panneaux supérieurs sont simplement décorés d’angelots, de plus vastes compositions occupent en revanche le fond de la scène et le centre des parois latérales. À gauche de l’orgue, La Naissance de la Musique évoque l’apparition des premières manifestations musicales : un couple esquisse quelques pas de danse au son d’une conque est jouée par une jeune fille juchée sur à un animal marin, créature imaginaire qui rappelle les temps préhistoriques. Scauflaire prend le parti de considérer, comme chez Platon, que la danse et la musique sont apparus conjointement et sont indissociables.

Le mythe d’Orphée © Thierry Lechanteur

Dans Le Mythe d’Orphée, situé du côté opposé, c’est le thème d’Orphée charmant les humains, les animaux, les plantes et les minéraux au son de sa lyre qui est illustré. Ce célèbre mythe remontant à l’Antiquité, très fréquemment mis à l’honneur au cours des siècles, en particulier lors de la Renaissance florentine (grâce au philosophe Marcile Ficin), met en avant le pouvoir psychologique de la musique sur les êtres vivants et le reste de la création.

Quittant la mythologie, Scauflaire imagine pour les parois latérales un hommage à deux compositeurs liégeois illustres : André-Ernest-Modeste Grétry (à droite, côté cour) et César Franck (à gauche, côté jardin). L’Hommage à André-Modeste Grétry (1741-1813) est entouré de deux panneaux, décorés à gauche d’un harpiste et à droite d’un homme, assis sur un tambour, jouant d’un instrument à perce conique, tous deux portant des vêtements du XVIIIe siècle. La scène principale, dont on connaît une peinture à l’huile qui a servi de projet, présente Grétry en apothéose. Il tient un livre et non une partition, allusion probable au fait que Grétry était non seulement compositeur mais également écrivain. Il est entouré d’une jeune fille nue, peut-être la muse inspiratrice, et d’un homme plus âgé tenant un sceptre et un aigle (Grétry fut apprécié sous l’Ancien Régime comme sous l’Empire).

Hommage à André-Modeste Grétry @ Thierry Lechanteur

En dessous de ces trois personnages, diverses scènes sont représentées liées à des compositions de Grétry. À droite, un homme à tête de chat s’incline devant une jeune fille ; tous deux semblent tirés de l’opéra-comique Zémire et Azor, œuvre inspirée de La Belle et la Bête de J.-M. Leprince de Beaumont. À côté d’eux, plusieurs villageois dansent, évoquant les Six nouvelles romances, musique instrumentale reflétant la gaieté villageoise. À gauche, le troubadour a peut-être un rapport avec l’opéra-comique Richard Cœur de Lion.

Hommage à César Franck @ Thierry Lechanteur

L’Hommage à César Franck (1822-1890) est également entouré de deux panneaux, décorés de musiciennes. La scène centrale est uniquement composée de personnages tirés de ses œuvres. Au milieu de cette scène figurent Les Béatitudes : le Christ amour, surplombant un globe terrestre, apaise d’un geste les douleurs de l’humanité. Les personnages à l’arrière-plan sont peut-être les bienheureux.

À gauche, deux personnages féminins semblent évoquer les oratorios Ruth (1846) et Rebecca (1881), tirés de l’Ancien Testament : tandis que Ruth porte les épis de blés qu’elle a glanés dans les champs de Boaz, son futur mari, Rebecca porte une cruche d’eau qu’elle offre au serviteur envoyé par Abraham, père de son futur mari Isaac.

À droite le cavalier et la biche font référence au poème symphonique Le Chasseur maudit, inspiré d’une ballade moyenâgeuse de Bürger. Le Comte du Rhin délaisse la messe pour lui préférer une partie de chasse. Tandis que sonnent les cloches et s’élèvent les chants religieux, il défie les âmes pieuses qui s’efforcent de le retenir et s’élance dans la forêt. Il se retrouve seul, son cheval refuse d’avancer. Une voix d’outre-tombe le maudit à jamais et de toutes parts les flammes l’investissent. C’est le moment où le cheval se cabre, que Scauflaire figure.

Source principale : QUIRIN D. & MARAITE L., Edgar Scauflaire (1893-1960), peintre-poète (catalogue de l’exposition Edgar Scauflaire organisée à Liège en 1994)

d’après OPRL.BE

Sur le site de l’OPRL, vous trouverez les 24 photos en haute définition (prises par Thierry Lechanteur) des œuvres de Scauflaire ornant la salle philharmonique. Curieux de voir ça ? Cliquez ici…


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Autoportrait en pied © artnet

[LABOVERIE.COM] Peintre, décorateur, illustrateur et critique d’art belge, Edgar Scauflaire est né à Liège le 9 mars 1893. En 1915, il s’inscrit à l’Académie des Beaux-Arts de Liège où il suit les cours d’Auguste Donnay, Adrien de Witte, François Maréchal, Émile Berchmans, et Ludovic Bauès. À ses débuts, jusqu’en 1925, il se consacre surtout au dessin : mine de plomb associée au pastel, à travers des portraits et des œuvres allégoriques, marquées par la simplicité du trait et la modernité de compositions sophistiquées. Après ses études de peinture à l’Académie, Scauflaire gagne sa vie comme journaliste et illustrateur.

En 1918, l’artiste adhère au groupe Les Hiboux avec Luc Lafnet, Auguste Mambour et Jef Lambert. La vie du groupe s’essouffle rapidement mais Edgar Scauflaire reprend le nom pour signer ses articles artistiques et de mode qu’il écrit pour le journal La Meuse : Jean Hibou.

À partir du milieu des années 1920, il se consacre de plus en plus à la peinture à l’huile mais aussi aux peintures murales monumentales pour des commandes particulières. Il réalise par ailleurs des grandes peintures sur verre, des vitraux, des cartons de tapisserie et des rideaux de théâtre. Sa première exposition importante se déroule au Cercle des Beaux-Arts de Liège en 1923. Il quitte La Meuse en octobre et finit l’année par une exposition personnelle à la Galerie Dekenne à Bruxelles. A partir de ce moment-là, Edgar Scauflaire réalise de nombreuses expositions en Belgique et à l’étranger.

En 1930, l’artiste entre à La Wallonie comme rédacteur. Il présente deux peintures dont une sur verre lors de l’inauguration de la Galerie Apollo. Il quitte La Wallonie en 1937. Aidé par des mécènes, il vit dorénavant de son art. L’année suivante, Scauflaire décore la salle de musique du Lycée Léonie de Waha en réalisant sa première œuvre monumentale sur verre.

Exposition internationale de l’Eau (affiche lithographiée, Liège, 1939 © Ville de Liège / Fonds patrimoniaux

Pendant la seconde guerre mondiale, Edgar Scauflaire crée L’Atelier Libre pour soustraire les artistes liégeois aux sollicitations de l’occupant en leur offrant du travail. Incarcéré un temps à la Citadelle de Huy, il reprend ses activités dès sa libération. Il reçoit de nombreuses commandes d’œuvres monumentales destinées aux espaces publics, comme la fresque pour Le Bon Marché, à Bruxelles. En 1958, il participe à l’Exposition universelle de Bruxelles, comme membre du jury et comme exposant.

Son œuvre est appréciée pour la simplicité raffinée de ses compositions, pour leur équilibre et pour la subtilité de sa palette chromatique. Edgar Scauflaire est considéré comme l’un des meilleurs représentants de la peinture moderne de Wallonie. Le musée des Beaux-Arts et les Fonds patrimoniaux de la Ville de Liège détiennent plusieurs œuvres de l’artiste. Le 22 octobre 1960, Scauflaire décède d’une crise cardiaque à l’âge de 67 ans.

d’après LABOVERIE.COM


[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : veille, compilation, correction, édition et iconographie | sources : oprl.be ; connaitrelawallonie.wallonie.be ; laboverie.com | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : © Thierry Lechanteur ; © artnet ; © Ville de Liège / Fonds patrimoniaux.


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MONFORT : Sans titre (s.d.)

Temps de lecture : 2 minutes >

MONFORT Martine, Sans titre

(linogravure, 40 x 40 cm, s.d.)

Martine MONFORT est née le 26 août 1951. Elle suit les cours de Georges Comhaire à l’Académie Royale des Beaux-Arts de Liège en section gravure. Elle participe ensuite à de nombreuses expositions personnelles en Belgique (Liège, Louvain…) et à des expositions de gravure internationales (Triennale de Gravure de Spa en 1986, International Biennal Print and Drawing Exhibit Taipei en 1995). Martine Monfort anime un atelier de gravure pour l’asbl Li Querneu à Huy. (d’après CENTREDELAGRAVURE.BE)

Illustration : Martine Monfort © vinalmont.be

Martine Monfort est une spécialiste de divers procédés de gravure, notamment l’aquatinte. Elle opté ici pour la linogravure, délaissant les nuances de gris pour un noir et blanc radical. Si le motif évoque un damier, une observation plus attentive nous montre une organisation chaotique : nulle ligne n’est perpendiculaire à l’autre. L’ordre attendu par le spectateur laisse place à un désordre subtil et quelque peu désarçonnant….

Pour en savoir plus…

Et pourquoi pas emprunter cette oeuvre gratuitement à l’Artothèque de la Province de Liège ? N’attendez plus, foncez au 3ème étage du B3, le centre de ressources et de créativité situé place des Arts à B-4000 Liège…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Martine Monfort ; vinalmont.be | remerciements à Bénédicte Dochain et Frédéric Paques

LO BIANCO : Bottine (2010, Artothèque, Lg)

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LO BIANCO Audrey, Bottine
(eau-forte, 22 x 22 cm, 2010)

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à l’Artothèque Chiroux de la Province de Liège ?

Audrey Lo Bianco

Audrey LO BIANCO est née en 1984. Licenciée en arts plastiques, visuels et de l’espace, recherches picturales et tridimensionnelles de l’Académie des Beaux-arts de Liège, Audrey Lo Bianco a reçu différents prix en Belgique et au Luxembourg, et a exposé à différentes éditions de la Biennale internationale de gravure (Liège), à la Bienal internationale de Villa Nova de Cerveira (Portugal), au Centre culturel des Chiroux et dans de nombreuses galeries belges et étrangères. (d’après OUT.BE)

A travers une série de gravures minimalistes, Audrey Lo Bianco aborde avec délicatesse le monde de l’enfance. L’eau-forte permet un trait fragile et tremblé, les ratures et le fonds grisâtre évoquent une vieille photographie. Silhouettes, jambes, chaussures… les détails s’accumulent, comme autant de fragments nostalgiques ou de trésors inestimables et dérisoires.

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Audrey Lo Bianco ; academieroyaledesbeauxartsliege.be | remerciements à Bénédicte Dochain et Frédéric Paques

PINELLI : Sans titre (silhouette féminine) (2014, Artothèque, Lg)

Temps de lecture : 2 minutes >

PINELLI Joe G., Sans titre (Silhouette féminine, 2014)
[dessin aux bâtons d’huile]

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Joe_G_Pinelli
Joe G. Pinelli © PLG

Joe G. (Giusto) PINELLI (né en 1960) est un illustrateur, dessinateur et scénariste de bande dessinée.  Il arrive à Liège à la fin des années 1970, pour y suivre le cours de bande dessinée de Jacques Charlier à l’Académie Royale des Beaux-Arts. Lorsqu’il commence à réaliser ses premières bandes dessinées, il décide de se raconter, de mettre en image son quotidien. De nombreux extraits de ces récits autobiographiques, sont publiés dans des fanzines, tant en Belgique qu’en France ou encore aux Pays-Bas. Son graphisme libéré et tendu en fait l’un des auteurs importants de la Bande dessinée indépendante.

Ce dessin aux bâtons d’huile fait partie de l’œuvre du peintre fictif Hans Von Furlow, créé par Joe G. Pinelli et évoqué notamment dans son album Féroces Tropiques (Dupuis, sur scénario de Thierry Bellefroid). A travers la biographie d’un autre peintre fictif, celle de Kurt Hix, Pinelli évoque en filigrane la première guerre mondiale et plus tard, dans une série de fanzines, la montée du nazisme…

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © PLG | remerciements à Bénédicte Dochain et Frédéric Paques

KENDRICK, Mathieu dit SOWAT (né en 1978)

Temps de lecture : 4 minutes >

[CONNAISSANCEDESARTS.COM, 14 juin 2019] Après des années passées dans les entrailles d’édifices abandonnés, Sowat anime ses toiles d’une nouvelle calligraphie de signes liquides.

Sowat a grandi sous le soleil marseillais et l’azur californien, l’œil gorgé de couleurs. Il couvre de graffitis les voies ferrées de la capitale méditerranéenne et s’émerveille à Los Angeles devant la calligraphie du chollo writing des gangs mexicains. Puis, en 2010, il rencontre Lek, figure majeure du graffiti parisien. Inséparable, le binôme explore les lieux abandonnés, chantiers et autres ruines urbaines pour les couvrir, en secret et la nuit, d’images éclatantes qui épousent la structure des bâtiments comme des peintures rupestres. Le duo fait entrer l’art de la rue dans des friches intérieures insoupçonnées, puis filme ses interventions. Ils séduisent Jean de Loisy, qui leur permet de “s’éclater” clandestinement – l’adrénaline est indispensable – dans les sous-sols du Palais de Tokyo. Ce qui les amène à y réaliser le film Tracés directs avec Jean Villéglé et d’autres artistes du Street Art, et à exposer à la galerie d’agnès b., en 2013.

Deux ans plus tard, ils se retrouvent à la Villa Médicis, dont ils “enturbannent” la loggia avec des bandes de plastique bleu. Mais en se frottant au monde de l’art, Sowat prend goût au travail solitaire de l’atelier. Ses grandes toiles éclaboussent l’œil avec le geste énergique du graffiti. Ses couleurs explosent,  brouillées, les encres sont pulvérisées en mille petites taches hypnotiques. Leur effet répétitif fait songer aux papiers peints, à Mark Tobey, à Pollock et surtout à… Georges Seurat ! Un pointillisme réalisé non à la pointe du pinceau mais à la pointe du bambou. Il est parvenu à unir deux mondes longtemps inconciliables, celui de la rue et celui du musée.

Elisabeth Vedrenne


© Sowat

[LEFEUVREROZE.COM] Sowat est un artiste franco-américain basé à Paris. Sa longue et complice collaboration avec Lek nourrit, depuis toujours, sa démarche personnelle : grands voyageurs, acteurs d’interventions in situ et aux œuvres spectaculaires car inscrites dans l’espace public, ils tirent des itinérances du duo Lek & Sowat une expérience du sensible qui vient enrichir leurs parcours individuels. Après une année à la Villa Médicis (2015-2016), ils reviennent à Paris en résidence à la Cité internationale des arts. C’est dans son atelier sur le site de Montmartre que Sowat a ainsi pu bénéficier de ce temps particulier qu’est celui de la résidence d’artiste, en retrait des regards que l’on croise ou qui vous scrutent dans l’espace public un temps de recherche, de suspens du quotidien, et d’expérimentation, où il approfondit ses essais de calligraphies sur toile et papier.

Dans son atelier, Sowat aborde ainsi plus intimement certains aspects de sa démarche, tout en explorant plus avant le calligraffiti, qui est au cœur de sa pratique picturale. Pour cela, il fait appel à des matériaux généralement considérés comme appartenant à des mondes antinomiques (celui du graffiti et celui des beaux-arts) : Sowat est un passeur et son œuvre comme une passerelle entre ces deux univers.

Ce temps d’atelier, un retrait du monde, aura permis à Sowat d’affiner son geste artistique. Ses œuvres témoignent d’un langage multiforme, qui tient tout d’abord de la citation : la technique du tag chère à Sowat vient servir les formes, volutes, torsions, taches et lignes d’écritures qui s’inspirent directement de diverses esthétiques calligraphiques très repérées dans l’espace urbain : le Cholo writing de Los Angeles (où habite la moitié de la famille de l’artiste), les inscriptions en latin dans la pierre et le marbre des édifices romains, les calligraphies arabes observées au Maroc ou aux Émirats Arabes Unis, le graphisme de l’alphabet hébreu redécouvert lors d’une intervention à Tel Aviv, ou encore les idéogrammes chinois regardés de près lors d’un séjour à Hong Kong. Sowat inscrit d’abord sa pratique d’écriture peinte dans des références globales, pour certaines : référence à la grande histoire millénaire ou la micro-histoire de villes-mondes (comme Los Angeles), tirées de ses nombreux voyages, qu’il va ensuite s’approprier.

​Les toiles de Sowat sont autant de déclinaisons d’un nouvel alphabet formant des phrases qui se transmuent. Son travail est ainsi d’abord une célébration du signe, se traduisant par une effervescence organisée, voulue par l’artiste transformé en alchimiste démiurge, qui se joue de sa propre maîtrise technique : en apposant sur la peinture, et sur son geste artistique, de l’eau et d’autres “fluides” qui vont réagir ensemble et faire évoluer les motifs sur la toile, il laisse ainsi la part des choses naturelles modifier et transformer le phrasé de ses toiles.

La puissance iridescente de ces œuvres nous laisse entrevoir, à distance, des pluies diluviennes, des forêts chamarrées profondes, d’essaims tremblotants, ou, quand on s’approche, des textes et des formes d’écritures, recouverts de parures de camouflages, qui nous permettent de retracer et revenir à l’origine de l’œuvre, au plus près du geste de l’artiste.

Bénédicte Alliot, DG de la Cité internationale des arts


[INFOS QUALITÉ] statut : validé | mode d’édition : partage, décommercialisation et correction par wallonica | sources : Connaissance des arts ; Le Feuvre & Roze | commanditaire : wallonica.org | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © artshebdomedias.com ; © Sowat.


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MULS : sans titre (s.d., Artothèque, Lg)

Temps de lecture : 2 minutes >

MULS Isa, sans titre
(aquatinte, 43 x 56 cm, s.d.)

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isamuls
© isamuls.blogspot.com

Née en 1976, initiée à l’Académie de Saint-Gilles (Bruxelles), Isa MULS poursuit actuellement ses recherches graphiques aux Ateliers Mommen et sa formation en gravure à la RHoK académie d’Etterbeek.

Pour cette œuvre, Isa Muls utilise la technique de l’aquatinte à l’ancienne – sa technique de prédilection. On saupoudre la plaque de cuivre avec de la colophane avant de la plonger dans l’acide. Ce sont ces grains qui donnent aux noirs une profondeur particulière. Un cliché de la police de Los Angeles datée de 1928  a été le déclencheur. Un homme armé en  poursuit  un autre dans une arrière-cour un peu glauque. L’aura… l’aura pas …?  (d’après l’auteur)

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Isa Muls ; isamuls.blogspot.com | remerciements à Bénédicte Dochain et Frédéric Paques

IMPEDUGLIA : Stupid Man (2009, Artothèque, Lg)

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IMPEDUGLIA Laurent, Stupid Man
(sérigraphie, 50 x 70 cm, 2009)

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Laurent Impeduglia © delphinecourtay.com

Peintre, dessinateur, touche-à-tout actif sur la scène internationale depuis le début des années 2000, Laurent IMPEDUGLIA (né en 1974) met volontiers en scène des personnages issus de l’univers de son enfance (publicité, jeux vidéo, comics…) qu’il combine avec des éléments naturels ou architecturaux, des formes abstraites et des symboles plus ou moins obscurs. Ses compositions accordent aussi une place importante à de courtes phrases qui apparaissent comme des sentences ou un titre, un peu à la manière de Jacques Charlier, son aîné en irrévérence (d’après SPACE-COLLECTION.ORG).

Dans cette vision naïve, inspirée à la fois par les bandes dessinées underground, l’art brut ou le pop art et Basquiat, Laurent Impeduglia dresse un portrait corrosif de notre société. Dans ce grand bazar capitaliste, où se mêlent consommation, religion et industrie, tout semble fêlé, la folie et la mort guettent. 

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Laurent Impeduglia ; delphinecourtay.com | remerciements à Bénédicte Dochain et Frédéric Paques

AILLAUD, Gilles (1928-2005)

Temps de lecture : 3 minutes >

Lions, girafes, phoques… Gilles AILLAUD, disparu en 2005, a beaucoup peint les animaux, souvent en captivité. Pourtant ses toiles, contemporaines des premières œuvres Pop et de leur fascination pour les produits de la consommation, n’ont rien d’exotique. Laissant croire qu’il représentait des animaux, c’est notre relation à la nature qui s’impose pourtant comme son seul et véritable sujet.

Interrogé sur son choix de ne peindre presque exclusivement que des animaux, Gilles Aillaud répondait : “parce que je les aime”. Contemporaines des premières œuvres Pop, de leur fascination, plus ou moins distante, pour les produits de la consommation, de la communication de masse, le sujet de Gilles Aillaud pouvait apparaître comme exotique. Les interrogations que notre époque adresse à notre relation au vivant rendent son iconographie moins incongrue et montrent l’importance de cette rétrospective. Attendue, cette exposition [au centre Pompidou] permet de (re)découvrir l’œuvre de Gilles Aillaud comme récemment ceux de Georgia O’Keeffe ou Germaine Richier. L’objectivité manifeste de son art fait de lui, le père putatif d’une nouvelle génération d’artistes que fascine un réalisme emprunté aux technologies modernes de l’image. C’est faute d’avoir pu être philosophe, que Gilles Aillaud est devenu peintre. De sa première formation, sa peinture a hérité une nature hybride, l’équivalent de ce que la tradition chinoise nommait : une Peinture lettrée.

Que ses représentations des parcs zoologiques soient contemporaines de Surveiller et punir (de Michel Foucault) et de La société du spectacle (de Guy Debord) en lesquels se résumaient les questions que sa génération adressait aux formes du pouvoir et à l’artificialisation du monde ne saurait être insignifiant. Plutôt toutefois que de peindre une philosophie, Gilles Aillaud s’est appliqué à “peindre philosophiquement”.

Laissant croire qu’il représentait des animaux, c’est notre relation à la nature qui s’impose comme son seul et véritable sujet. Loin des villes et de leur “jungle” de béton, il a retrouvé en Afrique une nature dont les animaux dupliquent couleurs et contours jusqu’à disparaître en elle. Avec les moyens de son art, Gilles Aillaud a voulu atteindre un tel “effacement”. Son “humilité” technique donne forme au songe d’une réconciliation, loin de tout projet de “maîtrise” et de “possession” du monde.

d’après CENTREPOMPIDOU.FR


Gilles Aillaud, “La Bataille du riz” (1968) © Guy Boyer

Impossible de cantonner Gilles Aillaud dans les seules représentations d’animaux en cage. Proche des peintres Eduardo Arroyo et Antonio Recalcati, il est l’un des représentants de la Figuration narrative qui a su s’engager en politique, réalisant des affiches et des slogans pour Mai 68. Dans l’exposition [au centre Pompidou] figure cette Bataille du riz, qui souligne son opposition à l’impérialisme américain. Elle a été présentée dans la salle rouge du 19e Salon de la jeune peinture en 1968, exposition censurée puis transférée au musée d’Art moderne de Paris et aux usines Berliet de Bourg-en-Bresse. Un peu plus loin est accrochée la superbe représentation des gueules noires de Fourquières-lès-Lens.

Comme le rappelle le commissaire de l’exposition Gilles Aillaud. Animal politique, l’artiste est contemporain de la publication du livre Surveiller et punir de Michel Foucault (1975) et de La Société du spectacle de Guy Debord (1967). Les toiles de Gilles Aillaud, montrant des animaux enfermés dans leur jungle de béton, sans visiteur ni soigneur, parlent de cette artificialisation du monde qui se développe dans la seconde moitié du XXe siècle.

“Lorsque je représente des animaux toujours enfermés ou déplacés, ce n’est pas directement la condition humaine que je peins, explique Gilles Aillaud. L’homme n’est pas dans la cage sous la forme du singe mais le singe a été mis dans la cage par l’homme. C’est l’ambiguïté de cette relation qui m’occupe et l’étrangeté des lieux où s’opère cette séquestration silencieuse et impunie”.

Avec l’éditeur Franck Bordas, Gilles Aillaud se lance en 1988 dans un vaste projet d’encyclopédie de tous les animaux en hommage au comte de Buffon, auteur d’une Histoire naturelle, générale et particulière en 1749-1789. Un animal par jour, tel est l’ambition de Gilles Aillaud qui les dessine au Jardin des plantes aussi bien qu’en Afrique. Du harfang à la genette, l’ensemble est publié en trois recueils sur trois ans avec un texte de Jean-Christophe Bailly pour chaque gravure.

Au Kenya, Gilles Aillaud découvre les ibis, les girafes et les éléphants dans leur cadre naturel.  “Les animaux et le paysage dans une unité que le trait du dessin puis, plus tard, le pinceau, vont devoir rejoindre”, écrit Jean-Christophe Bailly. Les animaux se fondent dans leur environnement en un mimétisme étonnant et forment un tout avec la nature. La touche devient plus légère. Gilles Aillaud se réconcilie avec notre monde.

d’après  CONNAISSANCEDESARTS.COM


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PEIRE : Sans titre (1987, Artothèque, Lg)

Temps de lecture : 2 minutes >

PEIRE Luc, Sans titre 
(sérigraphie, 62 x 52 cm, 1987)

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luc.peire
Luc Peire © SABAM

Luc PEIRE (1916-1994) est parti de l’expressionnisme pour évoluer vers une réduction et une stylisation personnelle de la figure humaine (dans les années 50), puis une représentation de l’être humain en tant qu’être spirituel symbolisé par le mouvement vertical et situé dans un espace équilibré. L’univers de Peire est pureté : pureté de la couleur, pureté de la forme, pureté du rythme. Le désir de Peire de collaborer avec d’autres artistes, architectes et urbanistes a conduit à de nombreux projets d’intégration en Belgique et en France. (d’après LUCPEIRE.COM)

Sérigraphie issue d’un recueil collectif intitulé Sept abstraits construits rassemblant des estampes de Marcel-Louis Baugniet, Jo Delahaut, Jean-Pierre Husquinet, Jean-Pierre Maury, Victor Noël, Luc Peire et Léon Wuidar (imprimeur et éditeur : Heads & Legs, Liège). Lors de sa parution, en novembre 1987, le recueil complet fut présenté à la Galerie Excentric à Liège dans le cadre d’une exposition intitulée Constructivistes Belges. (d’après CENTREDELAGRAVURE.BE)

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Luc Peire ; SABAM | remerciements à Bénédicte Dochain et Frédéric Paques

LES TONTONS RACLEURS : Le Montagnard (2017, Artothèque, Lg)

Temps de lecture : 2 minutes >

LES TONTONS RACLEURS, Le Montagnard
(sérigraphie, 60 x 40 cm, 2017)

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LES TONTONS RACLEURS est un duo créatif d’artistes sérigraphes. Maud Dallemagne (1982) et Nicolas Belayew (1982), diplômés en arts plastiques de l’Ecole de recherche graphique (Erg — Bruxelles), explorent les possibilités offertes par la sérigraphie en tant qu’outil d’expérimentation. Etablis à Charleroi (et Liège) en Wallonie, ils développent une pratique artistique multidisciplinaire en complicité avec d’autres créateurs et ouvrent cette démarche à la participation du public. Ils sont également actifs dans les domaines du graphisme, de l’illustration et de la peinture en lettre.

Dans cette image, qui s’inscrit dans une série de portraits (voir La Physicienne dans la collection de l’artothèque), le travail de surimpression d’images et de motifs produit un récit par association. On retrouve des textures évoquant la roche, la flore, la cartographie en opposition avec l’apparence de l’homme. Qu’il soit amateur de montagne, qu’il soit originaire des montagnes, qu’il soit montagnard dans un sens métaphorique ou encore d’autres choses, cela se construit mentalement chez le regardeur de l’image. Le rose n’est pas sans évoquer l’amateurisme ou la délicatesse en contraste avec l’image du montagnard. Entre distance et proximité se forme une narration poétique, dans laquelle même le portrait peut être vu comme une image parmi les autres.

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Les Tontons Racleurs | remerciements à Bénédicte Dochain et Frédéric Paque

NOEL : Sans titre (1987, Artothèque, Lg)

Temps de lecture : 2 minutes >

NOËL Victor, Sans titre 
(sérigraphie, 52 x 62 cm, 1987)

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noelvictorserigraphie

Après des études à l’Académie des Beaux-Arts de Mons, Victor NOËL (1957-2006) devient professeur de peinture décorative et de dessin publicitaire à l’Académie des Beaux-Arts de Tournai, jusqu’en 1976. Grand admirateur du Bauhaus, il s’engage dans l’abstraction géométrique vers 1954. Il fut membre des groupes Formes, D4, Géoforme, et Art concret en Hainaut. Il était aussi co-fondateur de la revue Mesures Art International en 1988. (d’après CENTREDELAGRAVURE.BE)

Sérigraphie issue d’un recueil collectif intitulé Sept abstraits construits rassemblant des estampes de Marcel-Louis Baugniet, Jo Delahaut, Jean-Pierre Husquinet, Jean-Pierre Maury, Victor Noël, Luc Peire et Léon Wuidar (imprimeur et éditeur : Heads & Legs, Liège). Lors de sa parution, en novembre 1987, le recueil complet fut présenté à la Galerie Excentric à Liège dans le cadre d’une exposition intitulée Constructivistes Belges. (d’après CENTREDELAGRAVURE.BE)

[INFOS QUALITE] statut : actualisé | mode d’édition : compilation (droits cédés) et mise à jour par wallonica.org  | source : Artothèque Chiroux | commanditaire : Province de Liège – Culture | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : © Victor Noël | remerciements à Bénédicte Dochain et Frédéric Paques

EYEN : Sans titre (Personnages) (s.d., Artothèque, Lg)

Temps de lecture : 2 minutes >

EYEN Luc, Sans titre (Personnages)
(pointe sèche, 20 x 36 cm, s.d.)

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Luc Eyen © creahm.be

Luc EYEN est né en 1973. C’est un artiste actif dans les ateliers du CREAHM de Liège, ainsi qu’au Cejiel. Camper hardiment dans le métal un animal ou un personnage n’a pas de secret pour lui, ses multiples portraits témoignent d’une belle “santé” plastique. Sa vie quotidienne alimentant intensément son expression artistique, il aime à représenter obligeamment tous ses amis. Le plus souvent, en marge de ces représentations anecdotiques, il prend soin de noter très méticuleusement tout un univers de prénoms, de dates de naissance, de multiples messages affectifs, comme autant de références à la “réalité” de l’instant qu’il voulut fixer. (d’après BEAUXARTSLIEGE.BE)

Cette pointe sèche très brute évoque l’art primitif. Les silhouettes hiératiques semblent nous observer de leurs yeux d’un blanc éclatant.

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SHINODA, Toko (1913-2021)

Temps de lecture : 5 minutes >

Née en 1913 en Mandchourie et dans une famille de sept enfants, Toko Shinoda grandit au Japon, où elle apprend dès ses 6 ans la calligraphie. Le travail de son oncle, qui grave des sceaux pour la famille impériale, va l’inspirer et lui révéler sa vocation très tôt. Dans une atmosphère érudite, j’ai grandi en sachant que je voulais faire ces choses, devenir une artiste”, confie-t-elle à l’agence de presse américaine United Press International, en 1980. Dès l’adolescence, Toko Shinoda ressent le besoin de s’extraire des carcans réducteurs de cet art millénaire très codifié pour expérimenter une nouvelle forme d’art. Malgré les remontrances de son père, elle cherche de nouveaux motifs en travaillant toujours avec l’encre et le papier traditionnel japonais en poussant la calligraphie jusqu’à ses limites.

Après avoir exposé à Tokyo en 1940, la calligraphe passe deux ans à New York, où elle rencontre les maîtres de l’expressionnisme abstrait étasunien, notamment Mark Rothko et Jackson Pollock, qui font prendre à son art un tournant décisif. S’inspirant de ce courant, elle crée des formes longilignes en camaïeux de noirs, qu’elle rehausse parfois d’un sépia ou d’un bleu. Utilisant la technique pluricentenaire de l’encre solide sumi, produite à partir de suie de façon artisanale et s’utilisant en frottant un bloc contre une pierre mouillée, Toko Shinoda développe une œuvre extrêmement réfléchie et planifiée. L’encre sumi a en effet la particularité d’être très rapidement absorbée par le papier, ce qui rend impossible tout travail postérieur une fois que le trait est tiré. Avec ses traits minutieux et asymétriques, elle cherche à capturer le fugace et l’évanescent inhérents au quotidien.

La vie de Toko Shinoda a été émaillée de reconnaissance, ce qui n’était pas couru d’avance pour une femme dans le Japon du XXe siècle. Elle a très tôt été distinguée comme l’une des plus grandes calligraphes de son époque à son installation à Tokyo lorsqu’elle était jeune adulte, dans les années 1930. Un grand honneur, habituellement réservé aux hommes, dans une société où les rôles de genre sont très marqués et segmentés. Son œuvre est exposé au Museum of Modern Art (MoMA) dès 1954, lors d’une exposition consacrée à la calligraphie japonaise. Par la suite, il entre dans les collections du Metropolitan Museum (Met) à New York, du MoMA, de la famille impériale japonaise et du British Museum de Londres, entre autres. Toko Shinoda réalise également des gravures et des peintures murales, notamment pour le temple bouddhiste Zojo-Ji de Tokyo. Aujourd’hui, ce sont ses œuvres qu’elle laisse derrière elle : Je ne me suis jamais mariée et je n’ai pas d’enfants », a-t-elle déclaré au Japan Times en 2017, et je suppose que cela semble étrange de penser que mes peintures sont à leur place – bien sûr, ce n’est pas du tout la même chose. Mais je le dis, lorsque des peintures que j’ai faites il y a des années reviennent dans ma conscience, on dirait qu’un vieil ami, ou même une partie de moi, est revenu me voir“.

d’après CONNAISSANCEDESARTS


De la calligraphie aux lithographies

Formée à la calligraphie depuis l’âge de 6 ans, Tôkô SHINODA a grandi au sein d’une famille d’artistes qui comptait parmi ses membres un ancien calligraphe de l’Empereur Meiji. Elle s’éloignera progressivement de la calligraphie traditionnelle et de ses conventions pour chercher son mode d’expression propre. Elle continue cependant d’utiliser de l’encre, le sumi d’origine chinoise, pour tracer au pinceau d’élégantes lignes qu’elle imprimera ensuite par lithographie… Lithographies auxquelles elle appose souvent une touche finale de couleur, le plus souvent à l’encre rouge. Son œuvre est le plus souvent, et assez unanimement, caractérisée comme la fusion réussie de la calligraphie traditionnelle et de l’expressionnisme abstrait. Une qualification judicieuse mais trop peu explicitée. Tâchons ici d’en préciser un peu les contours.

L’esprit libre et l’aventure de l’expressionnisme

Son itinéraire artistique la mène de la calligraphie à l’expressionnisme ; de Tôkyô au New York effervescent des années 1950, où elle croisera le chemin de certains des membres de l’école de New York : Mark RothkoRobert Motherwell… Elle trouve dans leurs questionnements communs une inspiration qui ne la quittera plus.

D’un côté, elle rejoint le rejet marqué de la figuration qui caractérise ce courant, qui marche alors sur les traces de Kandinsky ou de Gorky. De l’autre, elle est séduite par la primauté donnée aux émotions et à la libre exploration des moyens permettant de les exprimer. Lui est donnée l’occasion de participer à cette grande aventure, cette quête existentielle de la peinture qui se cherche en-dehors de la figuration et de la représentation. La matière, la forme et la couleur sont en train de prendre le devant d’une scène bouillonnante où les débats et les désaccords sont fréquents. Clement Greenberg, critique engagé dans le mouvement depuis ses prémices, tentera d’analyser cette époque dans un célèbre essai de 1982 intitulé Modernist painting dans lequel il explique que l’art se développe en faisant sa propre critique, en éliminant tout ce qui ne relève pas directement de l’art (comme l’imitation de la Nature qui caractérisait la peinture occidentale prémoderne).

C’est dans ce contexte que Shinoda s’inscrit : si j’ai une idée bien définie pourquoi la peindrais-je ?” déclare-t-elle dans une interview en 1980. Je vivais en quelque sorte dans une excitation quotidienne indescriptible. Les artistes étaient libres de faire tout ce qu’ils voulaient”. Elle se passionne alors pour une forme particulière qu’elle ne cessera de mettre et remettre sur l’ouvrage : le trait. En même temps, elle renoue définitivement avec l’encre de Chine qu’elle choisit parce qu’elle offre la plus grande variété de couleurs et de variations”. Le souci de la matière et de ses possibilités est plus fort que jamais.

Cette quête l’aura menée loin de la calligraphie traditionnelle et de ses règles d’airain dont elle ne voulait plus depuis longtemps, au grand dam de son père. Pourtant Shinoda ne s’est jamais vraiment coupé de toute influence japonaise, bien au contraire. Sa proximité avec les traditions de pensée japonaise fera même hésiter les critiques sur l’épithète à lui attribuer : le Time en 1983 lui consacre un article intitulé Une conservatrice renégate, une libérale traditionaliste.

Une sagesse iconoclaste

Commençons par le bouddhisme. Son influence sur la peinture et la calligraphie sino-japonaise est indiscutable. Il n’est donc pas incongru de l’y retrouver sous le pinceau, ni sous la plume, de Tôkô Shinoda qui a également beaucoup écrit. Il est impossible de décrire mon évolution artistique avec des mots […] En fait je pense que mes œuvres n’expriment rien. Mais même si elles n’expriment rien on aime parfois à les regarder”. Le rien dont Shinoda parle n’est pas le néant occidental mais la “vacuité” bouddhiste.

Un autre thème qui imprègne son œuvre et sa vie est celui de l’impermanence, présent à la fois dans le bouddhisme et dans la sensibilité traditionnelle. Ma vie est en quelque sorte un rêve. Peindre une ligne est comme un rêve” déclare-t-elle à 102 ans, filant une métaphore courante qui traverse l’histoire du Japon et qui rappelle celle du “monde flottant” des estampes. Comme pour le haïku (elle en écrit d’ailleurs), elle conçoit ses œuvres comme des tentatives de refléter son émotion (kokoro) à l’instant où elle peint. Une phrase qu’elle aime citer et qui a donné son titre à un livre, la vie est (d’)un seul trait, peut également s’interpréter à cette aune.

Bien que nourrie de tradition japonaise, la personnalité de Tôkô Shinoda détonnait souvent avec le reste de la société de son temps. Plutôt solitaire (elle ne s’est jamais mariée) et pas conformiste pour deux sous, sa liberté d’esprit et de réflexion l’ont parfois amenée à des positions iconoclastes.

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