VIENNE : Les Crehay, peintres spadois (ULiège, 1991) – 00

Temps de lecture : 6 minutes >

Ce mémoire de fin d’études a été présenté par Philippe Vienne (membre de l’équipe wallonica), en vue de l’obtention du grade de licencié en histoire de l’art et archéologie de l’Université de Liège, année académique 1990-1991.

N.B. Les appels de notes (n) renvoient à la fin de l’article ; la table des matières permet d’ouvrir les différents chapitres au fil de leur dématérialisation.


INTRODUCTION

Philippe Vienne © Lisette Bonboire

Pourquoi les Crehay ? C’est une question qui m’a souvent été posée tout au long de mes recherches. Par intérêt pour la peinture spadoise ? Sans doute. Mais Spa a été le berceau d’artistes dont le renom, et même de talent, a été plus grand. En fait, c’est la séduction exercée par un tableau de Gérard-Antoine Crehay qui m’a poussé à chercher à en savoir davantage. Ce pouvoir évocateur, qui sait réveiller la nostalgie du Spadois en exil, n’est certes pas le moindre charme de l’oeuvre des Crehay.

Spa est coutumière des dynasties de peintres, tradition héritée de l’artisanat du Bois de spa qui a développé le travail en famille. Dans cette optique, la famille Crehay représente un bel exemple d’artistes se succédant, durant quatre générations, depuis 1830 environ jusqu’à nos jours ;  c’est dire que leur période d’activité recouvre toute l’histoire de la Belgique. Il était intéressant de voir quelle pouvait être l’évolution artistique d’une même famille sur cent cinquante ans et quel ascendant exerçait le ‘patriarche’ (Gérard-Jonas) sur sa descendance.

Les Crehay, peintres spadois, sont aussi et surtout des peintres de Spa, même s’il leur arrive de puiser ailleurs leurs sujets. Au travers de leur oeuvre, c’est une partie de l’histoire de Spa qui revit. Témoignages d’une époque révolue, les aspects historiques (documentaire ou anecdotique) et sociologiques ne peuvent être ignorés.

Comme la plupart des peintres spadois, les Crehay n’ont encore fait l’objet d’aucune étude approfondie. Trois rétrospectives leur ont été consacrées : la première, en 1961, avait exclusivement pour objet Gérard-Jonas (1) ; la deuxième, en 1966, Gérard-Antoine (2). Enfin, la dernière en date, en 1988, était consacrée à Gérard-Jonas et Gérard-Antoine (3). Seule cette dernière a fait l’objet d’un catalogue (4) qui est, avec la notice de Charles Hault dans Wallonia (5) et un article du Docteur Henrard dans Histoire et Archéologie Spadoises (6), un des documents les plus complets sur le sujet. L’article le plus long, celui du Docteur Henrard, compte cinq pages : c’est dire si l’on est pauvre en informations. A cela viennent s’ajouter quelques nécrologies, se recopiant d’ailleurs l’une l’autre.

Tout ceci ne concerne que Gérard-Jonas et Gérard-Antoine, c’est-à-dire deux des treize Crehay recensés comme ayant peint. Pour les autres, rien n’a été fait : pas un article, pas une rétrospective. Il faut toutefois signaler que plusieurs œuvres d’artistes de la famille Crehay ont été présentées durant l’été 1990, dans le cadre de l’exposition Spa dans l’Ecole Liégeoise du Paysage (7). Mais, une fois encore, pas de catalogue.

Le but premier était donc d’effectuer une synthèse de qui avait déjà été écrit sur les Crehay, de l’augmenter si possible en cherchant ailleurs et en élargissant le champ l’ensemble de la famille.

Le deuxième but poursuivi était de rassembler un nombre significatif d’œuvres afin d’en tirer autant de renseignements que possible (chronologie, typologie des signatures, analyse stylistique, période d’activité, etc.).

Enfin, une fois la synthèse effectuée, le but ultime est d’apporter une pierre à un édifice restant à construire qui serait une histoire de la peinture spadoise au XIXe siècle.

Une première démarche a consisté à relever, dans tout ce qui avait été écrit sur les Crehay, les noms de ceux d’entre eux qui avalent peint. Ce travail a été grandement facilité par le remarquable mémoire de Lydwlne de Moerloose (8) qui a recensé les principaux artistes décorateurs de Bois de Spa. Elle cite ainsi dix des treize Crehay dont il sera question.

Il fallait ensuite établir une généalogie permettant de visualiser les filiations et les périodes d’activité de chacun. Dans ce but, je me suis efforcé de retrouver des descendants de la famille Crehay desquels la collaboration a été très fructueuse. Cependant, il restait encore des lacunes et certaines dates demandaient à être vérifiées. C’est donc tout naturellement vers le Service de la Population de la Ville de Spa que je me suis tourné et j’y ai rencontré une amabilité et une diligence trop rares ailleurs pour ne pas être soulignées ici.

Ainsi, toutes les dates de naissance et de décès des Crehay ont pu être vérifiées et, le cas échéant, corrigées ou complétées. Fort de ces dates, j’espérais pouvoir trouver, dans la presse locale, des nécrologies concernant chacun des artistes. Si Gérard-Jonas et Gérard-Antoine jouissaient d’une réputation suffisante pour que l’on en parle même dans la presse nationale (9), c’est loin d’être le cas pour les autres. Même si, en compulsant les collections de la Bibliothèque communale de Spa et de la Bibliothèque royale, je suis arrivé à retrouver des journaux de toutes les années concernées (exception faite de 1842 pour Gérardine), le butin fut maigre.

Seuls Jules (10) et Ernest (11) ont fait l’objet d’une brève mention qui ne fournit pas davantage de renseignements que l’état-civil .

Je me suis alors adressé aux Spadois eux-mêmes, cherchant à retrouver des personnes ayant connu l’un ou l’autre Crehay et susceptibles de me fournir quelques renseignements. La moisson reste cependant bien pauvre, se bornant souvent à quelques lignes, mais au moins est-ce déjà un progrès que d’avoir sorti de l’ombre le nom même de ces artistes.

En ce qui concerne les œuvres, je me suis d’abord adressé au Musée de la Ville d’Eaux, puis au Musée de l’Art wallon et au Cabinet des Estampes. J’ai également vérifié auprès du Musée d’Art Moderne de Bruxelles, du Musée de la Vie Wallonne et des musées de Verviers qu’ils ne possédaient pas d’œuvres (tableaux ou boîtes) signées Crehay. J’ai aussi consulté l’IRPA qui m’a, en outre, fourni les photos de tableaux figurant dans une collection particulière ; ceux-ci posent d’ailleurs un problème sur lequel je reviendrai plus tard.

Enfin, j’ai cherché à entrer en contact avec des collectionneurs et c’est de ce côté que j’ai glané la plus grande masse de documents. J’ai, en effet, rencontré chez eux une coopération et un enthousiasme dont je n’ai eu qu’à me féliciter et qui m’a permis de rassembler davantage d’œuvres que je ne l’avais espéré.

J’ai également dépouillé un grand nombre de catalogues d’expositions (environ cent cinquante) et, plus particulièrement, tous les catalogues encore disponibles des salons des Beaux-Arts de Spa, de 1860 à 1937.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je voudrais remercier, pour leur aide et leurs conseils, le Professeur Pierre Colman, Monsieur Jean-Patrick Duchesne, le Docteur André Henrard, Madame Ramaekers et Madame Schils au Musée de la Ville d’Eaux ainsi que les membres de l’asbl Histoire et Archéologie Spadoises, Mademoiselle Sabatini et Monsieur Mélard au Musée de l’Art wallon, Madame Léonard-Etienne au Cabinet des Estampes, Monsieur Jean Toussaint et le personnel de la Bibliothèque communale de Spa, le Service de la Population de la Ville de Spa, l’asbl Brocantique, tous les collectionneurs anonymes, ainsi que mon épouse et ma famille.

Notes de l’Introduction

    1. Rétrospective G.J. Crehay, organisée par le Cercle Artistique de Spa en 1961.
    2. Rétrospective G.A. Crehay, organisée par le cercle Artistique de Spa au Jardin du Casino de Spa, du 9 au 25 avril 1955.
    3. La peinture spadoise. Crehay, organisée par l’asbl Brocantique à l’office du Tourisme de Spa, un seul jour, le 4 décembre 1988.
    4. La peinture spadoise. Crehay, Spa, 1988. Avec reproductions des œuvres exposées.
    5. HAULT, Ch., Notice historique sur les dessinateurs et peintres spadois en introduction au salon historique d’avril 1914, in Wallonia, t. 22, Liège, 1914, pp.189-209.
    6. HENRARD, A., Les peintres Gérard-Jonas et Gérard-Antoine Crehay, in Histoire et Archéologie Spadoises, no 3, septembre 1975, pp. 13-18.
    7. Spa dans l’Ecole Liégeoise du Paysage, organisée par Jacques Goijen au Pouhon Pierre-le-Grand à Spa, du 14 juillet au 15 août 1990.
      Jacques Goijen a réalisé, à Spa, durant l’été 1991, une autre exposition sur le même sujet. Les œuvres qui y ont été présentées ne sont cependant pas reprises ici, en raison des délais qui me sont impartis.
    8. MOERLOOSE, L. de, Les bois de Spa, mémoire de licence en Archéologie et Histoire de l’Art, UCL, Louvain-la-Neuve, 1986-1987.
    9. les ‘grands’ dictionnaires (BENEZIT, THIEME-BECKER, SIRET…) mentionnent également le nom de Crehay, mais de manière fort laconique.
    10. L’Union Spadoise, 3 juin 1934, p. 2.
    11. La Vie Spadoise, 29 janvier 1961, p. 4.

Philippe Vienne

© Eric Meurant

Table des matières du mémoire

    • Introduction
    • Contexte historique et artistique
      • Histoire
      • Le Bois de Spa
      • Peinture
    • Les Crehay
      • Onomastique, héraldique et généalogie
      • Gérardine (1808-1842)
      • Gérard-Jonas (1816-1897)
      • Gérard-Antoine (1844-1937)
      • Georges (1849-1933)
      • Jules (1858-1934)
      • Charles (1874-1969)
      • Ernest (1876-1961)
      • Léon (1881-1945)
      • Alfred (1884-1976)
      • Raymond (1898-1972)
      • Norbert (1913-1980)
      • Gérard (1923-1987)
      • Maurice (1921)
      • Œuvres d’attribution incertaine
      • Visages de Spa à travers l’oeuvre des Crehay
    • Conclusion
    • Catalogue
    • Bibliographie
    • Table des illustrations
    • Table des matières
Le PDF-OCR complet est ici…

[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : partage, édition et iconographie | source : ULiège | auteur : Philippe VIENNE | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : © Ecole liégeoise du paysage.


Plus d’arts visuels en Wallonie-Bruxelles…