Marie-Jeanne DESIR a participé à l’atelier “Gravure” du Centre culturel de Marchin. Pour elle, graver, c’est élaborer un projet, penser son sens et son graphisme, revenir sans cesse sur l’ouvrage, travailler, imprimer, travailler… Ce qui lui plaît, in fine, c’est le corps, les mains qui fabriquent et expriment “au plus juste” des émotions. Marie-Jeanne Désir est également écrivaine et a publié plusieurs livres (d’après CENTRECULTURELMARCHIN.BE)
Marie-Jeanne Désir utilise des reproductions de vieux documents des chemins de fer français. Son intervention colorée vient apporter un regard décalé, un commentaire amusé qui tranche avec l’austérité un peu désuète du document original. Ici, à côté d’une coupe altimétrique d’un chemin de fer, l’artiste ajoute des masses colorées rappelant les reliefs sur les cartes géographiques.
[d’après OBJECTIFPLUMES.BE] Sarah CHEVEAU est née le 18 septembre 1986 à Blois, France. Elle a étudié à l’École de Recherche Graphique de Bruxelles.
J’aime jouer. Jouer avec tout. Les couleurs, les formes, les mots, les sons, mes mains, mes pieds et les chansons.
Enseignante d’art en secondaire pendant 6 ans, Sarah Cheveau est membre actif du collectif d’illustrateurs Cuistaxqui autoédite un fanzine pour enfants à Bruxelles. Elle écrit ses albums au cœur de ses ateliers et ses activités quotidiennes, par l’interaction directe avec les enfants. Ses thèmes sont le jeu, l’interactivité, la motricité et l’absurde. Elle utilise la technique du papier découpé, du feutre, de la peinture ; ses images sont simples, parfois abstraites ou expressives avec des couleurs très vives. Elle est lauréate d’une bourse de la Fédération Wallonie-Bruxelles (Bourse découverte, 2019).
1, 2, 3, on joue ?!
-..À quoi ?
– Mais à la marelle !
La marelle ! …craie dans une main, caillou dans l’autre, on a ripé quelques paires de chaussures en récréation! La version de Sarah Cheveau est une marelle à doigts ou, comment faire du jeu le plus vieux du monde un exercice d’illustration fort bien réussi. Voilà la marelle sortie de la cour, repensée, déconstruite, développée et surtout… colorée !
Des couleurs franches, des couleurs primaires qui attirent le regard et nous plongent dans le jeu. On y retrouve le style de Sarah Cheveau affiné dans divers projets précédents : une marelle peinte dans la cour du centre culturel Jacques Franck de Saint-Gilles, le magazine bilingue bruxellois Cuistax… Il y a un style reconnaissable dans tout cela. Hors les cours, la marelle de Sarah Cheveau, c’est une marelle de voyage, une aire de jeu portative. Nul besoin de caillou et d’ailleurs cette fois s’il atterrissait sur la case ciel, je ne passerais pas mon tour car Sarah Cheveau change les règles du jeu !
Le livre, dans la jolie collection Pim Pam Poum de Thierry Magnier, est destiné selon l’éditeur à développer entre autres la motricité fine chez les tout-petits. On revendique ici l’inspiration de Maria Montessori, une mention probablement intéressante pour les parents. La petite lectrice, le petit lecteur seront ravis de lire-jouer (joie des tout-petits) avec les doigts, de suivre les lignes, de sauter et de virevolter en suivant un parcours ludique bien mis en valeur grâce aux couleurs vives et au choix de faire ressortir les chemins des marelles par du vernis. Finalement, la marelle se transforme, c’est foufou, on s’envole, on danse, on chante. La marelle à doigts nous emporte. Les rires sont garantis (livre testé !).
Hélène Théroux
Sarah Cheveau se raconte…
[d’après CARGOCOLLECTIVE.COM] “Née en France dans le Loir-et-Cher je grandis joyeusement au milieu de 3 sœurs et de la campagne. A 18 ans, je m’envole pour Bruxelles où j’étudie l’illustration, la gravure et la vidéo à l’ERG (Ecole de Recherche Graphique), j’obtiens ensuite un master en Art puis l’Agrégation de l’Enseignement Secondaire Supérieur. Pendant 4 ans, je suis professeur d’art en plus de mon travail d’illustratrice. Aujourd’hui artiste et autrice à temps complet je suis aussi membre du collectif d’illustrateurs Cuistax avec lequel nous éditons un magazine pour enfant du même nom.
Pratique artistique
J’écris des albums jeunesses en interaction directe avec les enfants. Mes activités artistiques et pédagogiques forment ensemble mon rythme de création. Je propose des rencontres entre les matières, les idées, les lieux et les personnes lors de mes ateliers. Puis le moment de vie, le partage tisse lui-même des liens, créer des images, construit des ponts surprenants, des histoires ! C’est là mon domaine de recherche, de passion et d’amusement : lorsque quelque chose se passe, lorsque l’on vit (ensemble) et se racontent des histoires.
Collective
Depuis 6 ans, je suis membre active du collectif d’illustrateurs Cuistax avec lequel nous éditons un fanzine pour enfant ainsi que de petites éditions de posters et cartes en risographie. Nous réalisons aussi des commandes externes de graphisme et d’illustration, animons des ateliers créatifs et montons des expositions à Bruxelles et en Europe : France, Portugal, Luxembourg et Liège.
Pédagogique…
Une grande partie de mon temps est consacrée aux ateliers artistiques que j’effectue dans différentes structures bruxelloises, des bibliothèques et des écoles ; J’ai aussi enseigné pendant 5 ans en tant que professeur d’art en secondaire.
…et vivante
J’aime raconter, lire et chanter des histoires aux enfants. Je le fais à chacun de mes ateliers ainsi que l’été au sein du projet Lire dans les parcs à Bruxelles, organisé par le centre de la littérature jeunesse et les bibliothèques francophones de la ville…”
Nuit de chance (2023)
[LIVREHEBDO.FR] Futaie au fusain. S’enfoncer le soir tombé dans une forêt comporte sa part d’ombre… Un petit enfant vaillant tente l’aventure, frôlant en silence sous-bois et grands arbres. Parmi les apparitions furtives se faufilent un écureuil, un lièvre, et même toute une famille de cerfs. L’ultime hôte surgit, massif, hirsute, préhistorique, un brin plus menaçant, mais finalement la bête et l’enfant scelleront ensemble un pacte heureux. Les illustrations au fusain de Sarah Cheveau sont d’une profondeur saisissante, elles ont la texture, le tremblé et la couleur de la forêt la nuit. À la fin, l’artiste nous dit comment fabriquer du fusain et présente un riche nuancier d’essences de bois, du bouleau au mélèze doré en passant par l’hibiscus. Merveille des merveilles !
[RADIOFRANCE.FR/FRANCEINTER, 2 février 2023] Les Pink Floyd ont dévoilé leur nouveau visuel à l’occasion des 50 ans de leur album The Dark Side Of the Moon. Mais la présence de l’arc-en-ciel n’a pas plu à certains soit disant fans.
Tout commence lorsque Pink Floyd, reconnu assez unanimement comme un des plus grands groupes de rock de tous les temps, décide de célébrer les 50 ans de ce qui est considéré comme leur chef d’œuvre : l’album The Dark Side Of the Moon sorti le 23 mars 1973.
Superbe coffret, livre de photos inédites et autres déclinaisons ‘collectors’ sont prévues pour l’occasion, mais aussi un nouveau logo qui accompagne la communication de la bande à Gilmour. On y voit le célèbre triangle de la pochette originelle dans lequel s’inscrit le chiffre 50 avec un zéro remplit des couleurs de l’arc-en-ciel… Vous la sentez venir la polémique ?
Une escouade de prétendus fans, trolls anti-gays sont venus s’insurger sur les réseaux. Petit florilège : “Retirez cet arc-en-ciel vous avez l’air stupide“, “Qu’est-ce qui vous prend avec l’arc-en-ciel ?“, “Quelle honte” ou encore “Est-ce que vous êtes devenus woke ?.”
Eh oui, il fallait s’y attendre, l’arc-en-ciel drapeau de la communauté LGBT fait voir du wokisme partout. On se souvient de l’affaire du M&M’s violet accusé lui aussi de ‘wokisme’ par Fox News…
Dans cette histoire, on aurait donc des prétendus ‘fans’ de Pink Floyd outrés de voir leur groupe céder aux “sirènes progressistes LGBTQIA+” au point d’afficher leur drapeau. Evidemment n’importe quel vrai fan de Pink Floyd ou personne capable de se rendre sur leur page wikipedia sait que sur la pochette de 1973 il y a déjà un arc-en-ciel… Un grand triangle, un prisme pour être exacte, à travers lequel passe un trait de lumière qui se transforme en arc-en-ciel…
S’en sont suivis des tonnes de détournements d’autres fans, plus informés, et pas franchement du même bord. Notamment, mon préféré : un dessin d’Isaac Newton, scientifique et philosophe, devant le prisme qui lui a permis de montrer au 17ème siècle comment la lumière blanche se décompose en spectre de couleurs arc-en-ciel… L’image est associée à cette légende “Sir Isaac Newton prédisant que les Pink Floyd allaient devenir woke” ! Ça nous donne un bon instantané de l’époque mais qu’est-ce que ça raconte ?
On voit comment se livre une bataille anachronique autour de l’arc-en-ciel. Omniprésent dans les codes visuels des années 70, tout se passe comme si ceux qui avaient baigné dedans durant leur jeunesse se réveillaient dans un monde du ‘complot arc-en-ciel’. Attaquant l’idéologie ‘progressiste’ ou ‘woke’ ils pratiquent à leur tour la fameuse ‘cancel culture’ : “à partir de maintenant je n’écouterai plus ce groupe” pouvait-on lire dans les commentaires du logo. À ce stade ce n’est plus un instantané de l’époque, c’est un comble !
[FUTURIMMEDIAT.NET, 11 janvier 2023] Puisque tout le monde en parle, il doit certainement se passer quelque chose. Pas une journée ne s’écoule sans que sorte un nouvel article, dithyrambique ou alarmiste, dans le domaine très en vogue de l’Intelligence Artificielle. Depuis le Guardian jusqu’à Trust My Science, on nous apprend comment l’IA, en ce moment même, est en train de nous propulser dans une nouvelle ère – ou de nous condamner à l’apocalypse numérique. Sommes-nous à l’aube d’une réelle transition technologique, qui nous apporterait enfin des logiciels d’image pourvus d’imagination, des véhicules autonomes fiables, et des assistants rédacteurs capables de résumer plusieurs textes et d’en faire la synthèse ? Ou bien sommes-nous désormais proches de la “singularité”, plus menacés que jamais par un futur dystopique, du genre Matrix ou Terminator, où les machines auront atteint leur autonomie et prendront le contrôle de l’humanité ?
Ni l’un ni l’autre : les progrès récents, bien que réels et importants pour l’Intelligence Artificielle elle-même, n’auront probablement qu’un impact négligeable sur l’industrie et sur notre quotidien. Le seul vrai problème avec Chat GPT, l’outil de génération de texte que les commentateurs montrent du doigt, c’est la profusion des articles alarmistes – et très mal documentés – qui nous mettent en garde contre cette prétendue menace.
Quant aux synthétiseurs d’images par diffusion (Dall-e, Stable Diffusion, Midjourney, etc.) ils n’ont pas pour objectif de révolutionner les métiers graphiques, et n’en ont pas les moyens, quoiqu’en disent les millions de geeks désœuvrés qui passent leurs nuits à générer des images sans queue ni tête. Tempête dans un verre d’eau, à moitié vide ou à moitié plein, selon l’humeur de l’auteur. Beaucoup de bruit pour des clopinettes. Jouer avec les IA est certes merveilleux : c’est fascinant de les voir écrire, dialoguer, dessiner, cracher des photographies stupéfiantes et élaborer des créations graphiques à couper le souffle. Mais, malheureusement, ces jouets extraordinaires ne pourront pas nous servir à grand’chose de plus qu’à jouer.
Quand l’artifice nous trompe énormément
Au premier contact, les nouvelles intelligences artificielles sont brillantes. On a vu fleurir un peu partout sur le web des images inédites et spectaculaires dans tous les styles graphiques et photographiques, des paysages somptueux, des portraits séduisants, des pastiches délirants, et même des œuvres nouvelles de grands peintres.
Quant à ChatGPT, il est capable de disserter brillamment, à peu près dans toutes les langues, sur n’importe quel sujet pas trop récent. Et cela même en français, à propos de la littérature française :
Mais si on gratte sous le vernis de sa tchatche, le bot raconte n’importe quoi : les trois citations sont montées de toutes pièces, un Frankenstein vraisemblable – et totalement factice – prétendument extrait d’un livre qui, vérification faite, n’a jamais existé !
C’est d’autant plus pernicieux que, dans un domaine où on manque de compétence, l’assurance trompeuse de ChatGPT est extrêmement convaincante. Et comme il ne se trompe pas systématiquement, on a vite fait de croire que c’est juste une maladie de jeunesse, qui va s’arranger avec les corrections successives. Malheureusement, comme on le verra plus loin, c’est une espérance qu’il faut abandonner, et qui a d’ores et déjà conduit les geeks du monde entier à accorder à l’intelligence artificielle un crédit qu’elle ne mérite absolument pas.
En ce qui concerne la synthèse d’images, pour peu que l’on essaie de se servir des outils existants avec un minimum de sérieux, on finit par passer des nuits blanches à éliminer des tombereaux d’images grotesques, incohérentes ou simplement moches, dans l’espoir d’en trouver une seule qui tienne la route. Florilège :
Tristes coulisses : derrière les superbes images partagées par les geeks du monde entier se cachent une multitude de ces résultats inutiles, et des heures de fastidieux labeur digital.
Limites techniques, limites de conception
Si les systèmes d’IA dont on parle tant aujourd’hui échouent à dépasser certaines limites, c’est d’abord par manque de puissance et ensuite en raison de limites inhérentes à leur conception. Pour ce qui est du déficit de puissance, il suffit de se rappeler qu’un réseau de neurones artificiels est essentiellement un programme d’ordinateur, et qu’il est donc contraint par les limites d’un pc courant.
Un système d’IA typique est limité à quelques couches d’une centaine de neurones chacune, parce que tous les neurones d’une couche donnée doivent dialoguer avec chacun des neurones de la couche suivante et de la couche précédente, et donc chaque neurone supplémentaire augmente les besoins en ressources. Par comparaison, un cerveau humain comprend une bonne centaine de milliards de neurones. Et on pourrait mettre en avant de nombreuses autres différences.
Mais plus encore que les problèmes de puissance, c’est leur conception même qui rend les réseaux artificiels actuels cruellement inefficaces. Ces réseaux sont entraînés sur des corpus (d’images légendées, de phrases en contexte) et leur objectif est de produire, pour toute demande quelconque (légende dépourvue de l’image associée, question attendant une réponse) un complément vraisemblable (image, texte).
On obtient ce complément par tentatives successives, en produisant plusieurs assemblages de divers fragments pertinents du corpus original. L’assemblage finalement retenu sera celui qui, dans l’ensemble, semble statistiquement le plus proche des données du corpus. Comme le réseau de neurones ne dispose pas d’un modèle (pas de représentation mentale des mots utilisés dans les phrases, pas de notion des objets objets présents dans les les images) et que la ressemblance formelle avec le corpus constitue le seul critère de filtre, on a une vraisemblance purement superficielle, dépourvue de sens : les images produites avec Stable Diffusion sont souvent absurdes, les textes générés par ChatGPT peuvent révéler de profondes incohérences.
Le mirage fatal de l’autocorrection
On peut légitimement se poser la question : pourquoi les nouvelles IA génératives, comme ChatGPT ou Stable Diffusion, ne peuvent-elles pas corriger d’elles-mêmes leurs propres erreurs ? Ainsi, par exemple, le YouTuber Anastasi in tech, se demande pourquoi le système ne donne pas de lui-même un degré de confiance à ses résultats ?
La réponse est simple : du fait de leur manière de traiter l’information, les IA considèrent chacune de leurs productions comme la meilleure production possible : leur indice de confiance est de 100 % à chaque fois. En effet, de manière à obtenir le produit le plus vraisemblable, les AI optimisent déjà en permanence la cohérence de chaque fragment au sein de leur réponse. C’est même là le secret technique essentiel de leur fonctionnement.
Dans les générateurs d’images, on peut même contrôler de manière précise, et en divers endroits, le degré de hasard qu’on souhaite faire intervenir dans la génération : on peut régler le taux de conformité par rapport au texte (”guidance”), le degré de ressemblance du résultat avec une éventuelle image initiale, et sélectionner la matrice de bruit initiale (”seed”). Les chatbots basés sur GPT et les générateurs d’images à base de diffusion sont structurellement incapables d’évaluer la pertinence de leurs réponses et ne peuvent donc pas être améliorés dans ce domaine.
Quand qui peut le plus ne peut pas le moins
Les IA produisent de telles merveilles (images somptueuses, surprenantes et réalistes, réponses limpides et amplement documentées) que pour nous, humains, leurs erreurs évidentes, voire grossières (mains à six doigts, raisonnements incohérents…) paraissent par contraste extrêmement simples à éviter. Malheureusement, cette “évidence” est une projection anthropomorphique. Qui donc aurait un style écrit aussi brillant et serait en même temps incapable de disserter ? Qui donc serait en mesure de dessiner de si belle images et oublierait une jambe, voire un œil, de son personnage ? Réponse : les machines !
Quand on voit l’IA générer un enfant à trois jambes ou une main à dix doigts, on pense tout de suite, “qui peut le plus peut le moins, une machine tellement douée pourra forcément arriver à corriger ces bêtises”. Anthropomorphisme, fatale erreur : les machines ne pensent pas comme des êtres humains.
Rivés à leurs écrans, les geeks du monde entier s’imaginent que les limites intrinsèques des IA seront aisément dépassées, tant les inepties qu’elles contribuent à générer sont criantes : à force d’essais et d’erreurs, par itérations et corrections successives, on parviendra forcément à entraîner des systèmes fiables, capables de détecter par avance ces échecs évidents, et de les éliminer.
Mais non. Pour aider les machines à dépasser leurs limites, il ne suffira pas de leur apporter des améliorations à la marge : il faudra soit augmenter leur puissance, soit améliorer leur conception.
Dans le domaine de la puissance, les progrès sont dans le meilleur des cas contraints par la loi de Moore, selon laquelle le progrès technique permet de diviser la taille des transistors par deux tous les deux ans. Cette contrainte ne satisfait pas les exigences d’un réseau neuronal un peu costaud (rappelez-vous, chaque nouveau neurone fait croître de manière exponentielle le nombre d’interconnexions nécessaires à son fonctionnement). Or, tous les progrès récemment engrangés par les modèles GPT de génération de texte sont basés sur l’augmentation de puissance.
Il faudrait donc se tourner du côté de la conception. Mais les découvertes sont directement liées à la recherche et leur fréquence d’apparition n’est pas prévisible. Aujourd’hui, tous les systèmes populaires de génération d’images procèdent de la combinaison des modèles GPT avec une solution de conception relativement ancienne, la diffusion, inventée en 2015, et qui est à l’origine de tous les progrès qu’on a pu voir en 2022. On ne sait absolument pas quand on aura à nouveau la joie d’assister à une découverte autorisant un progrès d’une telle ampleur.
Tout bien considéré, la geekosphère peut redescendre de son perchoir, rien ne garantit que la prochaine révolution nous attende au coin de la rue.
Proprioception, affects, et conscience, insurmontables limites de l’IA ?
Notre intelligence humaine est multimodale : lorsque nous prononçons un mot, celui-ci ravive une série d’expériences préalablement mémorisées qui sont intellectuelles, pratiques (réponse à la question “que puis-je faire ?”), perceptives (visuelles, auditives, tactiles, olfactives, gustatives), proprioceptives (liées à nos sensations corporelle internes) et, par-dessus tout, émotionnelles. Ainsi le mot “chat” c’est conceptuellement un “animal domestique non-chien”, lié à un tas de perceptions dont des déplacements souples, une couleur et une fourrure, les miaulements, les ronronnements, l’odeur du chat, celle des croquettes qu’on lui donne, la fourrure qu’on touche, l’animal qu’on caresse et grattouille, qu’on nourrit et à qui on doit ouvrir la porte, etc. Sans parler des liens affectifs et des rapports psychologiques qu’on peut entretenir avec un chat, domaines dans lesquels on fera sans doute bien de ne pas se cantonner aux instructions d’un chat-bot.
Cette réalité multidimensionnelle et imbriquée de la mémoire, thématique des romans de Marcel Proust, constitue la limite théorique de l’approche binaire de l’intelligence. Son importance pour la compréhension des énoncés et des images avait été démontrée au plan théorique par quelques sémanticiens mal connus du grand public, comme l’américain Georges Lakoff (Metaphors we Live By) et le belge Henri Van Lier (L’Animal Signé). Cette vision théorique est à présent étayée par des expériences récentes d’imagerie cérébrale, qui ont effectivement rendu visibles, lors de la prononciation d’un mot, l’activation à travers tout le cerveau humain, de réseaux multi-fonctionnels spécifiquement associés à ce mot (conversement, l’imagerie en question permet aussi de plus ou moins bien deviner à quoi pense la personne observée !). En somme, l’expérience humaine liée à la corporéité et aux affects constitue un versant de l’intelligence qui restera probablement à jamais hors de portée des machines électroniques.
Quant à la conscience, manifestement, on nous vend de la peau de Yéti : d’année en année, les spécialistes reportent encore et encore à plus tard leurs prédictions quant l’apparition d’une IA consciente et autonome, ou “General Purpose AI” (intelligence artificielle généraliste), qui prendrait sa destinée en mains. Demain, la Singularité rase gratis.
Dernière annonce en date, la fameuse “interview” de LaMDA, le système d’IA de Google, soi-disant devenu capable de ressentir et conscient de lui-même. Suite à cette fumeuse publication, Google a pris ses distances avec l’auteur et a publié un démenti. Le misérable article inspire même à présent un discours appelant à une évaluation plus raisonnable des systèmes actuels. Another hoax bites the dust.
Si on considère que proprioception, affects et conscience font partie intégrante de l’intelligence, alors il n’y a aucune raison légitime d’utiliser ensemble les mots “intelligence” et “artificielle”.
Fondé à Lyon en 2006 par Pierre Delmas Bouly (1982) et Patrick Lallemand (1982), Superscript² est un atelier de création graphique investissant différents supports d’expression du design graphique tel que l’édition (livre ‘objet’, monographie, catalogue, magazine, poster…), la typographie ou les médias numériques (site web, installations numériques, etc.). L’ensemble et la diversité de ces collaborations ont permis au studio de produire une grande diversité d’objets graphiques passant du plan, à la tri-dimension ou au textile, considérant le design graphique comme une démarche de réflexion et d’application globale.
Cette image fait partie du premier portfolio édité par Ding Dong Paper (collectif d’éditeurs liégeois constitué de François Godin et Damien Aresta). Cette image abstraite s’appuie sur une répétition/variation de motifs géométriques. Elle évoque la construction d’une spirale parfaite via le nombre d’or.
Né à Charleroi en 1957, Thierry TILLIER participe dès 1979 aux activités du groupe Llys Dana, reliant par revues ou mail-art l’Allemagne, la Belgique et la France. Correspondant dès 1985 pour Canal Magazine (Paris) et Intervention (Québec), il cofonde en 1986 le Réseau 666 à Paris.
Pratiquant le collage de textes et d’objets au format de feuilles de papier parfois reportés sur toiles, Thierry Tillier passe de la notion de revue à celle de tableau en usant des mêmes techniques et matériaux. On perçoit ici les origines hétéroclites des images découpées utilisées (jeux d’argent et de hasard, scène biblique, bras d’étoile de mer). La recherche de concordance de coloris ou de matières donne à voir une composition nouvelle, alliant interprétation des signes et construction de l’image.
Anne-Sophie ARNOULD est diplômée de l’Académie des Beaux-Arts de Liège en 2012. Elle se lance ensuite dans l’autoédition de livres d’artistes où elle réalise elle-même les dessins, le graphisme, l’impression, la reliure et l’édition. Elle anime régulièrement des stages en gravure et illustration. (d’après LESAAC.NET)
Le Triangle de Sierpinski est une grande composition triangulaire abstraite en rouge sur des reproductions de pages d’un cahier présentant des circuits électriques et des formules mathématiques. Cette forme fractale se base sur le travail du mathématicien Wladislaw Sierpinski, qui décompose un triangle en un nombre potentiellement infini de triangles plus petits. L’œuvre est à la base un pliage sous forme de livre. Il se présente à l’Artothèque déplié en accordéon, sous cadre.
Né en 1976, Karl NAWROT, originaire de Villeurbanne, a fait l’école de dessin Emile Cohl à Lyon avant d’envoyer un dossier rempli de typographies dessinées à la main à la Werkplaats Typografie (Amsterdam). Il y a été accepté en 2006. Il est maintenant graphiste et typographe à Amsterdam. Il crée ses caractères typographiques de manière très intuitive, avec ses propres systèmes et outils.
Cette image fait partie du premier portfolio édité par Ding Dong Paper (collectif d’éditeurs liégeois constitué de François Godin et Damien Aresta). Karl Nawrot “parle une langue que tout le monde peut comprendre. Si le savoir est une arme, son dessin est un médium universel. Ses mains en guise de logiciel, il nous réapprend à lire et à apprécier la forme dans toute sa brutalité. Esthétique nocturne pour enfants intelligents.” (d’après INDEXGRAFIK.FR)
“Ce qu’il y a de particulier dans le fait d’être graphiste, c’est que personne ne sait exactement ce que cela signifie… pas même les graphistes. Le graphisme pourrait être – très simplement – un rapport aux choses. Poser un regard conscient de la force des symboles, des textes, des couleurs, conscient de la composition et, a fortiori, des images, sur tout être ou toute chose. Un prisme qui nous accompagne, dans toutes les composantes de nos vies et qui permet de traverser les apparences.
Le graphisme pourrait être une force critique…
Comprendre comment d’autres communiquent vers nous et donc cerner ce qu’ils veulent nous communiquer, entre les lignes. Chaque image et chaque forme sont choisies et déterminantes. Chacune d’elles adresse un message, témoigne d’une prise de position. Se nourrir d’images et de formes, en cherchant à en déceler le sens, donc prendre conscience de leur pouvoir incalculable. Tenter de déconstruire ces codes pour pouvoir, à son tour, communiquer (ou aider à communiquer) en conscience.
Le graphisme pourrait être politique…
Travailler avec des images et des formes signifie prendre position. “Quels visuels ai-je envie de créer, dans quel cadre, pour qui et pour dire quoi ?” Parfois, refuser de travailler sur certains projets pour ne pas aider à communiquer des choses auxquelles l’on ne croit pas. Surtout, choisir de mettre son énergie au profit d’initiatives qui nous paraissent justes. Bien sûr, admettre que ce en quoi l’on croit évolue avec nous et avec nos expériences.
Le graphisme pourrait être un service…
Chacun a sa propre perception du monde et ses propres valeurs, mais tout le monde n’a pas la possibilité de les faire exister visuellement. Tenter, avec sensibilité et humilité, de capter la vision et les intentions de quelqu’un et pouvoir les mettre en forme.
Le graphisme pourrait être lié à l’hypersensibilité…
Là où on pourrait ne voir qu’une simple forme : percevoir la force ou la patience. Un trait : la volonté. Une courbe : l’harmonie. Tenter de rendre nos existences plus poétiques, par moments, et avoir la possibilité de transmettre cette poésie à notre tour.
Le graphisme pourrait être un début de liberté…
Rendre possible, pour certains, le fait de se créer une profession qui leur correspond, de mieux en mieux, au fil de leur évolution. L’occasion de se frayer un chemin à son image, au cours duquel tout est teinté de graphisme : de la communication graphique, de l’écriture graphique, de la céramique graphique, de la mode graphique, du textile graphique, des manifestations graphiques ou même des balades dans les bois graphiques. S’offrir le privilège d’une vie qui, autant que possible, nous appartienne et dont la forme évolue avec nous.
La seule chose dont je sois convaincue est que : quelle que soit la forme que prendra le monde, le graphisme y aura toujours une place. Il y aura toujours quelqu’un qui aura quelque chose à exprimer et qui aura besoin de ce regard critique, conscient, politique et poétique pour le mettre en forme. L’autre seule chose dont je suis convaincue est que, si l’on décide que toutes ces choses sont du graphisme, je suis bel et bien graphiste. Et heureuse de l’être.
Rachel THONART
“Rachel THONART NARDELLOTTO, alias RTN-STUDIO, est une designer graphique vivant et exerçant à Liège. À ses yeux, les fondamentaux du graphisme peuvent habiter et affiner toute chose. Visiblement fascinée par ce que le graphisme doit à la texture, elle semble toujours à la recherche d’une proximité avec la matière dans son travail visuel. Proximité qu’elle fait s’incarner dans des formes aussi diverses que la découpe, la broderie, le tissage, la mise en profondeur, l’installation typographique ou encore une appropriation des principes du pointillisme. Ceci traduit sa visée générale : relief dedans et relief dehors.”
Flore Mercier, Master en Arts visuels et médiatiques
Le FIG. ou, plus simplement, le Festival International de Graphisme de Liègepropose un programme composé de conférences, d’expositions, de work-shops et de tables rondes, s’adressant à un large public qui peut y découvrir les multiples facettes du design graphique contemporain.
“La naissance du Fig. En septembre 2016, une bande de copains a une envie commune : faire un truc lié au graphisme en février 2017. “On ne savait pas encore trop quoi, mais il fallait que l’on fasse quelque chose” explique Jérémy Joncheray, un des organisateurs du Festival. C’est comme ça qu’est créé le Festival International de Graphisme. Des conférences, des expos, un workshop, des projections et concerts sur quatre jours à Liège. Depuis, des partenariats se sont formés avec notamment Les Brasseurs et les Chiroux. Le nombre de conférences et d’expositions a augmenté au fil des années pour en arriver à six conférences et sept expositions lors de cette édition. Une évolution piano piano pour garder l’esprit convivial du Festival. “Même si les choses évoluent, nous voulons continuer de faire partie du festival, être sur le terrain avec les personnes, plutôt que derrière nos écrans.“
La valorisation du design graphique. Même si affichant une programmation internationale, le Fig. entend toutefois valoriser le métier du design graphique en Belgique, et surtout en Wallonie. “Nous nous sommes rendu compte du manque de culture graphique en Wallonie surtout (en comparaison à la Flandre et ailleurs). Nous avons une histoire du graphisme relativement peu connue en Wallonie, très peu communiquée. En fait, il manque un vrai patrimoine, voilà ce serait le mot adéquat.” Valoriser le graphisme, mais aussi proposer une visée pédagogique. “Dans le sens où jusqu’où le graphisme peut-il aller ? Nous nous adressons autant aux professionnels qu’au grand public, mais celui-ci public reste encore composé à 80% de praticiens. Toutefois nous sommes heureux cette année d’avoir vu beaucoup plus de scolaires venir voir les expos. Nous avons envie aussi de développer les workshops parce que nous avons eu des demandes de dingue pour celui de Wallonie Design Spécimen typographique.”
Une vision engagée ? “La visée est quand même engagée dans le sens où on invite des praticiens qui portent des messages politiques, sociaux…”