HODLER, Ferdinand (1853-1918)

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“Plus je m’approche de la grande Unité, plus je veux que mon art devienne simple et grand.”

[MOREEUW.COM] L’artiste peintre suisse Ferdinand HODLER naît le 14 mars 1853 à Berne. Il est considéré de son vivant comme l’un des chefs de file de la modernité. Ferdinand Hodler décède le 19 mai 1918 à Genève.

La mère de Ferdinand Hodler meurt en 1867, le laissant orphelin à 14 ans. De 1868 à 1870, il effectue son apprentissage à Thoune chez le peintre Ferdinand Sommer. En 1871, Ferdinand Hodler se rend à Genève pour y copier les tableaux d’Alexandre Calame et de François Diday.

Ferdinand Hodler vit à Genève jusqu’à sa mort en 1918, mais il accomplit, après des débuts difficiles, une carrière européenne, jalonnée de scandales et de succès. Membre des grandes Sécessions, il voit son œuvre saluée à Vienne, Berlin et Munich à partir des années 1900.

Mais, c’est Paris qui lui offre sa première consécration en 1891 lorsqu’il y présente son tableau manifeste, La Nuit (1889-1890), interdit d’exposition pour inconvenance par la ville de Genève. Salué par Puvis de Chavannes, Rodin et la critique française, ce tableau lance la carrière internationale de Hodler et en fait un des représentants majeurs du symbolisme.

Au tournant du siècle, Zurich, Genève, Iéna ou Francfort lui passent d’importantes commandes publiques qui sont autant d’occasions pour l’artiste d’expérimenter son goût pour une peinture simplifiée, monumentale et décorative. Il met en scène des épisodes fondateurs de l’histoire de la Confédération suisse (La bataille de Morat, 1917) et des figures emblématiques comme les faucheurs et bûcherons.

Ferdinand Hodler s’impose ainsi dès la fin des années 1890 comme le peintre national suisse par excellence. Dans sa peinture de paysage, il s’attache à magnifier la nature, et en particulier les montagnes, renouvelant profondément le genre. La fidélité à la topographie des lieux s’accompagne d’une stylisation rigoureuse, imposant Hodler comme un paysagiste hors pair, à l’égal de Cézanne.

Convaincu que la beauté repose sur l’ordre, la symétrie et le rythme, Ferdinand Hodler fonde ses compositions sur ce qu’il appelle le “parallélisme” (“répétition de formes semblables“).

Ferdinand Hodler est également un portraitiste profondément novateur : en témoignent des effigies de collectionneurs (Portrait de Gertrud Müller, 1911), de poètes et de critiques qui l’ont soutenu, mais aussi des autoportraits sans concession (Autoportrait aux roses, 1914), qui préfigurent le cycle de Valentine, sans équivalent dans l’histoire de l’art. De sa compagne à l’agonie, Hodler tire entre 1914 et 1915 une série de portraits qui sont autant de témoignages bouleversants de l’avancée de la maladie et de la mort (Valentine sur son lit de mort, 1915). Après ce cycle, Hodler poursuit sa méditation sur la mort à travers une série de vues presque abstraite du lac de Genève où culmine la quête de simplicité et d’unité que le peintre n’a cessé de radicaliser.

Expositions Ferdinand Hodler (sélection)

      • 2013 : Ferdinand Hodler – Fondation Beyeler, Bâle,
      • 2007 : Ferdinand Hodler – Musée d’Orsay, Paris. L’exposition du musée d’Orsay a pour ambition de redéfinir les sources et la géographie de l’art moderne et de contribuer à rendre à Ferdinand Hodler la place centrale qui fut la sienne au sein des avant-gardes européennes du tournant du XXe siècle. Lié au symbolisme, Hodler a en effet ouvert des voies décisives vers l’abstraction mais aussi l’expressionnisme. L’exposition rassemble 80 tableaux majeurs jalonnant la carrière de l’artiste, à partir du milieu des années 1870 jusqu’aux paysages ultimes de 1918 : tous les genres abordés par le peintre, grandes compositions de figures symbolistes, tableaux d’histoire, paysages et portraits sont représentés. Deux cabinets d’arts graphiques, autour des compositions symbolistes (Le Jour III, 1909-10 et la Vérité II, 1903) et des peintures d’histoire, permettent de comprendre les processus de création de Hodler, dessinateur inlassable. Une quarantaine de photographies, prises par des proches et en particulier par Gertrud Dubi-Müller, amie, collectionneuse et modèle de Hodler, nous font entrer dans l’atelier du peintre.
      • 2005 : Ferdinand Hodler et Genève – Musée Rath, Genève. Le Musée d’art et d’histoire de Genève possède une des collections publiques consacrées à Ferdinand Hodler parmi les plus significatives pour la compréhension de sa trajectoire, tant par le nombre d’œuvres que par la richesse thématique représentée. L’ensemble comprend 142 peintures, 657 dessins, ainsi que 241 carnets de dessins. La collection illustre non seulement tous les thèmes abordés par l’artiste – que ce soient les portraits, les autoportraits, les scènes de genre, la peinture d’histoire, le symbolisme ou encore le paysage -, mais également l’ensemble des étapes qui se succèdent dans sa pratique artistique. Le parcours chronologique débute, en effet, par une des toutes premières “vues suisses”, réalisée alors qu’il est apprenti chez Ferdinand Sommer à Thoune, et s’achève avec un dernier paysage, laissé inachevé sur le chevalet face à cette rade de Genève qu’il a peinte jusqu’à son dernier souffle. La collection que conserve le Musée d’art et d’histoire est trop vaste pour y être exposée intégralement. Mise en résonance avec un nouvel accrochage dans les salles de Charles-Galland, l’exposition Ferdinand Hodler et Genève, collection du Musée d’art et d’histoire, présentée au Musée Rath, réunit un ensemble de plus de 80 toiles de ce fonds et sera, à la suite de Ferdinand Hodler. Le paysage, l’occasion d’une redécouverte des aspects essentiels de la recherche menée depuis Genève par Ferdinand Hodler tout au long de sa vie.

“Femme joyeuse”, ca. 1911 © hiltiartfoundation.li

Ferdinand Hodler, de la Nuit à la lumière

[EXPOREVUE.COM] Considéré de son vivant comme un peintre important de la modernité, son parcours est parsemé de succès et de scandales. Il prit effectivement part à de nombreuses expositions sécessionnistes, invité notamment à Vienne par Koloman Moser ou à La Libre Esthétique de Bruxelles.

S’attachant d’abord aux thèmes des paysages et de la figure dans un style réaliste, il se dirige ensuite vers le symbolisme en élaborant sa propre théorie esthétique dès 1897, s’inspirant entre autres des travaux de Puvis de Chavannes. Celle-ci est conçue sur l’observation des parallélismes, répétitions et effets de symétrie comme étant des lois immuables de la nature, à partir desquelles il construit ses compositions.

Mais Hodler précise toutefois : “Le dessin et la couleur sont mes seuls moyens d’expression. La signification intime de mes œuvres est représentée directement par la ligne, la composition et la couleur, il n’y a rien à deviner, il n’y a qu’à voir. Je ne suis ni allégoriste, ni danseur de cordes, ni symboliste car mes œuvres ne représentent rien de surnaturel, d’invisible, qu’il faille expliquer ; ce n’est que la vérité telle que je la vois. Je suis un synthétiste.” (Loosli, 1921-1924, repris in Ferdinand Hodler (1853-1918))

Après des débuts modestes et souvent difficiles, le succès viendra du scandale que suscite la présentation à Genève de La Nuit (1889-1890), l’une des toiles majeures présentées à Orsay. Cette œuvre monumentale représente l’artiste assailli par une inquiétante figure drapée de noir, alors que six autres personnages sont allongées autour de lui, dont sa femme et sa maîtresse. Cette dernière est présentée de dos dans une nudité qui fut jugée indécente à Genève et conduisit à sa censure.

Avec plus d’une centaine d’autoportraits, l’exposition démontre le rôle important de l’introspection dans l’œuvre de Hodler et permet d’en retracer son évolution artistique. La série de toiles et de dessins réalisée au cours de l’hiver 1914 lors de la maladie et de l’agonie de sa maîtresse Valentine Godé-Darel, nous introduit presque de manière indécente dans leur intimité, mais aussi dans la vision du peintre de la maladie, du corps et finalement de la mort de celle qu’il a aimé. Par l’acidité de certaines couleurs, de traits acérés et anguleux, ses figures évoquant parfois des portraits et autoportraits d’Egon Schiele, il trace âprement les contours des corps, telles de sèches arrêtes, douloureux contenant physique et mortel.

Avec ses paysages, le peintre propose une alternative à l’impressionnisme à travers laquelle se devine déjà la montagne Sainte-Victoire de Cézanne, comme est également perceptible une certaine filiation avec la peinture romantique allemande tel que Friedrich. Ses paysages sont directement tirés de son environnement immédiat avec un sentiment de grandiose et de sublime, accentués par des formats monumentaux d’où se dégagent la prédominance du vide sur la matière et les vibrations de la couleur. Leur construction, dont il réduit les lignes à l’essentiel pour en extraire la beauté naturelle, peut également s’apparenter à la série d’arbres de Mondrian. Dans le contexte de la rétrospective, l’actualité de sa peinture est soulignée par le parallèle établi avec le peintre Helmut Federle, dont l’œuvre 4,4 The Distance (2002) y est exposée.

En quête d’une reconnaissance artistique et critique sur la place de Paris tout au long de sa vie, cette rétrospective permet de le resituer dans cette période de l’histoire de l’art et met en lumière les nombreuses correspondances à établir avec ses contemporains et successeurs. Tourments, sensibilité, émotion, principaux moteurs de la peinture de Ferdinand Hodler, en font un artiste universel et intemporel.

Jennifer Beauloye, Paris, décembre 2007


[INFOS QUALITÉ] statut : validé | mode d’édition : partage, décommercialisation et correction par wallonica | sources : moreeuw.com ; exporevue.com | commanditaire : wallonica.org | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : Hodler F., Lac de Genève, vu de Chexbres © kunstmuseumbasel.ch  ; © hiltiartfoundation.li ; © kunstmuseumbern.ch.


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