TERMINOLOGIE DÉCOLONIALE – 4 – Les termes liés aux discriminations (CNCD-11.11.11)

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DISCRIMINATION

Dans la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale adoptée par les Nations Unies en 1965, la discrimination est définie comme “toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique, qui a pour but ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice, dans des conditions d’égalité, des droits de l’Homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social et culturel ou dans tout autre domaine de la vie publique.

Cette convention se décline en Belgique par trois lois fédérales qui constituent la législation anti-discrimination : la loi “Genre”, la loi “Antiracisme” et la loi “Anti-discrimination”. Cette législation condamne tant la discrimination que le harcèlement, le discours de haine ou les délits de haine envers une personne ou un groupe de personnes.

Par ailleurs, elle distingue 19 critères de discrimination, dont 5 critères raciaux, sur base desquels la discrimination est interdite et punissable : la prétendue race, la nationalité, la couleur de la peau, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique. Parmi les motifs de discrimination interdits par la loi générale relative aux “autres critères de discrimination”, on trouve deux autres critères qui font partie de l’antiracisme au sens large : les convictions religieuses ou philosophiques et la langue.

ACTIONS POSITIVES PARFOIS APPELÉES “DISCRIMINATIONS POSITIVES”

En Belgique, la législation utilise le terme d’”actions positives” plutôt que “discrimination positive”. L’action positive est définie dans la loi de 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie, comme un ensemble de “mesures spécifiques destinées à prévenir ou à compenser les désavantages liés à l’un des critères protégés [la nationalité, une prétendue race, la couleur de peau, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique], en vue de garantir une pleine égalité dans la pratique“. Les actions positives sont également inscrites dans la loi tendant à lutter contre certaines formes de discrimination de 2007, dite loi anti-discrimination.

NON-MIXITÉ (CHOISIE)

Pratique qui consiste à organiser des rassemblements réservés aux personnes appartenant à des groupes discriminés en excluant la participation de personnes appartenant à des groupes considérés comme potentiellement discriminants ou oppressifs et/ou à réserver la parole aux personnes opprimées en excluant les membres de groupes dominants qui risquent de monopoliser la parole ou de ne pas accorder de crédit à leurs propos.

La pratique de la non-mixité fait souvent l’objet de débats : pour certains, elle permet l’émancipation des personnes et la liberté de parole, pour d’autres, elles recréent une forme de discrimination.

QUOTAS

Les quotas sont une des formes que peuvent prendre les actions positives. Ils représentent ici un seuil minimal institué par la loi, chiffré, qui vise à normaliser la présence d’un groupe sous-représenté dans un espace donné. Il est important de rappeler que les quotas n’ont pas vocation à être éternels, ils constituent une étape afin de lutter contre les plafonds de verre et les discriminations. La fonction des quotas est à terme de faire disparaître les structures de pouvoir qui excluent les personnes sur base de leur genre et/ou de leur “prétendue race” ou origine.

L’instauration de quotas tant pour les femmes dans les instances de décision que pour les personnes racisées fait souvent l’objet d’intenses débats, car ils contreviendraient à la notion même d’égalité. Force est de constater que pour  les femmes, les quotas ont fait un peu de chemin comme on peut le constater dans la législation électorale qui instaure l’obligation de constitution de listes électorales équilibrées en terme de sexe ou dans l’obligation faite aux associations d’avoir un tiers de membres de leur CA du même sexe. D’autres propositions de lois sont actuellement en discussion entre autres pour imposer des quotas de genre dans les comités de direction des entreprises publiques.

La question des quotas pour les personnes racisées est par contre moins consensuelle. On lui oppose l’interdiction de recensement ethnique en Belgique, qui pourrait pourtant être contourné comme le proposait les Assises de l’interculturalité en se basant sur la nationalité de la personne à la naissance ou celle de ses parents qui se trouvent inscrites dans le registre national.

STIGMATISATION

La stigmatisation est le processus social et la forme de contrôle social par lequel une personne est “mise à l’écart de la société à cause de différences considérées comme contraires aux normes de la société.

STÉRÉOTYPE

Un stéréotype est une image préconçue, une représentation simplifiée d’un individu ou d’un groupe humain. Il repose sur une croyance partagée relative aux attributs physiques, moraux et/ou comportementaux, censés caractériser ce ou ces individus. Le stéréotype remplit une fonction cognitive importante : face à l’abondance des informations qu’il reçoit, l’individu simplifie la réalité qui l’entoure, la catégorise et la classe.” Il peut être valorisant ou dévalorisant et permettent à l’individu de classer rapidement de nombreuses informations.

PRÉJUGÉ

Un préjugé est une opinion préconçue portant sur un sujet, un objet, un individu ou un groupe d’individus. Il est forgé antérieurement à la connaissance réelle ou à l’expérimentation : il est donc construit à partir d’informations erronées et, souvent, à partir de stéréotypes.

INTERSECTIONNALITÉ

Cette notion est issue d’analyses qui tiennent compte du fait que les différentes catégories sociales impliquent diverses formes d’oppressions qui ont chacune un impact sur les personnes concernées. C’est ainsi que tout individu se trouve à la croisée de différentes identités qui le caractérisent comme son origine géographique, ethnie, religion, orientation sexuelle, classe sociale, âge, la “race”, l’état de santé, aspect ou sexe. L’intersectionnalité permet de visibiliser les minorités dans les minorités, de penser la multiplicité des discriminations et d’éviter le cloisonnement des luttes en analysant la manière dont les différents systèmes d’oppression s’articulent et se renforcent mutuellement. À l’origine, le concept a été créé en 1989 par l’avocate nord-américaine Kimberlé Crenshaw pour parler de la situation particulière des femmes noires qui se retrouvent à l’intersection de plusieurs discriminations, sexistes et racistes.

XÉNOPHOBIE

Hostilité systématique manifestée à l’égard des étrangers ou des personnes perçues comme telles.” Le racisme et la xénophobie sont deux termes qui ont émergé au même moment. Pourtant, ils ne désignent pas les mêmes réalités  : la xénophobie est un terme d’origine grec qui désigne la haine ou le rejet de l’étranger. Alors que le mot racisme vise plutôt les origines des personnes et induit un classement des personnes en fonction de leur prétendue race.

RROMOPHOBIE

Selon Unia, les Rroms constituent aujourd’hui la plus grande minorité ethnique en Europe et sont la cible d’une discrimination systématique à l’école, au travail et dans la vie quotidienne. “La Rromophobie se définit comme la haine ou la peur des personnes perçues comme étant Rroms, Tsiganes ou ‘du voyage’ et implique l’attribution négative de l’identité d’un groupe. La Rromophobie est donc une forme de racisme, taillée dans la même étoffe que celui-ci. Elle entraîne marginalisation, persécution et violences.

NÉGROPHOBIE OU RACISME ANTI-NOIRS

Selon le réseau Canopé, “le racisme anti-Noirs définit les attitudes, comportements et discours d’hostilité à l’égard des ‘personnes noires’, terme d’assignation qu’il faut considérer dans toute sa subjectivité et son hétérogénéité.

ISLAMOPHOBIE

L’islamophobie peut se définir comme la peur, ou une vision altérée par des préjugés, de l’islam, des musulmans et des questions en rapport. Qu’elle se traduise par des actes quotidiens de racisme et de discrimination ou des manifestations plus violentes, l’islamophobie est une violation des droits de l’homme et une menace pour la cohésion sociale.

ANTISÉMITISME

Attitude de racisme ou d’hostilité systématique envers les Juifs, les personnes perçues comme telles ou leur religion.

MICRO-AGRESSIONS

Échanges quotidiens qui envoient des messages dénigrants à certaines personnes en raison de leur appartenance à un groupe. Une micro-agression fait partie du spectre général des agressions et peut être implicite, voire invisible pour les autres. Le pouvoir des micro-agressions réside dans le fait qu’elles sont invisibles et donc qu’il est parfois difficile de percevoir nos propres actions comme discriminatoires.

CNCD-11.11.11


[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : partage, édition et iconographie | source : cncd-11.11.11 | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : photo d’après-guerre prise en Wallonie © DP | Sur le même thème, voir également notre article sur la novlangue (Orwell)


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