BURUMA : L’éthique protestante et l’esprit woke

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[MONDE-DIPLOMATIQUE.FR, septembre 2023] Nul ne s’accorde sur la signification du mot woke — terme américain qui signifie littéralement éveillé et désigne les personnes politisées autour des questions d’inégalités raciales et sociétales. Les débats qu’il suscite font souvent office de test d’éveil moral et spirituel. C’est pourquoi le linguiste américain John McWorther qualifie d’Élus ces évangélistes de l’antiracisme. Les Élus, écrit-il, “se considèrent eux-mêmes comme ayant été choisis (…) et ayant compris quelque chose que la plupart n’ont pas saisi.”

Appréhender le wokisme comme un phénomène essentiellement protestant permet d’identifier la logique qui sous-tend certains rituels devenus monnaie courante ces dernières années : en particulier, l’excuse publique. À la différence des catholiques, qui se confessent en privé à leur prêtre afin d’obtenir l’absolution, nombre de protestants choisissent d’affirmer haut et fort leur vertu en se confessant publiquement. La scène n’est que trop familière : un homme, ou parfois une femme, énonce une opinion ou un mot perçus comme offensants ; il ou elle présente alors ses excuses devant tout le monde et propose de faire pénitence.

Le rituel de l’aveu public apparaît en Europe à la faveur de la Réforme. Alors que juifs et catholiques intègrent leurs communautés religieuses par des cérémonies durant leur enfance, beaucoup de protestants, à la manière des anabaptistes, déclarent leur foi en présence de leurs coreligionnaires adultes, parfois au cours de ce qu’ils appellent un récit de conversion. Que l’on songe à Elmer Gantry, le personnage éponyme du roman de Sinclair Lewis. Charlatan évangélique, Gantry est à la fois un pécheur en série et un compulsif de la confession. Dans les dernières pages du livre, il implore une nouvelle fois le pardon pour ses innombrables péchés en vue de réintégrer les rangs des dévots, avant d’aller lorgner les “chevilles charmantes” d’une jeune choriste.

Eglise évangéliste au Brésil en 2018 © EVARISTO SA / AFP

Chaque dimanche, les télévangélistes invitent ainsi leurs ouailles à s’avancer les bras en l’air et à confesser leurs péchés devant des millions de spectateurs, pour les prier ensuite de s’acquitter d’une contribution financière. C’est le même spectacle auquel on assiste depuis des décennies dans des émissions télévisées plus séculières, comme The Oprah Winfrey Show, où des animateurs font passer à confesse les stars fourvoyées du cinéma.Dans son livre L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme, le sociologue Max Weber observe que le protestantisme poursuit un idéal plus exigeant que la simple accumulation de bonnes actions personnelles dont se satisfait le catholicisme. Dans le modèle réformé, l’âme ne trouve son salut que dans “un contrôle de soi systématique qui place à chaque instant le croyant devant l’alternative de l’élection et de la damnation.” Jamais l’Élu ne cesse de signaler sa vertu.

Pour Weber, l’objectif protestant de la perfection éthique se caractérise par “l’esprit du travail acharné“, lequel ne consiste pas seulement, pour chacun, à accumuler des richesses par l’effort, mais aussi, ce faisant, à œuvrer spirituellement pour son amélioration morale. Weber était parfaitement conscient de l’intolérance qu’une telle posture pouvait susciter. “Pour les élus —saints par définition—, écrit-il, la conscience de la grâce divine, loin d’impliquer à l’égard des péchés d’autrui une attitude secourable et indulgente fondée sur la connaissance de sa propre faiblesse, s’accordait avec une attitude de haine et de mépris pour celui qu’ils considéraient comme un ennemi de Dieu, marqué du sceau de la damnation éternelle.”

© Xavier Gorce

En 1964, l’historien Richard Hofstadter identifiait le “style paranoïaque” comme l’un des marqueurs de la vie politique américaine, dont les acteurs tendaient à métamorphoser tout conflit social en un “match de catch spirituel entre le bien et le mal.” Dans les pays majoritairement peuplés de protestants, les signes d’un statut social plus élevé correspondaient au sentiment d’avoir été élu en raison de sa vertu. Voyez ces dignitaires au visage pincé dans les peintures hollandaises du XVIIe siècle, solennellement regroupés autour de tables en bois de chêne, dans leurs sobres costumes noirs et leurs fraises blanches, administrant la charité aux pauvres méritants. Certains parmi eux tirent peut-être leur fortune du commerce avec les plantations esclavagistes du Brésil et d’autres colonies néerlandaises, ou plus directement, dans le négoce des esclaves. Mais, en calvinistes stricts, nul doute qu’ils se considéraient eux-mêmes comme touchés par la grâce divine en récompense de leur rectitude morale.

Parmi leurs équivalents contemporains apparaîtrait certainement M.Philip Knight, le cofondateur de Nike, qui a validé une campagne publicitaire contre le racisme mettant en vedette le joueur de football américain Colin Kaepernick, avant de financer certains des élus républicains les plus droitiers. Il coudoierait à la même table M.Jeff Bezos, dont la compagnie, Amazon, a accroché surla page d’accueil de son site Internet une bannière Black Lives Matter tout en continuant de vendre ses logiciels de reconnaissance faciale à la police.

Aujourd’hui, l’Élu tend à opérer presque exclusivement dans les institutions d’élite : des banques et multinationales aux plus prestigieuses fondations culturelles, aux musées et aux organisations médicales, en passant par les grands journaux et les magazines littéraires. Il est devenu pour ainsi dire obligatoire, pour toute entreprise figurant parmi les cinq cents plus grosses capitalisations boursières, de publier une charte de la diversité, de l’équité et de l’inclusion (DEI) professant les valeurs les plus respectables, sans se soucier le moins du monde de la distance qui la sépare de cette profession de foi. “Nous sommes sur le chemin qui mène de la conscience à l’engagement pour l’action“, annonce PepsiCo ; “La diversité et l’inclusion sont la fondation de notre culture et reflètent les valeurs qui nous poussent à faire ce qui est juste“, assure Lockheed Martin ; “Depuis longtemps nous nous engageons à promouvoir l’inclusion, la diversité et l’équité“, proclame Goldman Sachs. Aussi creux que puissent paraître ces mots dans la bouche d’un vendeur de junk food, d’un marchand d’armes ou d’une banque d’investissement, ce qui compte, c’est qu’ils soient récités, comme dans la liturgie protestante, en public.

La même hypocrisie règne dans les écoles privées haut de gamme, comme Dalton à Manhattan, qui se caractérise à la fois par des frais de scolarité exorbitants (jusqu’à 61 000 dollars), et par la présence de trois “officiers diversité” à plein temps, d’une équipe de psychologues formés au “stress traumatique racial” et de formations anti-préjugés à destination des parents et des étudiants. L’université d’Amherst, dans le Massachusetts (jusqu’à 66 000 dollars), invite ses employés et étudiants blancs à suivre un programme “d’activités introspectives et d’actions concrètes pour amorcer et approfondir le travail de l’antiracisme.” Dans ces enseignements, le “privilège blanc” constitue le péché originel. Riche ou pauvre, on est né avec. Une personne blanche ne sera considérée comme antiraciste qu’à la condition de confesser sa culpabilité, à l’instar de ces protestants qui expient le fait d’être nés dans le péché. Il est certes plus facile de procéder à ces rituels — recruter des experts en diversité, multiplier les formations, trompeter des déclarations pleines de noblesse — que de payer des impôts pour améliorer les écoles et les services publics.

James Baldwin et Marlon Brando © The New York Times

S’interrogeant sur l’incompréhension des Blancs de gauche devant l’adhésion d’hommes et de femmes noirs au mouvement des Black Muslims dans les années 1960, James Baldwin note que “les positions des progressistes n’avaient que peu de rapport avec les perceptions, la vie et les connaissances des Noirs, et révélaient finalement leur disposition à parler sur et en faveur du Noir en tant que symbole ou victime, mais aussi leur incapacité à voir en lui un homme.” Une discussion déconnectée des conditions matérielles où toute chose ou presque se trouve réduite à la fonction de symbole indique qu’on a affaire à une mentalité protestante, et non plus à un débat politique.

Ce n’est pas seulement la richesse qui distingue l’Élu : M. Donald Trump et ses soutiens milliardaires sont assurément plus fortunés que les professeurs d’université ou les conservateurs de musée. Pour les héritiers contemporains de l’éthique protestante, l’importance du statut se définit par la qualité des opinions exprimées sur les questions sociales et culturelles. Cela découle d’une évolution plus générale à gauche : la défense des intérêts économiques de la classe ouvrière cède le pas à la promotion de causes culturelles et sociales. Cette évolution, visible surtout dans les pays occidentaux, a coïncidé avec l’affaiblissement des syndicats. La mondialisation, incontestablement, a profité à de nombreuses personnes — non seulement aux présidents-directeurs généraux, mais aussi aux professeurs, écrivains, cinéastes, journalistes, comédiens, organisateurs de conférence, gestionnaires de fondation et conservateurs de musée, c’est-à-dire à ceux-là mêmes qui composent la grande majorité des Élus.

J’en fais moi-même partie. En tant que journaliste international, j’apprécie les bénéfices apportés par le monde cosmopolite dans lequel je vis, avec sa politique migratoire généreuse, sa liberté d’entreprendre et ses populations urbaines hétérogènes qui enrichissent l’offre culturelle et culinaire. Je pense que les accords commerciaux internationaux sont généralement une bonne chose et je soutiens l’Union européenne. Mais tous n’en profitent pas. Comme le dit le penseur marxiste noir Adolph Reed Jr, “si la seule injustice contre laquelle il faut lutter est la discrimination, il n’est plus de base sur laquelle penser l’inégalité économique comme un problème. C’est ce qui en train de se produire dans une société de plus en plus inégalitaire.” Répondre au défi d’améliorer l’éducation publique et le système de santé, ou introduire des réformes fiscales en vue d’une meilleure redistribution, favoriserait davantage les pauvres et les personnes marginalisées que des démonstrations de vertu.

Ian Buruma, journaliste et historien américain


[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : partage, édition et iconographie | source : monde-diplomatique.fr via fr.scribd.com | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : en-tête, JACOBS George, Le procès des sorcières de Salem © Douglas Grundy / Getty Images ; © Les Echos ; © Xavier Gorce ; © The New York Times.


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REUL : L’église du Sacré-Coeur à Cointe-Liège (1985)

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1. Projets conjugués

Au lendemain de la première guerre mondiale, deux projet distincts, inspirés par la reconnaissance, ont été élaborés simultanément. En se conjuguant, ils ont donné naissance au Monument Interallié et à l’église du Sacré-Cœur qui forment à Cointe un ensemble monumental bien connu des Liégeois.

Suivons d’abord la genèse du Monument Interallié. Au lendemain de la paix retrouvée, on voulut rendre un hommage collectif à la gloire des soldats alliés. Un vœu fut émis en ce sens lors du premier congrès de la Fédération Interalliée des Anciens Combattants (F.I.D.A.C.) en 1921. Deux ans plus tard, un congrès semblable réuni à Rome s’enthousiasma pour le projet et en confia l’exécution à une nation ayant été particulièrement éprouvée par le conflit et qui en fut la première victime : la Belgique. Un comité interallié fut constitué et confié à la Princesse Jean de Mérode, présidente de la Fédération Nationale belge des Combattants. Le comité projeta d’édifier un monument commémorant la collaboration des alliés pendant la guerre, à Liège, ville qui subit en 1914 le premier choc de l’invasion. On pensa construire à Fétinne ce “Mémorial Interallié” qui devait faire renaître la solidarité internationale sur le terrain de la charité. Le Mémorial devait contenir un musée de la charité internationale pendant la Grande Guerre.

Pendant ce temps, dans les milieux catholiques, on élaborait un autre projet. Depuis longtemps, on avait décidé d’ériger un mémorial au Sacré-Cœur de Jésus pour la protection dont avait joui le Pays de Liège pendant les dures années de l’occupation. Il ne fut d’abord que d’une statue monumentale à placer au plateau de Cointe. On parle ensuite d’ajouter une chapelle qui prit bientôt les proportions d’une église et qu’on appela prématurément “basilique.”

C’est l’abbé de Fooz, curé de Roloux, qui fut le promoteur du projet de monument religieux. L’Évêque désigna Cointe comme site : ainsi l’église servirait en même temps d’église paroissiale. Jusque là, en effet, la paroisse Notre-Dame de Lourdes de Cointe ne disposait que d’une chapelle provisoire située rue du Chéra. L’élaboration du projet fut donc confiée à la Fabrique d’Eglise, institution responsable dans la paroisse du lieu de culte. Cette Fabrique est soumise à une législation très stricte. Les démarches entreprises par le Conseil de Fabrique se heurtèrent à tant de difficultés administratives que celui-ci renonça au projet qui fut dès lors pris en charge par une association privée érigée le 14 novembre 1923 : l’A.S.B.L. “Monument Régional du Sacré-Cœur“. A la fin de la même année, l’A.S.B.L. acheta le château Saint-Maur et les propriétés voisines.

De ce temple dédié au “Prince de la Paix”, on voulait faire un centre vivant de dévotion eucharistique et un centre diocésain de la dévotion au Sacré-Cœur. Ces deux projets fusionnèrent dès le moment où les responsables du “Monument Interallié” apprirent qu’un comité liégeois se proposait d’ériger une grande église régionale et un centre de pèlerinage  à Cointe. Les deux monuments n’en feront qu’un seul qui comportera un élément civil et patriotique, le Monument Interallié, et un élément religieux, l’église du Sacré-Cœur.

Les comités réunis approuvèrent le projet de construction qui avait remporté le concours ouvert pour la circonstance. Il était l’oeuvre de l’architecte anversois Jos. Smolderen, auteur d’un autre monument à Zeebruges.

2. Les travaux

Lors de la pose de la première pierre du futur monument, on ne pensait encore qu’à la construction de la statue du Sacré-Cœur. La pierre en question est conservée dans la chapelle latérale dédiée à Saint-Maur. Elle porte une inscription : “Au prince de la Paix, le pays de Liège reconnaissant. Le 21 juin 1925, Sa Grandeur, Mgr Rutten, Évêque de Liège, d’Eupen et de Malmedy, posa solennellement le première pierre de ce monument.

l.’ouverture des soumissions pour les travaux eut lieu au château Saint-Maur, l’actuel Castel, le 8 septembre 1931. Un devis estimatif parlait de 4.600.000 francs. La construction de l’église fut confiée d’abord à la firme S.A. Hallet et Poismans. Elle fut poursuivie par la S.A. Poismans et Cie, alors que l’entreprise Hallet travaillait au Mémorial. En effectuant les déblais pour les fondations de l ‘église, on ne fut pas peu surpris de trouver une demi-douzaine de puits de mine de quelque 90 cm de diamètre. On se trouvait sur l’emplacement d’une ancienne houillère, vieille de 2 à 3 siècles, dont l’administration des mines ignorait l’existence.

La consolidation du terrain a été réalisée par l’injection de ciment. Il fallut amener 250 camions de 2.000 kg de ciment. Ce travail d’injection dura un an et consomma une part des fonds rassemblés pour le monument. Ainsi, les assises de l’église reposent sur un formidable bloc de béton. L’ossature de l’église n’est pas construite en béton armé. L’élévation et les piliers sont en maçonnerie de briques. Les pierres du revêtement extérieur sont celles dites Mézangères, appelées communément pierres de France. Les hourdis de la crypte, les linteaux intérieurs, la voûte supérieure et la coupole extérieure sont en béton armé.

Malheureusement, le bâtiment est resté inachevé. En effet, autour de l’espace central, sous la grande coupole, on prévoyait deux grandes chapelles et deux portails monumentaux. Une seule des grandes chapelles qui devaient rayonner autour de la coupole a été construite : c’est le chœur. L’autre chapelle, de même que les deux entrées monumentales, n’ont pas été réalisées parce qu’on manquait d’argent. Une maquette exposée dans l’église permet de voir comment devait se présenter l’édifice initialement prévu.

Ceci explique que trois pans de l’enceinte ont été fermés (on espérait la chose provisoire) par des parois élevées en maçonnerie de briques rouges recouvertes de cimentage. Deux porches que l’on croyait aussi provisoires ont été construits en maçonnerie et recouverts de cimentage. Les aménagements intérieurs n’ont pas été effectués à cause du manque de fonds.

3. L’inauguration

Nous nous intéressons principalement à ce qui concerne l’église du Sacré-Cœur. A titre d’information complémentaire, nous mentionnons ce qui concerne d’autres éléments faisant partie de l’ensemble monumental de Cointe.

Le 22 mars 1936, dimanche du Laetare, la paroisse N.-D. de Lourdes assiste à la bénédiction solennelle de la nouvelle église paroissiale dédiée au Sacré-Cœur, Prince de la Paix. Cette bénédiction a été donnée par Mgr Simenon, vicaire général, assisté par l’abbé Claessens, curé, et de Mgr de Gruyter, ancien curé de la paroisse. Cette bénédiction marquait l’ouverture de la nouvelle église au culte.

La consécration de l’église, qu’on appelle aussi “dédicace”, eu lieu le vendredi 19 juin 1936, jour de la fête du Sacré-Cœur, par Mgr Kerkhofs, Évêque de Liège. L’inauguration du Monument Interallié a eu lieu le 20 juillet 1937. Elle fut présidée par le Roi Léopold III en présence du Prince Charles, du Maréchal Pétain, du Maréchal Earl of Cavan et de la Princesse de Mérode. Le monument aux morts de Cointe, plaque commémorative fixée sur le mur extérieur de l’église face à la tour votive, a été inauguré le 17 juillet 1938.

4. Style et dimensions

De style néo-byzantin, l’église est couverte d’un dôme central à lanterne supporté par huit double colonnes. Des chapelles occupent les absidioles greffées autour du plan circulaire. La coupole est formée par trois éléments superposés :

      • une coupole intérieure de forme ovoïdale percée à la partie supérieure ;
      • un cône intermédiaire ;
      • la coupole extérieure de forme sphérique, absolument indépendante des autres. Cette coupole est légère : elle n’a que 8 cm d’épaisseur.

L’église a 84 m de façade. La hauteur totale de l’édifice est de 54 m (la tour votive du Monument Interallié a 75 m).

      • La hauteur sous la coupole intérieure : 35 m ;
      • La hauteur sous la coupole extérieure : 42 m ;
      • Le diamètre de la coupole intérieure : 25 m ;
      • Le diamètre de la coupole extérieure : 28 m ;
      • Le diamètre de la lanterne : 8 m 50 ;
      • Le poids total des matériaux employés : 25.000 tonnes.

5. Meubles et décoration

Le Sacré-Coeur en marbre blanc de Carrare placé à l’ intérieur de l’église sur un socle imposant en face de l’entrée est la reproductionn faite par Karel Weirich d’un Sacré-Coeur sculpté pat son père : Ignace Weirich (1856-1916). L’original est à Rome.

La statue de Saint Maur  provient de la chapelle dédiée au saint dans la rue portant son nom. C’est Saint Maur abbé (il porte la crosse). Il y a eu incontestablement confusion entre l’abbé angevin et l’obscur ermite hutois vénéré à Cointe. C’est devant le statue de l’abbé que prient ici les fidèles. L’oeuvre semble dater du 17e siècle. La polychromie est neuve.

Le Christ en croix surmontant le tabernacle du maître-autel est l’oeuvre du céramiste cointois Dominique Harzé. Dès 1935, la Pologne préparait l’aménagement décoratif et l’ameublement de la chapelle dédiée à la Vierge de Czestochowa.

Les fonts baptismaux, fixés dans le baptistère, sont faits d’une cuve en marbre sur pied.

Les orgues sont les dernières orgues de cirque construites par Kerckhoff de Bruxelles en 1905.

Les vitraux sont plus tardifs.Les trois vitraux du chœur honorent le Sacré-Cœur. Celui du centre est dédié au Sacré-Cœur, Prince de la Paix. Celui de gauche évoque le cœur transpercé de Jésus. Celui de droite montre le disciple bien-aimé s’appuyant sur le cœur de Jésus. Ils sont l’oeuvre de G. Steger et de J.Colpaert qui les ont réalisés en 1953.

D’autres vitraux ornent la chapelle saint-Maur. Ils sont des hommages rendus à des enfants de la paroisse morts au service de la patrie ou de l’église : Michel Nève de Mévergnies (1943) ; Albert Forgeur (196l) ; Maurice
Hauterat (1944). D’autres ouvrages récents ornent le chœur : les grilles en fer forgés. Les confessionnaux sont aussi en fer forgé.

La crypte est décorée de trois mosaïques dues à J. Osterrath et placées en 1938. La mosaïque centrale faisant effet de retable représente des anges en adoration, celle de gauche représente N.D. de Lourdes, celle de droite Sainte Bernadette, la voyante de Lourdes.

6. La visite

Tout a été conçu pour faciliter la visite de l’ensemble du bâtiment. Un escalier monumental, situé derrière l’autel, donne accès au balcon qui surplombe le choeur. D’autres escaliers donnent accès aux deux balcons situés à l’arrière du bâtiment. Des escaliers aménagés dans les deux clochetons N-E conduisent vers la galerie, le promenoir à la base du dôme. Le visiteur ayant gravi les 85 marche peut circuler à son aise dans le promenoir long d’environ 100 m et situé à une hauteur de 42 m. Dans la galerie, 40 baies sont ouvertes dans la paroi extérieure permettant à celui qui circule dans la galerie de découvrir le plus beau panorama ininterrompu de Liège et de sa banlieue. Par des fenêtres donnant vers l’intérieur, le visiteur peut, de la galerie, voir l’église de haut.

Depuis la galerie, on accède à la lanterne couronnant le dôme par l’escalier de 91 marches posé en colimaçon entre la voûte intérieure et la coupole extérieure. Cet escalier en béton armé encastré sur les parois des coupoles intérieure et moyenne, permet l’accès facile au balcon qui couronne la coupole extérieure. Depuis ce point élevé le visiteur a une vue impressionnante du panorama. La montée vers la lanterne par l’espace. situé entres les coupoles impressionne le visiteur et lui donne une idée saisissante des dimensions du bâtiment.

7. Une basilique ?

La dénomination de “basilique” donnée à une église ne tient pas à son architecture et ne dépend pas de la volonté de ceux qui l’ont construite. Il s’agit d’un titre décerné à l’édifice par l’autorité ecclésiastique qui veut honorer le sanctuaire. Pour comprendre le sens et l’origine de ce titre, il est utile de faire un peu d’histoire.

Dans l’antiquité romaine, on qualifiait de royal un édifice imposant. Le terme basilique, d’origine grecque (“basilikos”, du mot “basileus” qui veut dire “roi”), fut employé par les seuls latins pour désigner une grande salle. On appela “basiliques” principalement les édifices publics civils qui servaient de marché ou de palais de justice.

Les chrétiens des deux premiers siècles ne semblent pas avoir eu d’édifices réservés à leurs assemblées. Leurs réunions avaient lieu dans des maisons privées. Au troisième siècle, certaines maisons, devenues propriété de la communauté, servirent de lieu de rassemblement. La croissance de la communauté amena les chrétiens à construire non seulement des maisons ordinaires servant d’église, mais de grandes salles du genre des salles publiques connues à l’époque. Quand les chrétiens construisirent des édifices religieux adoptant le dessin et les proportions de la basilique civile, on parla de basiliques chrétiennes. Celles-ci se caractérisaient par la forme basilicale, c’est-à-dire une grande surface rectangulaire couverte d’une charpente que supportaient des rangées de colonnes parallèles à un côté.

Le titre de “basilique”, resté longtemps imprécis a été finalement conservé par certaines églises qui étaient plus connues à cause de leur antiquité, de leurs dimensions ou de leur célébrité. A partir du 16e siècle, les papes ont donné le nom de “basilique” à des églises qui ne jouissaient pas d’elles-mêmes d’une longue antiquité et d’une grande célébrité. La législation ecclésiastique plus récente dit : “Aucune église ne peut être honorée du titre de basilique sinon par la permission apostolique ou par une coutume immémoriale.” Trois insignes sont remis à une église élevée au rang de “basilique” : le pavillon, grand parasol fait de bandes de soie alternativement rouges et jaunes ; la clochette fixée au sommet d’un bâton ; la chape violette dont se vêtent les chanoines si la “basilique” a un chapitre.

L’église du Sacré-Coeur à Cointe n’a pas été honorée du titre de basilique. C’est donc prématurément que les promoteurs de l’église ont parlé de “basilique” et c’est erronément que certains l’appellent ainsi.

Auguste REUL, abbé


[INFOS QUALITÉ] statut : validé | sources : brochure inédite | mode d’édition : partage et correction par wallonica | commanditaire : wallonica.org | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustration : toutes les illustrations sont © Manu Utility. Voir l’album complet de Manu Utility sur la “basilique” de Cointe ici.


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