BRUYNOGHE, Yannick (1924-1984)

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Critique, écrivain, réalisateur et animateur. Un des plus actifs parmi les propagateurs du jazz en Belgique dans l’immédiat après-guerre. Né en 1924 à Louvain, Yannick BRUYNOGHE découvre le jazz à 15 ans en accompagnant son frère à un concert de Duke Ellington à Bruxelles. Il achète ses premiers disques de jazz et, passionné, entre en relation, pendant l’Occupation, avec les spécialistes d’alors, notamment le français Hugues Panassié et l’anglais Stanley Dance avec lesquels il entretient une correspondance suivie. A la Libération, il publie en collaboration avec Jean Leclère un bulletin polycopié, Jazz Record Society. Etudiant en droit à l’Université de Louvain, il monte un petit orchestre de jazz (University All Stars) dont il est le batteur.

Bruynoghe part pour New York en 1947, devient l’ami de bon nombre de grands musiciens : Rex Stewart, Dave Tough, Hot Lips Page, etc. et partage son appartement avec le baron Timmie Rosenkrantz, un de plus célèbres mécènes de l’histoire du jazz. Il fréquente Harlem et la mythique 52e rue où il entend en direct tous les géants du jazz de l’époque. De retour en Belgique, il est chargé de sélectionner les musiciens qui représenteront la Belgique au Festival de Nice (Sandy, Jaspar, Pelzer, Sadi, etc.).

De 1948 à 1959, il anime pour l’I.N.R. l’émission “Notes blanches, musiciens noirs” (traduite à la N.I.R. par Louis Baes), écrit dans La Revue du Jazz et fait partie du comité de rédaction de Swingtime. Quoiqu’il ait, à New York, assisté aux feux de la révolution bop (Parker, Gillespie,… ), il devient petit à petit, sous l’influence de Panassié et par conviction, un ardent défenseur du jazz traditionnel et une des voix marquantes du mouvement Revival et middle-jazz. Il met sur pieds de mémorables concerts (Willie “The Lion” Smith à Louvain par exemple), devient l’ami intime du chanteur de blues Big Bill Broonzy (dont il publiera en 1955 la biographie “Big Bill Blues”, rééditée en 1987). Bruynoghe sera par ailleurs désigné en 1956 comme conseiller artistique pour le film de Jean Delire, consacré au même Big Bill Broonzy, qui obtiendra l’Ours d’argent au Festival de Berlin.

Il organise la tournée européenne de Mezz Mezzrow en 1953 avec Buck Clayton, Gene Cedric, etc. (en Italie, l’orchestre sera renforcé par… Frank Sinatra !) et travaille quelques temps comme secrétaire de la Cinémathèque de Bruxelles, puis est engagé en 1954 par la RTB comme responsable du fameux “Ciné-Club de Minuit”. En 1957, il fonde sa propre revue de jazz, Jazz 57, fortement teintée de revivalisme et souvent hostile au jazz moderne. Au cours d’un voyage de trois mois aux Etats-Unis, il retrouve Stanley Dance et se lie d’amitié avec les plus grands bluesmen (Muddy Waters, B.B. King, Memphis Slim, etc.). A San Francisco, il organise une séance d’enregistrement du pianiste Earl Hines.

Sa maison était devenue le point de chute des musiciens américains de passage en Belgique et le lieu de rencontres mémorables. En 1956, il réunit Lucky Thompson, Jean Warland, Bodache et Jacques Pelzer à l’Escholier Ten Noodois, pour le seul plaisir d’entendre deux saxophones avec une section rythmique. Il fait engager Lester Young à la BRT en février 1959 pour l’émission “Jazz and Jam”. A la mort de Broonzy (1958), il réalise un film de montage sur sa vie, pour la RTB, puis une émission consacrée à Memphis Slim, filmée chez lui, à Uccle. Ensuite, en collaboration avec Fred Van Besien, des films de 30 minutes sur le chanteur de blues Roosevelt Sykes, Buck Clayton et Coleman Hawkins et, pour la RTB, un film de montage sur Louis Armstrong à la mort de celui-ci.

Entretemps, il continue à écrire dans diverses revues spécialisées et anime sur Radio-Namur l’émission “Exploration du Jazz”. De 1964 à 1979, il s’occupe d’une galerie d’art contemporaine (Maya) et se met lui-même à peindre et à exposer, à la galerie Vanderborght. Il enseigne l’histoire du jazz à l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Visuels de La Cambre jusqu’à sa mort en 1984. Yannick Bruynoghe est également l’auteur de très nombreuses photographies de musiciens de jazz, réunies par son épouse pour une exposition au Musée d’Ixelles en 1985. Une grande partie de ces documents photographiques, qui font aujourd’hui figure d’archives, sont conservées au Musée de la Photo à Mont-sur-Marchienne.

Jean-Pol SCHROEDER


[INFOS QUALITE] statut : maintenance requise | mode d’édition : transcription (droits cédés), correction et actualisation par wallonica.org | source : SCHROEDER Jean-Pol, Dictionnaire du jazz à Bruxelles et en Wallonie (Conseil de la musique de la Communauté française de Belgique, Pierre Mardaga, 1990) | commanditaire : Jean-Pol Schroeder | contributeur : Philippe Vienne | crédits illustrations : affiche du 1er Festival de jazz de Nice ©  trésors.nice.fr | remerciements à Jean-Pol Schroeder


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