Le dernier Body_Soul de Hawk
chez Ronnie Scott à Londres
11 septembre 1968 _ suite
Hawk
dans un linceul de miroirs. ondées. hanté par les Jumelles
. voix de câbles croulants. Tours terr
-assées longtemps avant son temps ici fulg. urant l’avenir
Rollins Bridge is fallin down
à londres . où il arrive
ce tournoy-
ant temps doré
arbres cédant leurs feuilles
tôt comme ceci . cette saison trottoir précoce automne crissant
esprits vol.ants blancs comme chute
de neige chute de chagrin
dans le froid
embrassant l’air tendre qui ne peut te
soutenir pas
de chaude pirogue mon sonûgal
qui ne peut . qui ne peut te soutenir
o mon amour mes pétales fra-
giles fanés flétris
pétales d’amour de toi ce temps doré à lon-
dres précoce automne du premier temps s’effeuil-
lant brû-
lant les
traîttoirs
et les marronniers. et tourner
le dernier coin s’engouffrer chez Ronnie Scott
les lumières baissées déjà même au bar
la salle bondée tendue serveurs silencieux
ce soir. là toutes ces années
un son jamais vu
jusqu’ici . monte sur scène aux applaudissements frémissants
sous le choc pour toutes les fois où nous tendons
nos oreilles à sa force fruitée, au tonnerre
le saut
souple du Missouri stomp en do dièse
au
blues country uptempo. la grâce
brune convaincante insoucieuse de Hawk qui approche
qui maintenant se dresse len. tement sous les spots de Londres
dégingandé et frêle . crinière clairsemée et grise
la musique qu’il commence à balancer si im-
perceptible juste un rêve sur
ses lèvres . les premières notes chu-
chotant quelque chose comme la mort
de toutes les certitudes connues .
nos usages . notre force
fonçant à tombeau ouvert les tombereaux
de notre avenir caram.
bolent et soudain dans cette intimité inaugurale
il semble ne pouvoir jouer les créatures de dieu petites et grandes
pourraient ne pas avoir la force de faire swinguer
son souffle dans cette embouchure courbe de plastique placide
la faire respirer
et sûr . et la faire frissonner vivace comme les tours
de sa métropole ouvrant nos oreilles pour nous clore les yeux aux sourires
et nous rassembler en un moment
magique que lui seul pourrait calmerde myrrhe et de sel d’anageda & de cannelle sur notre
chair
Et alors le souffle revient . lent . vacill-
ant d’abord
et puis il semble chambouler inconnue dangereuse
une lumière
bien loin à l’horizon . frais
vols clign/otants, une grande flotte traversant la fluide
nuit & l’air là-haut
une grande marée montant montant ostinato vers lui sur le
podium grand
maintenant . le saxo s’étirant argenté jusqu’à envelopper
l’or du cor . et c’est à nouveau Hawk
et nouveau . le doux cri soulevant les plumes de tous les sons
autour de lui . pli-
é et déployé comme le chœur presque chant
du coq nous atteint dans cet air distant de New
York par delà ce que nous appelons vieillesse . infirmité . la perte
de l’el dorado le para. box du para. dés . vie
dans ce petit jeu roulant de pirogue chauvirant au hasard.
Car ceci est quelque chose d’autre . autre autre
chose . loin loin au-delà de ce que jamais nous aurions conçu . anti-
cipé quand commence la muse
ique. croyons
que nous connaissons de la muse
doucement rageuse piège et image et collage . croyons
que nous partageons l’homme qui fait cette mus . ante musique
et que avec la folie faite hommes en cette saison
d’été indien et pastoral il n’y aurait pas déclin de pouvoirs .
nos hanti. cipations là en plein éveil et presque toutes ac-
complies . pas encore l’hésitation en suspens . cuivrée . coupable
les yeux liquides séduisent bercent scintillent la pause
avant que les clés ne commencent à tourner
le coin du globe . et ainsi malgré la chute
des pétales de prière – rien ne se fanerait – ne se flétrirait.
Mais ceci est quelque chose d’autre . autre autre
hose
autre autre chose au-delà du paradigme
loin loin au-delà de la limite
du para .
dés . que ce que nous faisons . faisons bien pourrait bien
durer longtemps longtemps après que le premier souffle dé-
faille . après la chute des dernières feuilles des dernières graines
à travers cet air de Londres la mince
et creuse image de Hawk
seul enclos dans la lumière
comblant lentement son ombre au pied du
micro. le premier pas
gauche, tout tout premier pas. première
attaque confiante de notes legba . écar-
tant le silence pour que l’homme se remette à marcher sur
la fraîche eau laconique . ploy-
ant les genoux pour saluer la sensation
du pouvoir qui revient
les pétales . accordages . les sombres roses de magnolias
les changements . riffs
flamboyants
ainsi le bassiste peut reprendre sa pose voûtée son sourire habi.
tuel . cuivre betcha betcha des cymbales et radar gloussant tzi
ing aper. cevant où nous sommes
à avancer ensemble vers le Nil fertile
nous souvenant redevenant entiers & puissants
les paniers de bolgatanga débordants & oranges
généreuses & radeaux de canne à sucre . jus
frais sirop de tamarinier. à mi chemin de l’allée
le saxophone axe + axé mijotant la salle d’obscurité enfumée
avec une gaie. té que nous savons maintenant ravie à nos yeux par
trop d’inattention . lourdeur langueur lassitude morne
désespoir impuissant ravageur
le clapotis brisé de l’eau qui s’infiltre dans notre unique pirogue
. peut-être notre dernier bon temps à londres
mais un jour certain de l’avenir de new
york. sa majesté magique énigmatique fleuris-
sant la salle . la lueur de son
corps le seul mot que nous ayons pour ce qui est – cet éber-
luement autour de ces tours futures de son chef d’œuvre solo
se dressant à nouveau sonore vers la croix d’argent
d’un jet qui approche . disséquant dans le bleu
la pleine mosquée et présages blancs de la lune
juste des après-midis avant . haut au-dessus de Berkeley Square .
au-dessus de
Heroes Square . au dessus de Washington Square. Wall Street
Canal. Le cimetière des nègress. corps . corps . corps . corps
se déver-
sant de ce sombre stromboli de Man-
hattan dans de confuses catacombes de dis-
parition d’amour et grâce et douleur & brûlure persistante .
le cénote de cristal effondré . les
tôles styrées fendues éclatées spiralant du volcan
muet en cloche de fumée
leurs vitres . éparpillées en mélopées étranglées
vers la valence mascarade d’un sol lointain. le chant
brumeux montant des puits du carnage . quelque part . quelque
pesant don-
jon errant parfum lointain échec de l’ibis
cette nourriture & promesse d’un miracle . mais pas encore pas
encore. même si nous le savons en route tandis que nous comptons
les maux les morts les mutilés le grincement le coût écra.sant
les débris les petits les aveugles tombant de l’air carbone
& claquements lacérations des blessés
amassés . odeur de carnage
de chair tordue et imprimée sur les fers . chair
devenue sel . sel de-
venu brandon gruau carbonisé cendres cendres éclair de
larmes . les larmes au bout des doigts comme goudron
le noir collant brouillages brûlés bombardés
lacérés le diamant
les gens marchent sur leur cœur en bouillie & vivent ds la lune
et d’autres s’arrêtent écartelés à demi vivants attendent
montée d’une burka de poussière & monstre tout autour
de nous dans ces vagues rugissantes et ventre de rage qui chuchote maintenant
un al-quaida lové noyé devant nous et sous nous
bien-aimés descendus dans les arêtes de tonnerre démoniaque
descendus disparus dans la ruée as . pirée d’air
hurlant de lave et de cimetière mes petites filles chéries chéries
o hurlez héros . Hiroshima . au quelle dommage
. quel Agent Ornage kora
soufflées avec leurs rubans . précipitées dans le caniveau
leurs douces huiles rouges
tachent le silence de parking et sifflement de minuit nucléaire
éveillant lentement les larges trottoirs blanchissant s’élargissant
toc toc à la porte des cieux
mon oncle du Coin des Bonnes Affaires chez Filene
n’ira plus jamais y acheter ni là ni nulle part si merveilleusement .
sa lèvre de titane cell.ulaire si affamée naguère de donner des
nouvelles ne se plaindra plus du 92e étage
on n’a pas trouvé son corps . on n’a pas trouvé son téléphone
quelque part dans le vaste fleuve béant des plénitudes de la
blessure de la ville . il est aveugle ligoté et béd.ouin échoué
on ne peut même pas partager le chuchotement sans voix sans
fil de son destin . pas savoir s’il a sauté ou brûlé
pas savoir s’il est encore là-haut s’il est tombé
Et ainsi ce matin veille de sans lumière ni choix
je ne puis nager
la pierre . je ne puis m’accrocher à l’eau . je me noie
j’avale abandonné . je tourne et dé-
vale dans la peur suffocante . une nuit si profonde qu’elle fait
tourner et pleurer la file d’araignées de l’avenir que l’on voit fil-
ant ici leur voix d’argent
de larmes . les bijoux de leurs yeux sans . paupières ni éclat
à travers les coups de cette éternité . je me débats, je brûle
et quand j’émerge léviathan des profondeurs .
noire luit ma peau
de phoque . de noirs galets é . dentés minent la rive
hantée par poussière et brome
montres bracelets sans marée
ni son
communion sans mains
brisées x-
plosions de frustrations . drones .
transsubstantiation de la sueur
de haine . les lèvres rubis absentes
sur le bord tremblant
du vin . je m’éveille au top
pour te dire que dans ces eaux sonores de mon pays
il n’y a ni racine ni espoir ni nuage ni rêve ni barque à voile
ni miracle tentateur . bonjour ne peut com
penser mauvaise nuit nos dents ricanent mordent
même l’acier en fusion
des rencontres vespérales d’anges sans défense
dans ce nouveau jardin fermier des délices de la terre
cet inconnu d’injustices vacillant
descendant brinqueballant la roue et cime-
tière du vent . les rues étroites comme des en faux
air clair pour un moment . claire
innocence où nous courons si si si si nombreux . la foule
qui coule
sur le pont de Brooklyn . si si nombreux . je ne pensais pas que la
mort en avait défait autant . se fond dans ce qui devient soupir
fanal lumineux de l’avenue vide à jamais
notre âme parfois déjà loin devant nos apparences
et notre vie se retourne
sel comme à Bhuj à Grenade . Guernica . Amritsar . Tadjikistan
les cités hagardes frappées par le soufre des plaines
de l’Etna . Pelée . Naples et Krakatoa
les jeunes mères enfants veuves à la vitre prostituées
revoient le passé comme en Bosnie . au Soudan . à Tchernobyl
Oaxaca terremoto incomprehende . al’fata el Janin . à Bhopal
bébés tètent le lait toxique . nos langues empâtées alourdies
s’habituent à quel est le mot qu’il n’y a pas en français
au-delà de Schadenfreude pas pas du tout
comme fado dodona ou duende ce moment sur un pic à Darien
Balboa ü Mai Lai
Ainsi donc quel est le mot
pour cette haute poutre de suicide . la colombe de la corde
étouffant la gorge qui roucoule doucement des prêtres de la réussite
le choc
de votre mort dans la fission du bourbier
de la dette. gâchis . vif-argent virant à sable
mouvant et déversoir . boyaux mous de sida de Mon Frère . les
jeunes saturés du goût de la mort dans le chaudron d’eau bosselé
quel prophète ma langue
avec la perte tsunami de Ma Mère le Nom, l’é-
chec de l’espoir d’angéliques tombées. les alphabets s’entassent
à l’envers dans ma bouche
de mélasses . bandalou . babel. et l’écrou-
lement du plâtre sur ces voix ces partitions
dub rap hip-hop scouse . la chaîne
qui barre les marchés de Marrakech
mijotant de vieilles blessures de verbes disparus qui peuvent guérir
. de baptêmes disparus qui hurleront
ton nom du sommet du désastre. adjectifs déjà en-
volés en tintamarre . flânant dans la honte . le silence de pourriture
des non-cieux torrides . les horribles fours de kapo de la bête
sur l’aire à rat de ta syphilis. pied
plat de la peur . l’animal inconnu avide
qui est ta sœur sybille à la porte
du paradis les quatre
petites filles xplosées de Bir-
mingham cette ku-
klux chrétienne nuit de tabernacle à Sodome & Herero Alabama
flim
& terreur volant au vent Nyamata Rwanda . les pauvres de bom-
fin gouges de pierre et failles de nos pa-
lais décorés . la veuve aux roses à la vitre à . jamais cher-
chant dans la frus.tration sur le siège arrière criblé
de balles de sa limousine son héros héros de présidentiel époux et
son cer-
veau éclaté en confetti à Dallas . le champignon fuligineux de la
Mort Noire de Dieu à Nagasaki . les exploits de Pol Pot
la Grande Pyramide de Crânes du Roi Léopold au cœur du Congo
belge
comme Judas venu au Chriss . comme le léopard venu à l’agneau
juste sur ce sombre sol in.égal de catastrophe où bientôt
les visages sauriens dévastés des morts nous dévisageront
de leurs orbites cliquetants . le tendre langage irie
de leurs prières
douces lames d’yeux chandelles en psaumes de douleur et innocence irie
de photos de ruines et jeunes cœurs clignotants d’ours
en peluche d’enfance contre l’encens des grilles noires
et luisantes des parcs . tous leurs oiseaux
partis
esprits de feuilles de cérémonies de verte végétation
partis
Rita Lasar Joseph O’Reilly Masuda wa.Sultan . ses neuf enfants
partis
Fitzroy St Rose l’Echelle de 16 mètres tant de mil tant de milliers
partis
il semble que presque tous ceux montés travailler là ils sont
partis
comme le jour où tu m’as fait avaler le bout de ma langue
dans les villages. en suivant les traces
de pas de moi-même moi-même . la détresse
de mes propres fleuves de cette chair
qui le ressent le sait Seigneur !
ma propre cendre mon propre alpha . mes propres limites de cri
comment tu m’as fait chanter ces étranges meschants dans un étrange pays
si loin de musique sexe et saxo
& rien rien rien de neuf
tout naufrage
tout épave . et
tombant du bleu vers des champs sonores
Iran Irak Colombus Ayiti Colombo Beyrouth Manhattan Afghanistan et toi
<
J’étais sur les marches du City Hall – dans toute cette poussière
et je savais que Terry [son mari, le capitaine de l’Equipe] devait être
. . . à un des étages, aussi haut qu’il pouvait atteindre . . . dans ce bâtiment . . .
car c’est ce que fait sa brigade . . . et quand j’ai vu tomber le bâtiment
j’ai su qu’il n’avait aucune chance
. . .
parfois je me tracasse à me demander s’il avait peur . . . mais . . . comme je le connais
je pense qu’il était concentré sur ce qu’il avait à faire . . . parfois ça me met en colère
[ici elle a un petit rire de chagrin]
. . . mais je ne crois pas qu’il . . .
je pense qu’à l’arrière de sa tête . . . il se demandait plus où
j’étais ? si j’étais assez loin . . . de ce qui se passait ?
Mais je ne pense pas qu’il envisageait . . . qu’il ne rentrerait pas à la maison
et parfois ça me met en colère . . . presque comme s’il ne me choisissait pas . . . ?
Mais je ne peux pas lui en vouloir . . . il faisait son travail…il était comme cela
et c’est pour cela que je l’aimais tant
. . .
. . . donc je ne peux pas le lui reprocher . . .
. . .
son ami Jim m’a dit qu’il a vu entrer Terry et Terry lui a dit
peut-être qu’on ne se reverra pas
et l’a embrassé sur la joue . . . et il est monté . . . en courant
[dans la tourmente de flammes de marches hautes étroites brûlantes sans retour de la Tour Nord]
. . . quand le bâtiment est tombé . . .
. . . j’ai juste senti une déconnection totale dans mon cœur . . .
c’était juste comme si tout m’était juste arraché de la poitrine
. . .
je pensais que Terry était juste
. . .
i n c i n é r é
. . .
je grattais la poussière . . . du sol . . . en pensant qu’il était
dans la poussière
Bethe Petrone lors de l’hommage aux héros du 11 septembre
(HBO/Tv Memorial Tribute, le 26 May 2002)
pour elle-même si belle
et pour toutes les femmes du monde de ce poème – je voudrais avoir leurs
mots – à New-York, au Rwanda, à Kingston, en Irak, en Afghanistan
Quand son mari est mort le 11 sept. il ne savait même pas qu’elle était enceinte
J’ai perdu mon mari . . . mais je pense qu’il a fait . . . de son mieux
. . . parce que je crois vraiment que quand Terry est arrivé au Ciel . . .
il avait tant de points en sa faveur qu’il a plaidé pour cet enfant parce qu’il savait
que ce serait la seule chose qui me sauverait
. . .
. . . Et . . . je pense que de ce point de vue . . .
. . . j’ai eu . . . [. . . ] . . . je vais vivre . . . j’ai encore quelque chose de Terry . . .
. . . que je vais voir en mai . . .
Et tant de gens de la Pomme n’ont pas cela
alors je me dis que d’une façon . . . j’ai eu de la chance . . . mais sinon
[ici elle essaye de sourire]
. . . c’est clair . . . je n’en ai pas eu
[et d’un geste elle fait excusez-moi]
>
Ainsi même en ce moment
rappelons-nous les pauvres et les déshérités
qui ont froid et faim. les damnés de la terre
les malades de corps et d’esprit . ceux qui porteront
le sol en flammes la fracture du deuil sur leur visage
les estropiés les solitaires les anonymes sans amour à donner
ou recevoir
les vieillards déglingués au nom de Dieu . les petits enfants
accordéon sans trace qui glanent dans les rues sans moisson de
Rio Mysore Srebrenica nul qui ne connaît ni ne connaîtra la pure
tendresse vivante aimante du Seigneur sur un autre rivage
Et la mélodie presque évanouie maintenant du solo
juste son doux frémissant écheveau d’archipels
juste walter johnson et les boys le soutenant dans ce
cercle et mariage de lumière
dans l’harmonie de tes accords . les pétales repliés de métal cuivré se
déploient sur le ténor tintant qui tombe en lentes spirales
de ton chant
& tombent ici tels des plumes de moineaux mélancolies
o mon amour
mais dressés encore dressés là d’où tu as été précipité
en bas des murs de pourpre & d’orgueil & firmament
les riches demeures-prisons où pixie et yeux multiples
dégringolent dans le grondement
de la marée d’épines et de rochers . et de détritus . trônes
trônes renversés d’une Babylone où tu de-
meures . souillé . ce furent tant d’après-midi de lynchage
étrange fruit gravé de solitaires crucifixion où sont systéma-
tiquement cassés mains et os catatoniques tant
de cordes de guitare cassées . un tel dégât essentiel
dans des salles de bain aux carreaux blancs des palais de la police – le sentimental balai de gomorrhe
dépasse . o Hawk louima lové. ton angoisse haïtienne brisée
°
avec ton frêle solo rageur
brûlant dans la lumière changeante de cette salle si bleue
si indigo
°
les plumes tom.bent vo.lent tom.bent é.chouent tom.
bent dans ce nouveau
monument new yorkais de froid mortel & aberfan
où tant de gloire est un coup
de dés . soleil
vert si vif que les ombres quand on marche dessus
sont épines rouges & brû.lantes & muharram
. tant tant d’enfants abikù & nés
avec la mort et leurs histoires en lambeaux perdues et non-dites
°
Ces enfants font | fils et mères |
cte bande avec toi | du monde trucidé |
mais leurs godasses | sans tête sans appui |
baillent et rient . vi- | sans abri les enfants de femmes |
dant sang | du IIImonde aban- |
dans le sol | donnés aux marches d’un hôpital |
brûlant | sur des trottoirs défoncés |
pleine loi pleine rancoeur | |
ô reviens Black Hawk | sur des sites |
reviens reviens | déconstruits sans lumière |
dans des brèches | |
monte | au pignon des palais |
le son noir plus fort | dans les feuilles de bananier |
qu’il laboure encore | bien en vue . la cabine |
des champs de patientes terrasses | de service de nos |
longs rugissements solitaires | voitures de chemin |
de maïs pour Ginsberg Whit- | de fer . dans des touffes |
man pour Hart | de roseaux sans |
Crane pour Louis Ornette tou- | joie . dans l’osier |
jours pour Rollins et pour | bien tressé |
Trane . pour vent pour | le corbillard de métal |
pièges pour tours tun- | dans le cheval de Troie |
nels sous blessures & sous terre | mental . trois cent |
et sous fleuve . esca- | cinquante hommes du feu |
liers se déver- | eux |
sant sans fin | mêmes de- |
dans le vide | venus feu . les machines |
sans issue sans sur- | de braise ardente de |
prenante échappée sans | leurs yeux hurlant |
grâce salvatrice | encore ishak me- |
pour tous les | shak et abednegro |
Αinsi vivons-nous maintenant
à l’intérieur de cet après-midi
crépusculaire . bonne
journée je répète
ne peut compenser mauvaise
nuit . nos dents ricanent
mordent
même des anges
impuissants dans ce
nouveau jardin
de poussière des
délices de la terre
les papiers dispersés
du plus haut monu-
ment du commerce
mondial . ces lettres
au soleil
des esprits
bric à brac blanc
des morts
des tours
oiseau pierre chair
passera sera pajarita
et de ce qui est encore à
dé-
faire dé-
faire
maintenant vo-
lant tristement par-
fois dou-
cement par-
fois chose
vertigineuse dans le tranchant soudain
de colombes
chauves dans la
lumière du ciel
comme des désastres
d’étoiles clignotantes
dans la vie
du bleu
°
tout comme toi
qui viens qui viens chaud konnu
comme à la fin de cette longue tension et palim
de ton chant
Et comme j’entre
dans le club
Rollins Scott
où tu as joué
ton destin
où tu te
dresses presque
dépouil-
lé de ton roy-
aume tré-
buchant d’abord dans de faux
arpèges de fausset
mais passant du bémol
au plein vol
du corps
du son
non plus tout seul
en quelque fiat
de pouvoir
perso
jouant
ta muse jusque au-
delà de la butte
du mo-
ment et mou-
vement du chant
dans la mé-
moire esprit
ailé de
la flûte
dans tes os
car aussi long-
temps qu’il y aura
ce tendre para-
chute
du blues
dans le(s) doux
saxophone(s)
de ton chant
il y aura
chant
il y aura
chanson
mais même si je dis toutes ces choses
écris ainsi de toi
revis et ressens et relève toutes ces choses
comme je dis
si proche de soi de moi-même que même ce
froid ou la chaleur de ces habits de douleur
et même si je vais écrire ceci en feu. par le feu. à travers la poussière du
désert de pas. dans le vortex de l’arche du tourbillon titanic
où ma manman se rappelle même pas mon nom
et je ne sais pas pourquoi ce riddim advient advient advient advient
ce que veut dire ce poème ce qu’il signifie une fois fait
quand viendra son temps d’oracle cercle et appel et je devrai affronter
la musique
devant toi et le lire tout haut tout seul
quand le sang dans la voix portée à tes oreilles
s’épandra en autant d’échardes autant de larmes si vainement répandues en mutilations si vainement partagées . constellations trop cruellement déplacées trop de minuits accordés au désastre
beauté cultivée en vases et sculptures . charismes électriques . céra-
miques écroulées . pouvoir pantocratique haletant sous la frise
et la vigne tombée enroulée autour du pilier de l’Empire Romain d’Occident
. où que je me tourne . j’entends le tonnerre .
si j’essaye de dormir . éclaboussures de fusillade et pillage . brises sul.furieuses
même si je vais en touche aux arbres noirs sycorax je sens qu’ils retiennent
le fruit qu’ils offrent encore offrant du sel avec les cendres sombre crispation du pétrole leurs fleurs de cerisier
portant les uniformes oranges de la souffrance entrevue
le long des barricades de brocart d’abugraib guantanamo thermopyles
wounded knee
la voix laborieuse à la radio demandant où sont les tulipes qui ouvriront la porte aux colombes tue tue tue tue
tortue tortuga torture pornographique
images d’Irak Afghanistan Cortez Conquistador
chevaliers d’armoiries en armure bulldozer sans amour revêtues de buffle
6000 milles de disparus . Chili . Incas . Tupac Amaru
les 6000 milles de la Grande Muraille de Berlin de Belleville-Barbade
de Chine
de Gaza Palestine aveugle dépossédée . contraintes immumuriales de la vie par delà la loi
où est la vérité l’honneur la beauté la perte brûlée au matin
où est l’ . où est l’ . où est l’amour
paisible comme à Koshkonong sur le lac de Black Hawk attendant le chant
de Lorine Niedeker vue par Cynthia Wilson
Hawk
dans un linceul de miroirs
hanté par ondées
fleurs tombant
longtemps avant son temps ici avenir
fulgurant
où il arrive
ce temps doré
précoce comme celui-ci
cet automne précoce de new york
frais le frais le clair les tours qui tombent
o laisse-moi
ma bien-aimée
aXe
aXe
àXé
°
devant ces mondes de fer de griffes tombant
je te perds
toi
à travers grilles brisées affaissées de tombes d’eau
je te perds
toi
ces mots pour des guerres souveraines
je te perds je te perds
toi
– même dans la tour en
feu de ce saxophone
o laisse-moi t’aimer t’aimer t’aimer o
redevenir grand & beau
que les mers se dérident & que la terre soit grain
les arbres patients ancêtres & que nos prières apportent la pluie
les histoires de tous ces autres peuples aussi cruels & aussi braves.
Ainsi si nous nous tenons par la main . chair
de chair déchirée sur os vivant . sous
la chair . le sang comme un gant roucoulant de frères et de sœurs
Ainsi si nous nous tenons par la main . accrochant
tout ce que nous sommes à tout ce que nous voudrions devenir
ton cœur & mon cœur
& mon cœur & ton cœur
& l’innocence de l’oiselet à jamais à jamais
enflammant le trébuchement de là où nous allons
réunissant la courbure de la vague de l’univers
cette chaîne d’esprits à l’exigence du bleu
cette clameur montante qui n’est que toi
associé par nos ouragans & rage de cœur
ce cercle auréole de miracle
où nous accédons
étraves
étoiles
lointains
voyages
silice tombe
comme tonnerre
dans vallées
sans forêts
angoisses de cataractes fluviales
fallujahs & leurs consolations
inondées d’argent
ombres de calices sans épi-
neux ni buissons
ombres projetées dans la mosquée
déchirée de Tombouctou
le vieux baobab impavide du Niger
presque muet à présent
les lamelles de clair de lune à Sind
feuilles douces du Rwanda les douces
rues de pluie balayant Londres
les hauts fantômes de verre
une fois de plus in memoriam manhattan des casuarines
cette cité finit
O filles
où commença son histoire son histoire commence
… ces eaux …
Ainsi
si je te tiens la main
tissu . doux . espoir . tenu le mal à l’écart en attente
& tu me tiens
la main
repos . repos . rose . proche de la fin du jour
& tu lui tiens
la main à elle
je ne veux pas y penser . si proche du jeu
des dunes
de mon cœur dans ta main
& ta main
dans sa main à lui
Danse Mona Lisa Danse
(si tu le veux)
& sa main à lui
est sa main à elle
et sa main exactement ton mal
dans son calice . acceptant ta souffrance
pluie drue implacablement pénitente
au nom du Seigneur des eaux calmes
dans les sombres feuilles les palmes de tes mains
où l’arbre de nos mains est pour tous
ô tendre vent de baume des champs
de canne au loin
vivace + vert + radiance
Que la paix soit . sur le pays
Que la paix soit . sur le pays
Hawk
dans un linceul de miroirs
hanté par ondées
chute de feuilles
longtemps avant son temps ici avenir
fulgurant
où il arrive
ce temps doré
précoce comme celui-ci
cet automne précoce de new york
arbres cédant leurs feuilles
si bien qu’enfin nous les rassemblons dans leurs messages
chuchotés leurs douces sorcelleries secrètes de salut
ne les perds plus jamais
ma bien-aimée
dans cette moiteur dans cette dureté dans cette douleur
dans ces chagrins
frais le frais le clair la chute des tours
o laisse-moi
ma bien aimée
dans ces braises manhattan de nos années
dans ce souvenir de nos peurs en averses impuissantes
si différent maintenant ce nouveau septembre de ces années
certaines vers la fin . certaines vers le début de leur longue gayelle
o yerri yerri yerri yarrow
o silence hâvre salut
ainsi laisse-moi
ma bien-aimée
t’aimer t’aimer t’aimer t’aimer
vivace + vert + doré
body
body & soul
- Traduction : Christine Pagnoulle et Annette Gérard
- Cette traduction fait partie d’une série de trois poèmes présentés par Christine Pagnoulle dans l’article Trois poètes, trois plaidoyers pour la paix (2021) :
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- HULSE Michael, La mère des batailles (1991) traduit de The Mother of Battle (Hull : Littlewood Arc, 1991) ;
- SCHWARTZ Leonard, Nouvelle Babel (2016) traduit de The New Babel in The Tower of Diverse Shores (Jersey City NJ : Talisman House, 2003) ;
- BRATHWAITE Kamau, Ark (2004) traduit de Ark (New York & Kingston : Savacou North, 2004).
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- STOKER : Dracula (ACTES SUD, Babel, 2001)
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