BAES : La petite fille au chou (1903)

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“Confronter ce tableau avec l’hyperréalisme des années soixante est  révélateur et perturbant. L’habileté, l’adresse et le talent des uns sont mis en brèche totale, grâce à une technique, un scénario et une mise en scène symbolique qui les supplante de loin.

La représentation picturale et sculpturale de l’hyperréalisme surpasse bien souvent l’effet photographique et le moulage le plus adroit. C’est cette qualité particulière qui nous fascine au delà des sujets proposés.

Le tableau de Firmin Baes (1874-1943) apparu récemment sur FaceBook vient s’ajouter à la multitude d’œuvres inconnues, débusquées par quelques amis connaisseurs. Cette reproduction partagée par Jeanne Ingrassia, ne fait que confirmer la torpeur culturelle qui frappe ceux qui devraient les révéler dans les musées, et en faire profiter la collectivité.

Paloma, la petite fille au chou, présente également dans d’autres tableaux, n’a rien à voir avec l’impressionnisme, tendance dans laquelle son auteur est curieusement embastillé. Ce parfait chef d’œuvre de petite taille (85 X 70,5 cm) peut rivaliser avec un énorme monceau d’œuvres contemporaines surcotées de valeur proportionnelle à leur banalité.

© Fondation de l’Hermitage, Lausanne

Ici tout est scénarisé de manière précisionniste dans le moindre détail. Le physique du modèle choisi, son âge, sa coiffure, la forme de son ruban, la couleur ses vêtements, le bout de dossier de chaise, rien n’est laissé au hasard.

L’énorme chou qu’elle protège des ses mains n’est pas seulement “l’origine du monde” façon jardinière. Il en est l’allusion sexuelle et cosmique, avec toute la force qui nous échappe et dépasse notre entendement. Les quelques feuilles fanées surjoue sa réalité symbolique. Le regard appuyé de l’actrice, la fraicheur de ses joues, défient un temps qui a mystérieusement rejoint le nôtre. Un temps où le réceptacle sacré de l’enfant est en passe de devenir un contenant passager.

L’histoire que nous confie Firmin Baes nous rappelle que l’art transmet aussi la vie et que sa poésie dépasse de loin ce que l’idéologie dominante et paresseuse voudrait nous imposer, sous prétexte facile, de modernité.

Conclusion, la petite fille au chou, c’est notre Mona Lisa à nous, même si tout le monde s’en fout.”

Jacques Charlier (07.2021)


Savoir contempler encore…