[NATIONALGEOGRAPHIC.FR, novembre 2019] Cette puissante classe sociale celte était une menace pour l’Empire romain avant d’être engloutie par le christianisme, mais leurs origines restent profondément enfouies dans les méandres du passé.
Les druides étaient-ils des prêtres pacifiques ou de dangereux prophètes ? Vouaient-ils un culte à la nature ou préparaient-ils une rébellion ? Nous ne savons pas grand-chose de cette ancienne classe sociale, mais ces lacunes n’ont jamais empêché les spéculations sur leur véritable nature.
Les premiers témoignages détaillés sur les druides remontent au premier siècle avant notre ère, mais il est probable que leur rôle particulier ait trouvé sa place dans les anciennes communautés de ce qui est aujourd’hui devenu la Grande-Bretagne, l’Irlande et la France bien avant cette date. Le témoignage en question provient d’une transcription latine du terme celtique désignant une classe sociale du peuple celte constituée de personnes dévouées à la prophétie et au rituel.
Étant donné que les Celtes avaient une tradition orale, tous les témoignages écrits concernant les druides provenaient de peuples tiers, notamment des Romains. Les druides “s’occupent des choses sacrées, ils dirigent les sacrifices publics et privés, et interprètent tout ce qui a trait à la religion”, écrivait par exemple Jules César en 50 avant notre ère, après avoir envahi la Gaule. L’empereur avait remarqué leur intérêt pour l’astronomie, l’éducation et la bravoure, ainsi que leur coutume de sacrifier leurs compatriotes gaulois pour s’attirer la grâce des dieux en mettant le feu à de gigantesques effigies humaines en osier où étaient enfermés des hommes vivants.
D’autres auteurs romains ont également été obsédés par l’amour que vouaient les druides au sang et à la mort. Pline l’Ancien évoquait par exemple le goût des druides pour le gui et le sacrifice humain. “Le meurtre d’un homme était pour eux un acte attestant de la plus grande dévotion”, écrivait-il, “et manger sa chair signifiait s’assurer une santé bénie des dieux”. Tacite a même fait état d’une bataille au Pays de Galles au cours de laquelle les druides “ont recouvert leurs autels du sang des captifs et consulté leurs dieux à travers des entrailles humaines.”
Ces dévots païens constituaient une menace existentielle pour les Romains, ces derniers craignaient le pouvoir exercé par les druides sur les communautés celtes conquises par Rome. Dans son livre, Jane Webster suggère que les visions apocalyptiques des druides ainsi que leurs rituels étaient perçus comme des actes de résistance par l’envahisseur romain qui s’est empressé d’éradiquer cette menace dès le commencement du règne d’Auguste, en 27 avant notre ère.
Les célébrations de l’équinoxe d’automne à travers le monde
Au premier siècle de notre ère, le christianisme commença à se répandre en France et dans les îles Britanniques et au fil des siècles de nombreuses traditions celtes tombèrent derrière son voile. Cependant, les druides continuèrent de faire des apparitions dans la littérature médiévale, ce qui laisse entendre que ces prêtres païens sont plus tard devenus des guérisseurs ou des magiciens. Pourtant, étant donné que nous ne disposons d’aucun témoignage écrit sur les Celtes du pré-christianisme, il est quasiment impossible de vérifier les revendications historiques au sujet des druides. Néanmoins, les druides sont revenus plusieurs fois sur le devant de la scène au cours des millénaires avec notamment une résurgence à l’époque romantique et une réincarnation au XIXe siècle sous la forme du néodruidisme.
Bien que, n’y voyant qu’une exagération de la réalité, les historiens aient fini par rejeter les allégations romaines sur les traditions religieuses prétendument brutales des druides, la controverse autour de leurs rituels macabres a refait surface en 1984. Cette année-là, un coupeur de tourbes avait déterré des restes humains dans le comté de Cheshire, en Angleterre, et sa découverte n’avait rien d’ordinaire : l’Homme de Lindow, comme il fut plus tard nommé, avait été conservé dans la tourbière depuis près de 2 000 ans. À première vue, il était devenu un ‘Homme des marécages’ après avoir été blessé à la tête, poignardé et étranglé avant d’être laissé pour mort dans ces environs marécageux. Son estomac contenait du pollen de gui, ce qui alimenta les spéculations sur sa possible mort lors d’un sacrifice pratiqué, peut-être, par des druides, ou sur le fait qu’il était lui-même un prince druide.
Il est tentant de spéculer sur la véritable nature des druides, mais puisque la plupart des connaissances au sujet de cette ancienne caste sociale émanent de sources secondaires, il est impossible de vérifier la plupart des affirmations. Même le terme en lui-même semble avoir été utilisé pour désigner de manière générale des hommes instruits, des philosophes, des professeurs ou des hommes pieux intéressés par la nature, la justice et la magie. Et l’archéologie n’a pas plus de réponses convaincantes à offrir. “À l’heure actuelle chez les archéologues, il n’existe pas de consensus pour faire le lien entre des preuves matérielles et des druides, même au sein d’un pays donné”, écrivait Ronald Hutton pour le magazine History Today. “Quel que soit le lieu, nous n’avons jamais déterré d’artefact qui ait fait l’unanimité au sein des experts comme relevant du druidisme.” Les druides ont toujours été entourés de magie et de mystère.
[d’après OLIVIERANDRIEU.FR] Tout d’abord, sachez qu’il n’a pas de nom ! Ses célèbres fondateurs, René Goscinny et Albert Uderzo, n’ont jamais estimé nécessaire de lui donner un patronyme. Et il en est donc ainsi depuis le début des aventures de nos héros gaulois. Ceci dit, on peut noter qu’il est le plus souvent appelé “village des fous”, dénomination péjorative notoirement d’origine romaine, sijenemabus.
D’ailleurs, si les grandes villes portaient un nom du temps de Vercingétorix (donc Lutèce et compagnie), rien ne prouve que de telles bourgades, même peuplées d’irréductibles guerriers nourris au grain et au sanglier, portaient un nom. Bref, historiquement, ça se tient. Et vous, comment l’appelleriez-vous si vous vouliez le baptiser ?
Une fois le sujet du “nommage” traité, penchons-nous donc sur son emplacement en regardant la célèbre image présente dans tous les albums. Vous connaissez certainement par cœur le célèbre texte en exergue de leurs aventures :
Nous sommes en 50 avant Jésus-Christ ; toute la Gaule est occupée par les Romains… Toute ? Non ! Car un village peuplé d’irréductibles Gaulois résiste encore et toujours à l’envahisseur. Et la vie n’est pas facile pour les garnisons de légionnaires romains des camps retranchés de Babaorum, Aquarium, Laudanum et Petibonum…
Un village breton…
Cette image nous donne un premier indice évident : le village se trouve en Bretagne. Ça, il n’a pas fallu 5 heures pour le trouver.
Lors de la création d’Astérix, René Goscinny et Albert Uderzo avaient parlé entre eux de la localisation du village. Goscinny voulait qu’il soit situé près de la mer pour que les héros puissent voyager par bateau si nécessaire. Uderzo, se souvenant de son enfance en Bretagne, l’a donc situé dans cette région.
On peut d’ailleurs avancer une troisième raison pour cette origine géographique. En effet, la famille du dessinateur est originaire d’Italie, et plus précisément de Vénétie (les environs de Venise, au nord-est de l’Italie, et notamment du village d’Oderzo, qui donnera son nom à sa famille). Or, les Vénètes, premiers habitants de cette région, ont également colonisé, bien avant l’époque d’Astérix, l’actuelle Bretagne. Une des tribus gauloises qui vivaient en Armorique à cette époque portait donc également, le nom de Vénètes. Ils ont d’ailleurs laissé leur patronyme à la ville de Vannes, dans le Morbihan. Albert Uderzo n’a peut-être fait que retrouver ses racines en situant le village en ces lieux. Il était un peu sur la terre de ses ancêtres, finalement…
Bien, nous sommes donc en Bretagne… Jusque là, tout va bien… Tentons de zoomer un peu plus…
Oui mézou en Bretagne ?
Et c’est là que ça se corse, comme dirait Ocatarinetabelatchitchix… En effet, de nombreuses localités, de Brest à Saint Malo, jusqu’à l’extrême nord de la France (si, si), ont proclamé se trouver à l’emplacement exact du village imaginé par les deux co-créateurs.
Le Cap d’Erquy, dans les Côtes-d’Armor, présente, de son côté, l’argument de ses trois petits îlets ressemblants comme… heu… trois petits îlets à ceux de la carte dessinée au début des albums. Quand on sait que le village d’Erquy est proche d’un lieu dénommé Le camp de César où des fouilles archéologiques ont décelé des traces du passage des romains et qu’Albert Uderzo avait coutume de s’y promener enfant, on peut effectivement constater quelques coïncidences troublantes, même si, du strict point de vue géographique, cette localité ne correspond pas à l’emplacement indiqué dans les albums.
En effet, en scrutant minutieusement les cartes proposées dans les albums d’Astérix, on peut situer le village dans un rayon de 50 kilomètres autour de Roscoff, dans le Finistère. Erquy, qui se situe plutôt à 150 kilomètres de cette ville, est donc trop éloignée pour être une hypothèse crédible (désolé pour cette ville où se tient, à ce qu’on m’a dit, un charmant salon de la BD chaque année que le covid veut bien nous laisser) […]
Alors, finalement ?
Bref, pour résumer tout cela, on ne sait toujours pas où se situe le village d’Astérix et finalement, n’est-ce pas mieux ainsi ? Et Albert Uderzo a toujours été très clair à ce sujet : s’il a choisi la Bretagne, aucun lieu spécifique ou précis n’a été décidé au départ ou ensuite de sa part ou de celle de son ami René. Le village fait donc partie de notre imaginaire collectif, et son emplacement géographique également. Ceci dit, de nombreux fans sillonnent encore la Bretagne à la recherche d’indices potentiels pour en trouver l’emplacement exact. Engagez-vous, rengagez-vous, qu’ils disaient, vous verrez du pays… Ce n’est pas faux… (…)
[d’après GEO.FR] En 51 avant J.-C, un an après la chute d’Alésia, cette citadelle nichée dans les massifs du Quercy a résisté pendant deux mois, avec une incroyable bravoure, aux légions romaines. Il faudra l’intervention de Jules César en personne pour en venir à bout.
“Nous sommes en 50 avant Jésus-Christ. Toute la Gaule est occupée par les Romains… Toute ? Non ! Un village peuplé d’irréductibles Gaulois résiste encore et toujours à l’envahisseur.” Le célèbre texte d’introduction des 38 albums de la bande dessinée Astérix n’est pas seulement une fiction.
René Goscinny et Albert Uderzo – mort en mars dernier [2020] – se sont inspirés, pour le village du petit gaulois, d’un épisode méconnu de l’histoire gallo-romaine : le siège d’Uxellodunum, en 51 av. J.-C. Un tournant majeur puisqu’il a marqué, un an après la bataille d’Alésia, la fin officielle de la résistance gauloise. Mais le “roman national”, appuyé par les historiens du XIXe siècle, a préféré retenir la capture de Vercingétorix, d’un symbolisme plus fort.
Un village dans le Quercy et pas en Bretagne
Ce village – situé en Bretagne dans les aventures d’Astérix – se trouvait en réalité au beau milieu du Quercy, dans l’actuel département du Lot. A l’origine de son acte de résistance, l’acharnement de deux guerriers qui avaient rejoint, en 52 av. J.-C, le chef arverne Vercingétorix à Alésia : Luctérios, un Cadurque (tribu originaire des environs de Cahors), et Drappès, un Sénon (peuple de la région de Sens, en Bourgogne).
La stratégie : attaquer pour mieux se défendre
Après la défaite contre Jules César, les deux rescapés scellèrent une alliance pour poursuivre la lutte contre l’imperator. Leur stratégie ? Attaquer pour mieux se défendre. Vaincus en territoire arverne, ils décidèrent de lancer une offensive plus au sud, sur la province de la Narbonnaise, occupée par les Romains depuis plus de cinquante ans. Mais l’attaque, révélée à l’ennemi par des déserteurs, avorta.
Poursuivis par les légions du légat Caninius Rebilus, un lieutenant de César, Lucterios et Drappès, accompagnés de 4 000 guerriers environ, se réfugièrent dans un oppidum situé sur leur route : Uxellodunum. Contrairement à la plaine d’Alésia, ce village, dont le nom celte signifie “forteresse élevée”, était protégé par les flancs escarpés des massifs du Quercy. Le lieu idéal pour résister à un siège.
Les Gaulois virent les légions romaines ériger trois camps sur les collines voisines afin de contrôler entrées et sorties. Forts de leur malheureuse expérience à Alésia, Luctérios et Drappès connaissaient l’importance du ravitaillement durant un siège.
Les Gaulois acheminent des centaines de kilos de vivres
Une nuit, accompagnés de plusieurs hommes, ils passèrent entre les mailles du filet romain pour s’approvisionner – notamment en blé – auprès des populations environnantes. Les Gaulois, plus nombreux au fil des semaines à sortir de la citadelle, acheminèrent ainsi des centaines de kilos de vivres.
Jusqu’au jour où ils furent attaqués par une légion. Luctérios parvint à s’échapper de justesse. Drappès, lui, fut capturé, ainsi que 2 000 de ses hommes. Uxellodunum se retrouva sans chef. Mais l’opposition des 2 000 autres guerriers, confinés à l’intérieur de l’oppidum, n’en fut que plus forte. D’autant plus que ces derniers avaient désormais assez de vivres pour tenir plusieurs mois !
Un puits naturel leur garantit une indépendance en eau
En outre, le site avait un autre avantage. “Au pied de ses palissades se tenait un puits naturel de 7 mètres de profondeur qui lui garantissait une indépendance en eau, absolument vitale dans cette région aride”, explique l’archéologue Jean-Pierrre Girault, auteur de La Fontaine de Loulié au Puy-d’Issolud. Le dossier archéologique du siège d’Uxellodunum (coll. Bibracte, 2013). A deux reprises, les Romains tentèrent de pénétrer dans l’enceinte. Sans succès.
Agacé, Jules César prend les opérations en main
Jules César, toujours présent en territoire arverne après sa victoire sur Vercingétorix, avait eu vent de cette poche de résistance. Agacé par les échecs successifs de ces hommes, le conquérant prit lui-même les opérations en main.
L’écrivain Alus Hirtius, auteur du dernier livre des Commentaires sur la guerre des Gaules sur les événements de l’année 51 av. J.-C, explique pourquoi César tenait tant à défaire les assiégés d’Uxellodunum. “Quoiqu’il méprise leur petit nombre, il pense qu’il faut sévèrement punir leur obstination afin que la Gaule entière ne croit pas que, pour résister aux Romains, ce n’est point la force qui manque, mais la constance”, écrit-il.
Un châtiment exemplaire pour servir de leçon aux Gaulois
En somme, Uxellodunum devait recevoir un châtiment exemplaire pour servir de leçon aux Gaulois désireux de poursuivre leur révolte. Arrivé sur place avec des légions supplémentaires – 30 000 hommes en tout – le stratège s’intéressa de près à un ruisseau bordant l’enceinte ouest. Dans cette région au climat aride, le conquérant comprit que l’eau serait un élément crucial.
Les bestiaux, les chevaux, les hommes meurent de soif
“Au lieu d’engager un combat frontal qui aurait été lourd en pertes humaines, il fit creuser, au milieu des pierres sèches des causses, des galeries souterraines afin de permettre à ses hommes d’accéder à la source d’eau pour la boucher”, raconte Jean-Pierre Girault. Sous les yeux des Gaulois, un mur en bois et plusieurs tours, dont une de 27 mètres de haut, furent dressées en quelques jours pour protéger les légionnaires. Les Romains parvinrent, non sans peine, à atteindre la source. Au fil des jours, le puits gaulois commença à se tarir… “Les bestiaux, les chevaux, les hommes même, en grand nombre, meurent de soif”, observa Alus Hirtius.
Les semaines s’écoulèrent dans un silence de mort. Dans un dernier geste désespéré, les hommes de Luctérios et Drappès, assoiffés, jetèrent des tonneaux incendiaires sur les constructions romaines. La plus grande tour brûla mais cette perte ne découragea pas pour autant les Romains pour qui la victoire était inéluctable. Affaiblis, les Gaulois finirent par se rendre.
César fit couper les mains de tous les assiégés
César, fidèle à la promesse qu’il avait faite à ses soldats, fit couper les mains de tous les assiégés en âge de porter des armes. Il les renvoya ensuite chez eux afin que les autres peuples gaulois connaissent le sort réservé à ceux qui osaient défier Rome.
Et les deux chefs ? Drappès se laissa mourir de faim tandis que Luctérios fut livré à César après avoir été capturé par un chef arverne, allié des Romains. Il fut exécuté. Quant à César, il prit possession de l’Aquitaine avant de retourner à Rome pour commencer une autre guerre, celle qui allait l’opposer au consul Pompée pour s’emparer du Sénat…
Pendant des siècles, Uxellodunum fut oubliée. Il aura fallu attendre le règne de Napoléon III, lecteur passionné des écrits de César, pour voir les premières fouilles archéologiques au milieu du XIXe siècle (…).