Carl Havelange est historien, photographe, maître de recherches au FNRS et enseignant en histoire culturelle à l’Université de Liège. Il s’intéresse tout particulièrement à l’histoire du regard et des cultures visuelles. Il est notamment l’auteur de “De l’oeil et du monde, une histoire du regard au seuil de la modernité” (Fayard, 1998). Désormais il travaille plus électivement, par le texte et par l’image, sur la question du portrait et ne cesse d’explorer les moyens d’une expression sensible où “arts” et “sciences” puissent pleinement s’accorder. (d’après LES IMPRESSIONS NOUVELLES.COM)
L’auteur dit du paysage qu’il “est le monde que le regard organise, un espace de projection ou peut-être d’imprégnation, zone franche, territoire d’indétermination où l’esprit bascule, un paysage est toujours silencieux, il est d’une éblouissante blancheur. Un paysage est l’endroit de la disparition, le théâtre d’anciennes opérations dont on voudrait garder la mémoire. On ne sait jamais pourquoi il inspire une telle tristesse ou alors une telle jubilation, un paysage n’existe pas.” (“Démesures du paysage”, Yellow Now, 2012)
Michel BEINE (né en 1967) enseigne en cours du soir à Saint-Luc Liège depuis 2004. Photographe-voyageur, il ne dévoile pas largement la réalité. Au contraire, il épure au maximum pour nous faire pénétrer dans des lieux à travers de multiples fragments qui sont autant de pièces d’un puzzle qui construisent une expérience de voyage. Ses images sont davantage des évocations que des illustrations, elles cachent plus que ce qu’elles montrent, laissant à l’imagination la liberté de construire ses pérégrinations. (d’après SPACE-COLLECTION.ORG)
“The Tangerinn” : cette photographie très frontale a été exposée à Huy au début de l’année 2015, accompagnée de textes d’Emmanuel d’Autreppe. Tangerinn… quelques secrets de famille proposait “des histoires de famille. Un secret, ou une infinité. (…). Une mémoire s’échange et se raconte, un puzzle s’ébauche (…) via quelques mots si communs – révélation, transmission, suggestion, trahison… – et à travers le vertige plat, silencieux d’images banales, mais à double fond.”
Nicolas BOMAL est né en 1974 dans la région du Centre, où les friches industrielles sont son espace de jeu et forgent les contours d’un imaginaire particulier. Cette errance affirmée dans le paysage, dont l’ambition est de rechercher des indices de l’habitus culturel d’un groupe ou d’une société, s’étend progressivement au-delà des frontières belges, notamment au Canada, en France, en Italie et en Albanie.
Cette photographie énigmatique joue sur un contraste de couleurs entre l’orange corrosion de la carcasse de voiture et le vert éclatant de la nature environnante. Sa thématique fait écho à une bonne part du travail de l’artiste, qui, comme dans la série “Middelland” (prix national Photographie Ouverte, 2003), présente une “errance affirmée dans le paysage, dont l’ambition est de rechercher des indices de l’habitus culturel d’un groupe ou d’une société donnée à travers l’espace, l’urbanisme et l’aménagement du territoire” [www.wbarchitectures.be].
Ivan Alechine (né en 1952), à la fois poète et photographe, est l’auteur d’une œuvre marquée par le voyage, tantôt ancrée dans le vrai, à la manière d’un reportage, tantôt détachée du monde comme une sorte de ready-made poétique. Fils du peintre Pierre Alechinsky, Ivan Alechine passe son enfance à côtoyer les derniers peintres et poètes surréalistes et les membres du groupe Cobra […]. A l’âge de dix-huit ans, il participe à une mission d’ethnomusicologie en plein cœur du pays Mongo, en République démocratique du Congo. […] Au seuil des années 90, ce sera la découverte décisive du Mexique où il résidera longuement, à plusieurs reprises, auprès des Indiens Huichols. « La première fois que je suis allé à Tuxpan de Bolaños, c’était en 1995. Puis beaucoup entre 2011 et 2016. J’y retourne à la fin de cette année (2017). J’ai assisté à quasiment toutes les cérémonies importantes et je dois posséder quelques milliers de photographies digitales / numériques en couleur ».
“La photo de La jeune femme et l’enfant a été prise en 2012 dans le bourg de Tuxpan de Bolaños, Etat de Jalisco, Mexique. Tuxpan de Bolaños est l’un des quatre bourgs importants appartenant à aux Huichols, lointain cousins des Aztèques. Les Huichols sont aujourd’hui entre 35 et 40 000. Nous sommes dans la Sierra Madre Occidentale. Les Huichols sont très religieux, malgré la pression économique qui les déstabilise. J’ai connu Tuxpan de Bolaños en lisant les travaux de l’anthropologue Robert M. Zingg qui y séjourna une année complète en 1933.“
Se reconnecter à la Nature est indispensable et la Wallonie a le privilège de disposer de vastes espaces boisés à explorer. Ce livre de 2013, illustré de magnifiques photos, est une invitation à prendre le temps d’admirer des arbres remarquables de nos contrées. Les histoires liées à ces derniers sont souvent étonnantes à découvrir.
Benjamin STASSEN, artiste photographe d’Ellemelle (BE) est né en 1959. Il commente la philosophie qui guide son travail depuis de nombreuses années [source : site de la Fête des Arbres à Esneux, BE, en 2005] :
« Les arbres constituent un patrimoine paysager, historique et écologique de toute première importance », affirme Benjamin Stassen. « On me dit souvent que je ne m’intéresse qu’aux arbres, mais à travers les arbres on peut toucher à tous les segments de l’histoire, de la vie contemporaine et même de l’avenir. J’ai une passion particulière pour les arbres parce que je suis un nomade, qu’il faut que je bouge et que je m’aventure… J’ai ce côté imaginatif, je suis un promeneur qui veut, non seulement préserver ce qui est, mais aussi ajouter de la vie… Je veux encourager la plantation d’arbres, de haies, même si c’est beaucoup de boulot dans nos parcs et dans nos jardins. » Heureusement, cette perte de repères dont pâtit notre environnement naturel est relativement récente. Globalement, le Wallon s’est détourné de ce qui est proche de lui, de ce qui est immédiat, de ce qui est tangible. « On vit, de plus en plus », regrette Benjamin Stassen, « dans une société qui privilégie le virtuel, le lointain, l’immatériel… Bref, l’imaginaire, mais dans ce qu’il a de plus creux, de plus impersonnel et de plus ‘marchandisé’. C’est une tendance qui me dérange profondément. Ce qui me touche, c’est de rencontrer quelqu’un, dans un village, qui peut, si je lui pose la question, me raconter une anecdote à propos de tel ou tel endroit que je recherche. Cela devient rarissime. Les villages se vident des populations anciennement établies ; elles sont remplacées par un essaimage urbain, à l’encontre duquel je n’ai d’ailleurs aucun grief particulier à formuler, si ce n’est qu’il accentue une désappropriation de ce qui est pourtant proche de nous et qui nous appartient, toutes choses que nous avons la responsabilité de protéger, de préserver et de transmettre. »
Pourquoi pas découvrir son livre à l’ombre d’un arbre ?
Une brève biographie accompagnée d’une bibliographie de Benjamin STASSEN est documentée par le Service du Livre Luxembourgeois (province du Luxembourg belge) : “Benjamin Stassen se consacre la connaissance et la protection des arbres exceptionnels de Wallonie depuis près de 20 ans. Fondateur de l’asbl Le Marronnier en 1989, il écrit et photographie en autodidacte, une passion pour les mots et l’image qui lui a valu l’appui de la Fondation belge de la Vocation et de la Fondation Spes.“
“Reposant sur plus de mille peintures, illustrations, photographies et objets répartis sur six siècles d’histoire au creuset de tous les empires coloniaux, depuis les conquistadors, en passant par les systèmes esclavagistes, notamment aux États-Unis, et jusqu’aux décolonisations, ce livre s’attache à une histoire complexe et taboue. Une histoire dont les traces sont toujours visibles de nos jours, dans les enjeux post-coloniaux, les questions migratoires ou le métissage des identités. C’est le récit d’une fascination et d’une violence multiforme. C’est aussi la révélation de l’incroyable production d’images qui ont fabriqué le regard exotique et les fantasmes de l’Occident. Projet inédit tant par son ambition éditoriale, que par sa volonté de rassembler les meilleurs spécialistes internationaux, l’objectif de Sexe, race & colonies est de dresser un panorama complet de ce passé oublié et ignoré, en suivant pas à pas ce long récit de la domination des corps.” (source : association de libraires INITIALES.ORG)
BLANCHARD Pascal et al., Sexe, race et colonies : la domination des corps du XVe siècle à nous jours (Paris, La Découverte, 2018)
“Montrer. Voila l’ambition de cet ouvrage, de cette somme iconographique vertigineuse autant que méconnue, ou mal vue. Car on a tous en tête des représentations érotisées de corps indigènes. Elles sont furtives, elles font partie de l’imaginaire historique colonial. Mais mesure-t-on véritablement ce qu’elles portent, ce qu’elles signifient, la violence qu’elles légitiment toutes, à des niveaux différents certes, mais qui toutes cultivent l’idée originelle du colon qui voudrait que le corps du colonisé soit “naturellement offert”, pour citer les auteurs de ce livre colossal et indispensable. N’est-ce pas ainsi que nombre d’intellectuels européens ont envisagé le sulfureux érotisme oriental ? Ou comment la vahiné polynésienne a constitué jusqu’à récemment un modèle de beauté féminine ?
Ainsi, encore aujourd’hui, il fallait montrer. Pour tous ceux qui pourraient douter du fait que la domination des empires sur les peuples conquis s’est exercée premièrement à un niveau sexuel. Pas de manière secondaire ou marginale, mais massivement et prioritairement à un niveau sexuel. Si depuis sa sortie, cet ouvrage a essuyé critiques et doutes, c’est bien parce que la frontière est ténue entre la monstration et l’exhibition, surtout quand on parle de sexe. Est-ce que les auteurs sont parvenus ici à faire oeuvre de mémoire sans verser dans l’exhibitionnisme? C’est notre opinion. Et c’est notamment l’ampleur du travail et la qualité de l’appareil critique qui font toute la différence.
Car ce livre est énorme, il a la forme de son ambition, et retrace en quatre grandes parties, Fascinations (1420-1830), Dominations (1830-192o), Décolonisations (1920-1970), Métissages (depuis 1970), l’évolution, si tant est qu’il y en ait eu-une, de la représentation des peuples des colonies par les colons. Certaines images sont dures, insoutenables certes, mais leur publication est indispensable. Comment en effet penser aujourd’hui un phénomène de prise de conscience comme #MeToo et oublier que des systèmes de domination, réelle et symbolique, ont des racines solidement ancrées dans nos imaginaires ?“
“Dans un film sur Gauguin, le réalisateur Edouard Deluc passe sous silence la nature des relations sexuelles de l’artiste à Tahiti. Et révèle la difficulté des Français à penser la violence dans leurs anciennes colonies.
L’image est si sauvagement excitante. Une Tahitienne danse seins nus, lascive, devant un grand feu, tandis que résonne le chant envoûtant de la tribu. Cette femme aux formes pleines, c’est Tehura. Dans son film Gauguin – Voyage de Tahiti, le réalisateur Edouard Deluc nous raconte comment elle a hypnotisé le peintre français et inspiré quelques-unes de ses plus belles toiles. On les voit tous deux enlacés sur un cheval, jouant sur une plage, et fatalement faisant l’amour à la lumière des bougies.
Ce film pourrait être un biopic convenu de plus consacré aux maîtres de la peinture, mais des ellipses opportunes dans le scénario en font une œuvre au mieux incroyablement maladroite, au pire parfaitement abjecte. Car, ce que cette histoire ne dit à aucun moment c’est que Tehura (qui s’appelait aussi Teha’amana) avait seulement 13 ans lorsque Gauguin (alors âgé de 43 ans) la prit pour « épouse » en 1891.
GAUGUIN Paul, Manao Tupapau (1892)
Et malgré ce que pourrait laisser croire le biopic, elle ne fut pas la seule à partager la vie de l’artiste dans l’île : il y eut aussi la jeune prostituée métisse Titi, ainsi que Pau’ura et Vaeoho (toutes deux 14 ans). Enfin, dernier « oubli », le maître était atteint de syphilis, maladie sexuelle potentiellement mortelle, qu’il distribua généreusement à Tahiti. Dans le film, Gauguin se voit seulement diagnostiquer un méchant diabète… on en pleurerait de rire si ce n’était aussi grave…”
Lire la suite de l’article de Léo PAJON, La pédophilie est moins grave sous les topiques, sur JEUNEAFRIQUE.COM (21 septembre 2017)
Le cas Malko Linge, dit SAS ?
ISBN 2842672968
«Bicuzi Kihubo avait la cervelle d’une antilope, mais une allure de star. Ses grands yeux marron illuminaient un visage doux, encadré par les tresses traditionnelles, ses seins moulés par un tee-shirt orange pointaient comme de lourds obus ; quand à sa chute de reins, elle aurait transformé le plus saint des prélats en sodomite polymorphe… Ses hanches étroites et ses longues jambes achevaient de faire de Bicuzi une bombe sexuelle à pattes.» Les connaisseurs auront sûrement reconnu dans ce portrait d’Africaine torride, le style particulier de Gérard de Villiers, passé maître du roman d’espionnage à forte connotation érotique à travers la série des SAS. Les scènes de sexe, tout autant que la vraisemblance d’intrigues construites à partir d’infos recueillies sur le terrain, expliquent le succès et la fortune de l’auteur, mort en 2013 après avoir vendu plus de 150 millions de livres.
Romans de gare machistes qui confinent les personnages féminins à des objets sexuels culbutés dans tous les sens par Son Altesse Sérénissime le prince Malko Linge, héros de la série ? Peut-être. Mais à relire les descriptions de certaines de ces ‘bombes sexuelles sur pattes’, pin-up systématiquement moulées dans une ‘microjupe’, difficile de ne pas y voir une illustration de la permanence des clichés qui s’attachent singulièrement aux femmes noires et qu’on retrouve dans l’immense somme consacrée à la Domination des corps du XVe siècle à nos jours publiée jeudi sous la direction de l’historien Pascal Blanchard. L’ouvrage Sexe, race et colonies ne se limite certes pas aux femmes noires et dresse un panorama exhaustif de l’image du corps de l’Autre, de l’Afrique coloniale (Maghreb inclus) jusqu’à l’Asie et au monde amérindien.”
Lire la suite de l’article de Maria MALAGARDIS, Les femmes noires comme incarnation forcée du corps de l’Autre, sur LIBERATION.FR (21 septembre 2018)…
Le Centre d’Art Contemporain du Luxembourg Belge écrit : “Les photographies de Jean-Jacques Symul dépassent les anecdotes locales pour devenir des évocations intemporelles, elles ne sont plus l’indice d’un site donné, mais l’évocation de tous les lieux possibles et la condensation lente des souvenirs qu’ils peuvent faire naître.“
Jean-Jacques SYMUL est né à Liège en 1952. Dès 1984, il enseigne la photographie à l’Académie des Beaux-Arts de sa ville. Il a bénéficié de plusieurs expositions personnelles et figure dans diverses collections publiques… Il vit aujourd’hui à Xhoris, sur la commune belge de Ferrières.
“Du 10 novembre 2018 au 13 janvier 2019, les Territoires de la Mémoire accueillent la 61e édition de l’exposition du prix World Press Photo à La Cité Miroir à Liège. Ce concours prestigieux de photojournalisme est une vraie fenêtre sur le monde contemporain et toutes ses réalités. Impressionnantes, interpellantes, les 160 photos présentées nous dévoilent un instantané du monde tel qu’il est aujourd’hui.
Le concours annuel récompense des photographes professionnels pour leurs meilleurs clichés et leur contribution au photojournalisme. Les clichés présentés nous plongent au cœur d’actualités fortes de 2017 comme la guerre en Syrie, le massacre des Rohingyas au Myanmar ou les manifestations clivantes au Venezuela. Mais elles nous montrent aussi nombre de réalités contemporaines sur les modes de vie dans le monde, notre environnement ou encore nos sociétés. Ces images nous racontent des histoires poignantes où la vie est tantôt tragique, tantôt terrifiante mais aussi pleine d’espoir, de complicité et d’humanité.
Le prix World Press Photo est aujourd’hui une institution au niveau mondial et un rendez-vous annuel attendu. En 1955, un groupe de photographes néerlandais a lancé ce concours dans le but de montrer leur travail à un public international. Depuis, la World Press Photo Foundation a acquis une renommée mondiale et prestigieuse. Très impliquée dans le développement du photojournalisme, elle propose un concours annuel, ouvert à tous, qui incarne un événement devenu majeur au sein de la profession de journaliste et de photographe. Les photos de presse des lauréats sont choisies pour leur justesse et le message qu’elles délivrent sur le monde dans plusieurs catégories (environnement, sports, actualités, nature, populations, etc). Elles acquièrent toutes, ou presque, le statut d’icônes et elles sont relayées par les médias du monde entier. L’exposition voyage ainsi dans 45 pays et elle est visitée par près de 4 millions de visiteurs chaque année.
Par le biais de cette exposition d’envergure, les Territoires de la Mémoire participent à interroger la réalité d’aujourd’hui avec ses conflits, ses injustices sociales mais aussi ses solidarités et ses humanités. World Press Photo questionne la liberté de la presse, la mission des images et des journalistes face à ces différentes problématiques. Elle appelle surtout tout un chacun à s’informer et, surtout, à s’indigner face aux violences et aux atteintes aux droits humains…”
2 janvier 1945. Dans une rue de La Gleize (BE) des réfugiés belges attendent d’être transportés en dehors de la ville déchirée par la guerre (c) Peter J. Carroll / AP /Photo colorisée par Sanna Dullaway pour Time Magazine
“Une série de photographies aujourd’hui colorisées montre le voyage de réfugiés… français, allemands, belges ou encore polonais fuyant les horreurs de la guerre.
C’est un retour de près de sept décennies en arrière. Entre 1939 et 1945, plus de 60 millions d’Européens furent forcés de quitter leurs foyers, pour fuir les horreurs de la guerre. Un peu plus de soixante-dix ans plus tard, les destins tragiques des centaines de milliers de réfugiés originaires d’Afrique et du Moyen-Orient, qui tentent de rejoindre l’Europe depuis quelques années, nous conduisent à remonter le temps.
C’est pour cela que Time Magazine a commissionné la photographe Sanna Dullaway pour coloriser des clichés historiques montrant des réfugiés européens de la Seconde Guerre mondiale, en provenance de France, de Pologne, d’Allemagne ou de Belgique, pendant leur voyage vers l’Est et le Sud.
Janvier 1945. Des réfugiés belges fuient avec tous leurs biens devant les avancées de l’armée allemande. (c) Allan Jackson / Keystone / Hulton Archive / Getty Images
Comme le rappelle le Washington Post, le Royaume-Uni avait mis en place en 1942 la MERRA (Middle East Relief and Refugee Administration), qui permit à 40 000 européens de s’établir dans des camps de réfugiés en Syrie, Égypte et Palestine. Une histoire méconnue qui éclaire les épreuves de celles et ceux qui veulent de nos jours faire le chemin inverse…”
“Raoul UBAC, de son vrai nom Rudolf Gustav Maria Ernst Ubac, est né en 1910 à Cologne (DE) où il vit durant sa prime enfance. En 1914, sa famille s’installe à Malmedy (Hautes-Fagnes, BE) où son père vient d’être nommé juge de paix. Durant sa scolarité à l’Athénée de Malmedy, Raoul Ubac envisage son avenir en tant qu’agent des eaux et forêts (garde forestier). Raoul Ubac se sent proche de la nature. Entre 1927 et 1930, il entreprend de nombreux voyages pédestres en Europe. Mais lorsqu’il découvre, grâce à un professeur, le Manifeste du Surréalisme d’André Breton, il change ses ambitions et s’inscrit dès 1930 en faculté de lettres à la Sorbonne (Paris, FR). Il rencontre dans la capitale française le groupe des artistes surréalistes et fréquente le quartier de Montparnasse. Lors d’un de ses voyages en Dalmatie (région de Croatie), Ubac assemble des pierres trouvées et les photographie. Ce premier acte artistique marque le début de sa carrière. A son retour, il s’inscrit à l’École d’Arts Appliqués de Cologne pour y apprendre le dessin et la photographie. Il expérimente de nouvelles techniques photographiques et expose pour la première fois le résultat de ses recherches à Paris, en 1933. Jusqu’à la fin de cette décennie, Ubac va s’impliquer dans le groupe surréaliste ; ses photographies sont publiées dans la revue surréaliste « Minotaure » et il participe à l’exposition internationale du surréalisme en 1938. Durant le second conflit mondial, Ubac se réfugie à Carcassonne située en « zone libre » française. Il s’éloigne peu à peu du mouvement surréaliste et réalise de nombreux dessins dits Les objets les plus simples. Ces travaux montrent des natures mortes de pain, couteaux, fruits. Mais l’événement qui marquera un tournant décisif dans l’œuvre de Raoul Ubac, c’est son voyage en Haute-Savoie en 1946. Il y ramasse une ardoise et entreprend de la graver avec un clou. Cet événement qui pourrait être anecdotique, va pourtant déterminer le reste de sa carrière puisque c’est suite à cette nouvelle rencontre avec la nature qu’Ubac se lance dans le travail de taille d’ardoise qu’il poursuivra jusqu’à la fin de sa vie. Durant la même période d’après-guerre, l’artiste se lance aussi dans des recherches sur la forme et la couleur. Peu à peu son travail tend vers le non-figuratif, vers l’art informel. Fin des années 1950, il quitte Paris et s’installe à Dieudonné (dans l’Oise, France) où il travaillera jusqu’à la fin de ses jours en 1985. Engagé à 100% dans son travail, sa manière se simplifie de plus en plus. Parfois proche des Arts primitifs, cet artiste méditatif a parfois été rapproché du mouvement CoBrA (il participe en 1951 à l’exposition CoBrA de Liège) […]”
Couverture du Time Magazine du 2 juillet 2018 (c) Time – John Moore – Getty Images
“John MOORE, a Pulitzer Prize-winning photographer for Getty Images, has been photographing immigrants crossing the U.S.-Mexico border for years. This week one of his pictures became the most visible symbol of the immigration debate in America.
“This one was tough for me. As soon as it was over, they were put into a van. I had to stop and take deep breaths,” Moore told TIME Tuesday, describing his reaction to the scene of a two-year-old Honduran girl crying as her mother was being detained in McAllen, Texas. “All I wanted to do was pick her up. But I couldn’t.”
(c) John Moore – Getty Images
Due to the power of the image, which appeared as critics from across the political spectrum attacked President Trump’s now-reversed policy of separating children from parents who are being detained for illegally entering the United States, TIME’s editors selected Moore’s photograph to create a photo illustration, including Trump, to make the July 2, 2018, cover of the magazine.”
Découvrir la galerie des photos prises par John Moore lors de ses reportages sur l’immigration d’Amérique latine vers les USA sur REPORTAGESBYGETTYIMAGES.COM
(c) HAUSMANN Raoul : sans titre (Vera Broïdo, 1931)
“Raoul HAUSMANN est né à Vienne, le 12 juillet 1886. Son père, peintre de tradition académique, est à l’origine de la première formation artistique de son fils. En 1900, la famille s’installe à Berlin où Raoul débute des études de peinture et de sculpture. Il se marie en 1908, avec la violoniste berlinoise Elfriede Schaeffer dont il a une fille, Véra, en 1907.
Très marqué par la grande Exposition Futuriste et le premier salon Sturm (salon expressionniste) qui ont lieu à Berlin en 1912, Raoul Hausmann prend conscience que l’esthétique conventionnelle ne peut traduire les émotions liées au monde moderne de ce début de siècle.
Au début de la première guerre mondiale, Hausmann fait la connaissance d’Hannah Höch, elle aussi artiste, avec laquelle il aura une liaison passionnelle et particulièrement fertile sur le plan créatif, jusqu’en 1922. Connaissant déjà Johannes Baader depuis 1905, il rencontre également à Berlin Hans Richter et Emmy Hennings. En 1916, il collabore aux revues Die Aktion et Die Freie Strasse. Depuis 1914, la guerre fait rage, le germe de la rébellion et de la contestation touche ces jeunes artistes, futurs protagonistes du mouvement Dada.
Dada
Le mouvement Dada naît en 1916, à Zurich, autour de l’écrivain et poète Hugo Ball, et réunit Marcel Janco, Tristan Tzara, Jean Arp, bientôt rejoints par Richard Huelsenbeck, Hans Richter, Sophie Taeuber et Emmy Hennings. En 1917, Huelsenbeck quitte Zurich et introduit Dada à Berlin. Il fonde le Club Dada en 1918 avec Raoul Hausmann, Johannes Baader, Franz Jung, George Grosz, Hannah Höch et les frères Herzfelde. C’est l’époque d’une collaboration intense et complice entre Hausmann et Baader et de la création de la revue Der Dada, dont Raoul Hausmann dirige les trois numéros entre 1918 et 1920. Il publie également Material der Malerei, Plastik, Architektur.
A Berlin, le groupe Dada est nettement plus politisé qu’à Zurich, restée ville neutre pendant la première guerre mondiale et dans laquelle règne un climat de paix. A l’opposé, Berlin, en 1918, est une ville déstabilisée par les grèves et les soulèvements populaires qui connaît une véritable révolution menée par les spartakistes. Durant cette période, Hausmann est l’un des plus ardents parmi les militants dadaïstes. Au sein du Club Dada, il est le Dadasophe : brillant théoricien et redoutable polémiste, il est également un créateur fertile au travers de ses collages, ses assemblages, ses photomontages, ses photogrammes et ses poèmes phonétiques.
L’œuvre la plus marquante de Raoul Hausmann est un assemblage, réalisé en 1919 et, aujourd’hui, exposé au Musée national d’art moderne de Paris : l’Esprit de notre temps ou Tête mécanique. Cet assemblage autour d’une petite tête de bois est une critique de la société, de l’homme-machine. “Penser comme une machine”, tel était, selon Hausmann, le principal défaut de ses contemporains. La première Foire Internationale Dada, Dada Messe, a lieu en 1920 à Berlin. Elle est considérée comme l’apogée du mouvement mais également l’événement qui précipite sa chute : un procès pour insulte à l’armée condamnera les organisateurs. Manifestation incontournable dans l’histoire de Dada, elle présente les œuvres de ses principaux membres et révèle, en particulier, les photomontages et collages de Raoul Hausmann et Hannah Höch.
En février 1921, Raoul Hausmann publie dans la revue De Stijl son manifeste Présentiste et Dada ist mehr als Dada (Dada est plus que Dada). Ces articles mettent fin à l’aventure Dada de Berlin. L’épisode berlinois, d’une courte durée, aura marqué de manière indélébile l’histoire de l’art du XXe siècle en créant et diffusant de nouveaux procédés et concepts artistiques.
Pour Raoul Hausmann, l’aventure post dadaïste continue. Il s’engage dans Merz aux côtés de son fondateur Kurt Schwitters (Merz est un groupe proche de Dada fondé par Schwitters après que Huelsenbeck ait refusé son intégration au Club Dada). Raoul Hausmann, Hannah Höch et Kurt Schwitters organisent la tournée Antidada-Merz-Presentismus à Prague.
En 1922, Raoul Hausmann divorce d’avec Elfriede et se sépare d’Hannah Höch. En 1923, il se marie avec Hedwig Manckiewitz. Par ailleurs, il commence à s’intéresser aux possibilités offertes par les nouvelles technologies optiques. Il est proche d’Hans Richter, Viking Eggeling et Moholy Nagy qui travaillent sur l’image photographique et cinématographique. En fin d’année 1923, il donne à Hanovre, une Matinée Merz avec Kurt Schwitters.
Raoul Hausmann (1929) (c) August Sander (http://www.tate.org.uk/art/work/AL00042)
Au fil du temps, Hausmann s’éloigne de son complice berlinois, Johannes Baader. Il contribue par ses articles à de nombreuses revues et rédige des conférences pour la radio. Il débute la photographie en 1927 et rencontre, en 1928, Vera Broïdo, fille de révolutionnaires russes et écrivain, avec qui il vivra, en compagnie de sa femme, jusqu’en 1934. Leur vie se partage entre Berlin, Kampen, sur l’île de Sylt en mer du Nord, et un petit village de pêcheurs sur la mer Baltique, Jershöft, où Hausmann réalise de nombreuses photos. En 1931, il participe à l’exposition Fotomontage organisée par César Domela à Berlin et prononce la conférence inaugurale. Il s’engage pleinement dans l’art photographique qu’il récusait pourtant, dix ans auparavant, dans son manifeste : Nous ne sommes pas des photographes.
L’exil
En 1933, déclaré “artiste dégénéré” par les nazis, Raoul Hausmann est contraint de quitter l’Allemagne et fuit Berlin pour l’Espagne, en compagnie d’Hedwig Manckiewitz et de Vera Broïdo. Commence alors un long voyage d’environ six années à travers l’Europe, durant lequel il séjourne consécutivement à Ibiza, Paris, Ibiza, Zurich, Prague (où il fait des essais de photographie infrarouge), puis à nouveau Paris (où il se lie à de nombreux artistes de l’entre-deux-guerres). Chaque étape, riche en créativité, essentiellement photographique, est suivie de publications et d’expositions. Lors de son séjour à Paris, à l’été 1939, l’approche de la guerre, les origines juives de sa femme et l’insécurité liée à son statut d’immigré vont précipiter son départ en zone libre. Le Limousin sera son refuge. Il s’installe avec Hedwig, à l’automne 1939, à Peyrat-le-Château où il donne, pour subsister, des leçons d’allemand, d’anglais et d’espagnol. C’est là qu’il rencontre Marthe Prévot qui partagera la vie du couple jusqu’à leur mort. Eté 1944, Raoul Hausmann déménage à Limoges, et, en dépit d’importantes difficultés financières et matérielles, se concentre sur son travail.
L’après-guerre
A partir de 1946, Hausmann, isolé, renoue avec ses amis d’avant-guerre. Une correspondance importante s’établie alors avec Laszlo Moholy-Nagy et Kurt Schwitters. Toutefois, leurs décès respectifs en 1946 et 1948, annulent tout espoir de réaliser un jour les projets qu’ils avaient ébauchés ensemble. A cette époque, Raoul Hausmann revient à l’expérimental de l’entre-deux-guerres et débute une activité artistique foisonnante dans les domaines de la photographie, de la peinture, du collage et de l’écriture. En 1954, il participe au mouvement de la Subjektive Fotografie animée par Otto Steinert.
Le retour à la peinture
Après la guerre, sans jamais avoir cessé de dessiner, Raoul Hausmann se rapproche alors de la peinture par des œuvres sur papier, exécutées à l’aquarelle et à la gouache. En 1959, il revient à la peinture à l’huile qu’il avait abandonnée en 1915, en réaction à l’influence expressionniste. Il cesse définitivement son travail à l’huile en 1964, laissant ainsi une centaine de toiles. En revanche, il continue de peindre à la gouache, jusqu’en 1968.
Parallèlement, il réalise quantité de collages, jouant non seulement avec la couleur des éléments déchirés mais également avec la sensation qu’ils procurent au toucher. Le dernier apport de ce créateur boulimique sera probablement l’invention du collage-tactile.
Hausmann ne délaisse pas l’écriture et la poésie. Entre 1957 et 1970, il rédige onze ouvrages mêlant toutes les facettes de son art, des poèmes illustrés de bois gravés jusqu’à un ouvrage sur la mélanographie (la transformation photographique d’objets), mais également des travaux de réflexion sur le mouvement Dada et le monde moderne. Il meurt le 1er février 1971 à Limoges.”
Masao YAMAMOTO est né en 1957 au Japon ; initialement peintre, il est aujourd’hui photographe indépendant : “aux antipodes d’une photographie frontale aux grands formats qui s’imposent au spectateur, Yamamoto développe depuis vingt ans une oeuvre discrète qu’il faut approcher pour en saisir la finesse et la subtilité.”
“Ses images sont comme des fragments de vie à jamais indéchiffrables, éclairs de grâce comparables à des haïkus. Ses tirages, de petits formats qu’il réalise lui-même avant de les patiner et de les user, ont fait l’objet de nombreuses expositions.”
(c) Yamamoto Masao
Découvrir le travail de l’artiste sur son site officiel YAMAMOTOMASAO.JP ou, pour les férus du clic droit, quelques autres photographies téléchargeables sur CAMERALABS.ORG…
(c) Yamamoto Masao
Ses oeuvres sont exposées à l’international : Harvard University Art Museums (Cambridge, US), Philadelphia Museum of Art (Philadelphia, US), Museum of Fine Arts (Houston, US), The International Center of Photography (New York, US), Center for Creative Photography (CCP, Tucson, US), Princeton University Art Museum (Princeton, US), …, Victoria & Albert Museum (London, UK), Maison Européenne de la Photographie (Paris, FR), Quinzaine photographique (Nantes, FR), Musei Civici Comune di Reggio Emilia (IT), Forum für Fotografie (Köln, DE), Fondation d’entreprise Hermès (Paris, FR), Art at Swiss Re (Zurich, CH)…
Simone de Beauvoir à son bureau en 1953• Crédits : Keystone-France/Gamma-Keystone – Getty
“La comédienne et metteur en scène Anne-Marie Philipe prépare un spectacle à partir des correspondances de Simone de Beauvoir. Le spectacle a déjà été donné au printemps à Deauville, et doit arriver à Paris à l’automne, au théâtre des Mathurins. Trois comédiennes différentes joueront trois tranches épistolaires dans la vie amoureuse de Simone de Beauvoir. L’une d’elles, Camille Lockhart, a poussé un coup de gueule sur Facebook ce mardi matin en sortant de répétition : elle affirme sur le réseau social que le groupe JC Decaux, qui gère notamment l’affichage dans le métro, sur les kiosques à journaux et les fameuses “colonnes Morris”, a décidé de déprogrammer la campagne de promo du spectacle…”
“Sur Facebook, une comédienne s’est révoltée contre JC Decaux. L’entreprise aurait selon elle censuré, dans le métro et sur les colonnes Morris, une affiche de spectacle représentant l’auteur du Deuxième Sexe nue et de dos. Le groupe d’affichage publicitaire dément.
Quelle ironie. Une affiche représentant l’auteur du Deuxième Sexe et figure du féminisme français serait censurée dans les rues de Paris. C’est du moins ce que dénonce Camille Lockhart, comédienne dans le spectacle Les correspondances amoureuses de Simone de Beauvoir, axé sur les liaisons de celle que l’on surnomma, après Sartre, le Castor et devant se jouer à Paris en septembre…”
Elle a pris une douche. J’avais 27 ans, elle en avait 39. J’ai pris mon appareil photo avec moi comme d’habitude. Je me suis approché de la salle de bains, et comme elle avait laissé la porte ouverte, je l’ai aperçue. Elle a entendu le déclic de l’appareil photo et je l’ai entendue dire : “Ah le vilain garçon !”
«Les gens qui ne me connaissent pas se font de fausses idées à mon sujet. Ils s’imaginent que je suis un peu orgueilleux, un peu dilettante, un peu distant… mais ils se trompent, je le suis totalement.» Elégance et légèreté, classicisme et sensualité sont quelques qualificatifs pour évoquer les photographies de Jeanloup Sieff (1933-2000). Reporter indépendant, un temps membre de l’agence Magnum – il reçoit en 1959 le Prix Niépce pour son reportage sur le Borinage – c’est cependant dans la photographie de mode qu’il va s’illustrer. Réalisées principalement pour de prestigieuses revues de mode telles Harper’s Bazaar, Elle, Vogue ou British Mode, ses photographies s’émancipent pourtant de la commande par l’originalité des cadrages, la densité des impressions et le choix du grand angle qui les rend immédiatement reconnaissables. Car il y a bien un style Sieff avec ses femmes-icônes portant les créations de prestigieux couturiers, ses nus féminins saisis dans leur troublante intimité, ses paysages déserts qui sont le visage solitaire de ce photographe pratiquant l’amitié avec les vedettes de l’écran ou de la politique qu’il rend si proches, s’effaçant derrière le modèle. Sieff épure sa photographie, en conservant les lignes maîtresses, les coulant dans des noirs profonds, rejoignant l’esthétique d’une époque, les «Trente Glorieuses» qu’il incarne à la perfection.
Plasticienne belge, née à Folkestone (Royaume-Uni) en 1956, Ann Veronica Janssens vit et travaille à Bruxelles. Elle poursuit depuis la fin des années 1970 une œuvre expérimentale qui privilégie les installations créées en fonction du lieu où elles sont établies et l’emploi de matériaux simples ou immatériels, tel que la lumière, le son ou le brouillard artificiels. L’observateur est confronté à une expérience sensorielle fugitive de l’instabilité qu’elle soit visuelle, physique, temporelle.
Ses productions en deux dimensions établissent des liens entre ses interventions artistiques et les images qui y ressemblent dans l’univers. Cette image se rattache à son travail sur les éclipses. Bien que l’image semble abstraite, elle réfère à un évènement réel. L’artiste joue entre le fictif, l’abstrait et le figuratif.