SORMAN J., La peau de l’ours (2014)

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Inutile de lire La peau de l’ours. J’dis ça, j’dis rien, mais c’est un livre de plus à abandonner sur la tablette du train, surtout maintenant qu’il est sorti en format poche (le livre).

Tout commence bien pourtant, comme dans un conte (dont le style n’est pas trop mal singé). Mais Joy Sorman (née en 1973), toute contente de son idée initiale (mettre en regard humanité et animalité dans la même peau, celle d’un bâtard homme-ours qui, malgré lui, est soumis à un voyage qui devrait être initiatique), n’arrive pas tenir la longueur et la pauvre bête qui se voit offrir le rôle-titre n’est rapidement plus qu’un ours savant qui réfléchit… un peu.

Le narrateur, hybride monstrueux né de l’accouplement d’une femme avec un ours, raconte sa vie malheureuse. Ayant progressivement abandonné tout trait humain pour prendre l’apparence d’une bête, il est vendu à un montreur d’ours puis à un organisateur de combats d’animaux, traverse l’océan pour intégrer la ménagerie d’un cirque où il se lie avec d’autres créatures extraordinaires, avant de faire une rencontre décisive dans la fosse d’un zoo. Ce roman en forme de conte, qui explore l’inquiétante frontière entre humanité et bestialité, nous convie à un singulier voyage dans la peau d’un ours. Une manière de dérégler nos sens et de porter un regard neuf et troublant sur le monde des hommes.

EAN 9782070468195

Au fil des pages et malgré les promesses de la quatrième de couverture (reproduite ci-dessus), on se dit que les Aventures de Babar étaient plus trépidantes. La magie du conte, assez efficace dans les premières pages, est aussi rapidement étouffée et remplacée, comme par dépit, par une narration assez linéaire où le découpage en chapitre est le seul vrai rythme, là où on attendait une succession de passages initiatiques que le sujet aurait permis (on tenait enfin un premier Bildungsroman plantigrade ; au moins le deuxième, si on considère Winnie the Pooh).

Dans un domaine où la géniale orfèvre Siri HUSTVEDT offre à tous les hommes (en d’autres termes, les ‘gender-disabled short-sighted humans‘) la possibilité d’entrevoir la douloureuse renaissance d’une femme blessée, vue par une femme (Un été sans les hommes, 2013), l’espoir était grand de voir une romancière explorer une des grandes ambivalences viriles : raison vs. sauvagerie.

Ah ! Quelle est l’auteuse qui arrivera à mettre en oeuvre la finesse acérée de sa plume (In Memoriam Virginia W.) pour décrire cette sensation d’avoir “les épaules à l’étroit dans un costume trois-pièces” ?

Pour l’aider, quelques questions prolégoméniques : Proust péterait-il dans son marais, pendant le bain matutinal ? Shrek s’essuierait-il la bouche après s’être enfourné un demi-kilo de madeleines ?

Dieu me tripote ! Desproges aurait précisé qu’il s’essuyait toujours la bouche après avoir pété dans son bain. Mais c’est une autre histoire…​​

Patrick Thonart


[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : rédaction, édition et iconographie | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : © Gallimard.


Plus de littérature en Wallonie…

HANSEN : Au secours ! Un ours est en train de me manger ! (WOMBAT, 2013)

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ISBN 978-2-919186-36-5

Vous pensez que vous avez des problèmes ? Moi, je suis en train de me faire dévorer par un ours ! Oh, mais désolé, toutes mes excuses, écoutons donc vos problèmes ! Mmm-hmm ? Alors comme ça, votre patron est méchant avec vous ? Et votre voiture vous cause des soucis ? Et vous vous inquiétez pour l’environnement ? Tiens donc ! Votre environnement vient juste de me bouffer un pied ! Je pisse mon sang sur votre environnement. Je peux donc à présent affirmer sans crainte d’être contredit que MES PROBLÈMES SONT PIRES QUE LES VÔTRES. Alors fermez-la avec vos problèmes, OK ?

HANSEN Mykle, Au secours ! Un ours est en train de me manger ! (traduit de l’américain par Thierry Beauchamp, Nouvelles Editions Wombat, coll. Les Insensés, 2013)

“Manager tyrannique, Marv Pushkin embarque son équipe de publicitaires pour un week-end de chasse en Alaska. Alors qu’il est en train de changer une roue de son 4 x 4, un ours l’attaque. Coincé sous la voiture, la jambe broyée par le châssis, Marv se fait grignoter le pied par Monsieur l’Ours. Une situation pour le moins inconfortable, qui plongerait plus d’un citadin dans le désespoir. Mais, grâce aux puissants analgésiques dont il ne se sépare jamais, Marv est résolu à tenir le coup en attendant les secours. S’engage alors un délirant monologue où il s’attache à démontrer la supériorité de l’Homo Sapiens sur le Plantigrade, et plus largement de la Civilisation sur la Nature, n’en déplaise aux écolos chevelus et autres thuriféraires de ce ringard de Thoreau. Car Marv Pushkin déteste la nature, sa femme geignarde et ses lopettes de subordonnés. En revanche, il adore son Range Rover aux sièges rabattables en cuir d’Oxford, ses vêtements de marque, ses drogues aux propriétés chimiques merveilleuses, sa maîtresse Marcia du service clients, et surtout lui-même. L’être supérieur qu’est Marv Pushkin parviendra-t-il à se tirer de ce mauvais pas – et à repartir du bon pied ? L’Ours deviendra-t-il l’avenir de l’Homme ?” (source : Nouvelles Editions Wombat)

“Mykle Hansen vit à Portland, dans l’Oregon (US). Auteur de plusieurs recueils de nouvelles (Monster CocksThe Bored, Bored PrincessRampaging Fuckers of Everything on the Crazy Shitting Planet of the Vomit Atmosphere…), publiés sous l’égide du bien nommé mouvement « Bizarro », il signe ici un premier roman résolument anti-Nature Writing. Lors de sa tournée promotionnelle aux États-Unis, Mykle concluait ses lectures en combattant un ours à mains nues. Il perdait souvent…” (source : idem)


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