Autant de thèmes de travail qui gagneraient, disiez-vous, à figurer au cœur d’un essai qui les relierait et modéliserait leur agencement avec force exemples et explications. Qu’il en soit ainsi : essayons l’essai !
L’ouvrage s’adressera à celles et ceux qui sont “disposés à se mettre d’accord avec eux-mêmes” et tient à peu près ce langage :
SATISFACTION. Le bien-être n’est pas un état de plaisir statique et le sentiment “d’être à sa place” procède plutôt d’une activité satisfaisante. Reste qu’il est impératif de se rendre capable d’évaluer sincèrement ce qui est satisfaisant et, pour ce faire, de s’enlever les ‘écailles sur les yeux’ ;
CERVEAUX. Les développements récents des neurosciences mettent en évidence que notre Raison n’est pas seule à déterminer notre sentiment de vivre “à propos” et qu’un travail sur nos réactions “reptiliennes” et post-traumatiques participe aussi de notre mieux-être et de notre lucidité ;
FABULATIONS. Reste que notre conscience a besoin d’une représentation du monde qui fait sens et que, là où l’absurde est évident, nous veillons à projeter des formes symboliques (explications logiques) sur les phénomènes que nous percevons, quelquefois jusqu’à nous aveugler ;
LANGAGES. Médium incontournable entre les phénomènes et la représentation que nous en avons, le langage est le premier témoin des “écailles sur les yeux” qui obèrent notre être-au-monde. Sa maîtrise est une première étape nécessaire, pour restaurer l’attention que nous voulons porter à notre environnement réel.
INFORMATIONS. La démultiplication exponentielle de ces fabulations par notre usage des technologies de la communication brouille l’écoute et notre conscience a bien du mal à entretenir une hygiène “informationnelle” devant la société du Spectacle.
CONFORMITÉ ou EXPÉRIENCE. Notre quotidien est fait de décisions d’agir et à chacune de celles-ci correspond l’alternative entre “être conforme à un modèle” ou “exercer sa puissance dans l’expérience nouvelle.” C’est là que la satisfaction d’une pensée plus libre et clairement formulée se fait sentir.
JONGLER. Etre à sa place procède donc d’un travail au quotidien, dont le modèle pourrait être le Jongleur de mondes de Grandville. Il s’agit de…
pouvoir jongler (travailler à “diminuer la douleur de la distance” avec sa réalité),
jongler utile (consacrer son attention à une sélection satisfaisante de phénomènes du monde),
trouver la Joie dans la jonglerie plutôt que dans le Spectacle (jouir de son activité plutôt que de sa reconnaissance).
Cliquez ici pour accéder à l’essai en ligne…
wallonica.org oblige : l’essai est composé en ligne et relié aux contenus de l’encyclopédie wallonica. Le texte vous est donc livré dans son état d’avancement du moment, pour débats et commentaires. Il évolue tous les jours : cliquez curieux ci-dessus pour le lire !
Temps de lecture : < 1minutes > ASTOR D, Deviens ce que tu es. Pour une vie philosophique (AUTREMENT, 2016)
“Dans son stimulant essai, “Deviens ce que tu es”, le philosophe Dorian Astor, spécialiste de Nietzsche, dévoile les ressources et les malentendus de l’une des plus célèbres formules de l’histoire de la philosophie. Un plaidoyer pour la grande santé nietzschéenne, plus que jamais nécessaire.
Attribuée à Nietzsche, qui l’avait lui-même emprunté à Pindare, la formule “deviens ce que tu es” a la puissance contagieuse d’une injonction contemporaine dont chacun pressent vaguement l’enjeu, par-delà son étrange opacité : une invitation à sortir de soi, à s’affirmer dans un élan vitaliste et créatif.
Mais est-ce si simple ? Pour Nietzsche, devenir ce que l’on est suppose que l’on ne pressente pas le moins du monde ce que l’on est. Comment s’y retrouver alors ? Devenue un stéréotype de l’histoire de la philosophie, cette phrase est pleine de points aveugles, comme si sa forme quasi poétique créait quelques malentendus et nécessitait quelques éclaircissements…”
Temps de lecture : < 1minutes > SOLOTAREFF J, L’aventure intérieure : la méthode introspective de Paul Diel (PAYOT, Rivages, 1991)
“Ce livre se propose de montrer l’importance de la capacité introspective dans la vie humaine et ses manifestations dans toutes les acquisitions évolutives de l’humanité, aussi bien civilisatrices que culturelles – dont la production des mythes et des systèmes philosophiques. Mais l’étape de l’hominisation est menacée par un danger inhérent à l’introspection : son mésusage conduisant à l’introspection morbide, terme connu de chacun mais mal défini. La psychologie des profondeurs aboutit, avec l’ouvre de Paul Diel, à l’élaboration d’une méthode capable de guider l’introspection personnelle et de s’opposer ainsi à l’introspection morbide, déviation responsable tant de l’angoisse individuelle que de l’angoisse sociale. Cet ouvrage, d’une part rend compte de ces différents points en s’appuyant sur l’ensemble des écrits de Paul Diel, et d’autre part décrit et explicite la méthode introspective jusque dans ses détails. Elle permet de développer la lucidité de l’homme concernant son monde intérieur, de déployer au mieux ses capacités essentielles et d’accroître ainsi son plaisir de vivre.”
Temps de lecture : 6minutes > MONTAIGNE, Les Essais en français moderne (GALLIMARD, Quarto, 2009)
C’est vers 1572 que Michel Eyquem de MONTAIGNE (1533-1592) entreprend de dicter les Essais, qui l’occupent jusqu’à sa mort. Deux ans plus tôt, il a vendu sa charge de conseiller au Parlement de Bordeaux et s’est retiré en son château du Périgord. Non qu’il se consacre exclusivement aux Essais : tout en administrant son domaine, Montaigne joue son rôle de gentilhomme catholique dans divers épisodes militaires ou politiques des guerres de religion. Il voyage, est élu puis réélu maire de Bordeaux, sert enfin d’intermédiaire entre le roi Henri III et le chef protestant Henri de Navarre (futur Henri IV). Les Essais se nourrissent autant de cette expérience que des lectures de l’humaniste dans la “retraite” de sa “librairie”. Montaigne publie les livres I et II à Bordeaux en 1580, puis les augmente et leur adjoint le livre III dans l’édition parisienne de 1588. Il continue ensuite d’enrichir son texte en vue d’une nouvelle édition. De ce travail subsistent deux témoins parfois divergents : un exemplaire des Essais couvert d’additions de la main de Montaigne (dit exemplaire de Bordeaux) et l’édition posthume de 1595.
Ce ne sont pas mes actes que je décris, c’est moi, c’est mon essence. J’estime qu’il faut être prudent pour juger de soi et tout aussi scrupuleux pour en porter un témoignage soit bas, soit haut, indifféremment. S’il me semblait que je suis bon et sage, ou près de cela, je l’entonnerais à tue-tête. Dire moins de soi que la vérité, c’est de la sottise, non de la modestie. Se payer moins qu’on ne vaut, c’est de la faiblesse et de la pusillanimité, selon Aristote. Aucune vertu ne se fait valoir par le faux, et la vérité n’est jamais matière d’erreur. Dire de soi plus que la vérité, ce n’est pas toujours de la présomption, c’est encore souvent de la sottise. Être satisfait de ce que l’on est et s’y complaire outre mesure, tomber de là dans un amour de soi immodéré est, à mon avis, la substance de ce vice [de la présomption]. Le suprême remède pour le guérir, c’est de faire tout le contraire de ce que prescrivent ceux qui, en défendant de parler de soi, défendent par conséquent d’appliquer sa pensée à soi. L’orgueil réside dans la pensée. La langue ne peut y avoir qu’une bien lègère part. (Essais, Livre II, 6).
“Montaigne s’appuie sur sa culture humaniste (philosophes de l’antiquité) pour construire sa propre philosophie. Que sais-je ? est une reformulation de la devise Socratique : Je sais que je ne sais rien. Cette docte ignorance est le point de départ d’une attitude philosophique non dogmatique De ce fait, comme Socrate, Montaigne se tourne vers la maïeutique pour accompagner celui qui entame une quête d’identité et faire émerger en lui la liberté.
Elle se prolonge dans un scepticisme, suivant cette fois la voie de Pyrrhon et de ses successeurs : puisque nous sommes parfois trompés par nos sens et nos jugements, nous ne devons pas nous y fier. D’autre part, la confusion possible entre la folie, le rêve et la réalité ne nous permettent pas de garantir la valeur de nos perceptions. Il convient donc de suspendre notre jugement quant aux info transmises par les sens : nous devons demeurer sans opinion (affirmer ou nier) => douter de l’identité entre la représentation du monde que nous nous formons à partir de nos sens et la réalité. Il est, par exemple, impossible d’affirmer si la réalité d’une pomme correspond à la vision que nous en avons, à son goût, à son toucher ; les perceptions varient dans le temps et suivant les personnes… Nous ne devons pas accorder plus de confiance à notre raison dans la mesure où nos pensées nous apparaissent parfois indépendamment de notre volonté. Il faut donc cesser de croire à la certitude de nos raisonnements scientifiques.
Que ne plaît-il un jour à la nature de nous ouvrir son sein et de nous faire voir au propre les moyens et la conduite de ses mouvements, et y préparer nos yeux ! O Dieu ! Quels abus, quels mécomptes nous trouverions en notre pauvre science…
Nous n’avons donc pas de raison de nous sentir supérieurs aux animaux.
Montaigne s’appuie sur la philosophie platonicienne pour relativiser l’importance de la mort : philosopher c’est apprendre à mourir. Mais, c’est la morale Epicurienne qu’il choisit de suivre : limiter ses désirs permet de les satisfaire plus facilement. La fin du trouble causé par le désir est la définition même du plaisir, qui ouvre la voie au bonheur, selon Epicure.
Suivant Platon et Aristote, il pense que l’avenir de l’Etat dépend de la discipline de l’enfance. Mais, il critique le modèle politique prôné dans la République dans le 30e chapitre des Essais. A la suite de Machiavel et avant Montesquieu, il conseille d’observer avant d’agir en politique. De ne changer aisément une loi reçue constitue l’un des chapitres les plus incisifs des Essais. => les lois, les morales et les religions des différentes cultures ont toutes quelque fondement.
A condition de ne pas chercher à acquérir le pouvoir, ce pragmatisme est source de tolérance
religieuse : l’Etat ne doit pas imposer un modèle religieux ;
culturelle : la culture Européenne ne vaut pas mieux que celle des Indiens.
Enfin, Montaigne prône un enseignement fondé sur des exemples concrets et sur l’expérience, plutôt que les connaissances abstraites acceptées sans aucune critique. Mieux vaut une tête bien faite qu’une tête bien pleine afin de former le jugement.”
“À l’imitation du Grec Plutarque (46-120), Montaigne conçoit ses Essais comme une marqueterie mal jointe, et revendique leur désordre comme gage de sa liberté et de sa bonne foy. Ce désordre vient aussi de la façon même dont les Essais sont écrits : Montaigne pense à haute voix, un scribe (il y en eut trois successifs) prend sa dictée. Préférant à l’organisation didactique et à la rhétorique des pédants une allure poétique, à sauts et à gambades, il mise sur la bigarrure et la diversité. Les cent sept Essais frappent donc par leur variété et par les contrastes qui les animent. Si les plus courts (notamment au livre I) ne sont guère que des notes de lecture, juxtaposant en une ou deux pages quelques anecdotes brièvement commentées, d’autres forment de véritables essais philosophiques, d’inspiration stoïcienne (Que philosopher c’est apprendre à mourir, I, 20) ou sceptique (Apologie de Raimond Sebond, II, 12), de plus en plus nourris de confidences personnelles (De la vanité, III, 9 ; De l’expérience, III, 13).
À la variété des formes répond celle des sujets : Montaigne, affectant de parler indifféremment de tout ce qui se présente à sa fantaisie, passe sans transition des cannibales (I, 31) aux ordonnances divines (I, 32), des senteurs (I, 60) aux prières (I, 61). Quelques titres trompeurs masquent les chapitres les plus audacieux : Coutume de l’île de Céa (II, 3) discute de la légitimité du suicide ; De la ressemblance des enfants aux pères (II, 37) attaque les médecins ; Sur des vers de Virgile (III, 5) recèle les confessions de Montaigne sur son expérience de l’amour et de la sexualité ; Des coches (III, 6) dénonce la barbarie des conquistadors… Non moins diverses sont les sources innombrables que Montaigne fait dialoguer, confrontant les autorités traditionnelles de l’humanisme à son expérience individuelle : si Plutarque et Sénèque restent ses auteurs de prédilection, historiens et poètes ne sont guère moins sollicités : des centaines de citations en prose ou en vers, en français et en latin, souvent plaisamment détournées, composent un texte à plusieurs voix. Loin de constituer un ornement gratuit ou une autorité paralysante, cet intertexte omniprésent illustre ou sollicite toujours une réflexion personnelle : Je ne dis les autres, explique Montaigne, sinon pour d’autant plus me dire.
Connais-toi toi-même : l’unité des Essais réside dans la démarche originale qui fait de l’enquête philosophique le miroir de l’auteur : C’est moi que je peins. Quel que soit le sujet traité, le but poursuivi est la connaissance de soi, l’évaluation de son propre jugement, l’approfondissement de ses inclinations : Dernierement que je me retiray chez moy, délibéré autant que je pourroy, ne me mesler d’autre chose que de passer en repos, et à part, ce peu qui me reste de vie : il me sembloit ne pouvoir faire plus grande faveur à mon esprit, que de le laisser en pleine oisiveté, s’entretenir soy mesmes, et s’arrester et rasseoir en soy (I, 8). Au-delà de ce projet sans précédent, qui nous dévoile les goûts et les opinions d’un gentilhomme périgourdin du XVIe siècle, comme ses habitudes et ses manies les plus secrètes, le génie de Montaigne est d’éclairer la dimension universelle d’un tel autoportrait : dans la mesure où chaque homme porte la forme entière de l’humaine condition, la mise en œuvre du précepte socratique Connais-toi toi-même débouche sur une exploration vertigineuse des énigmes de notre condition, dans sa misère, sa vanité, son inconstance, sa dignité aussi.
Humaniste par son goût des lettres antiques, Montaigne l’est plus encore au sens philosophique, par sa haute idée de la personne humaine et du respect qui lui est dû. Sa pédagogie non violente, misant sur le dialogue et la curiosité, ses dénonciations courageuses du colonialisme naissant ou de la chasse aux sorcières opposent à toutes les formes de bêtise, d’asservissement, de fanatisme ou de cruauté une ouverture à l’autre et un esprit de tolérance qui font parfois de cet « honnête homme » notre contemporain. Ce relativisme justifie la relation exempte de dogmatisme que Montaigne inaugure avec son lecteur : remettant lui-même en question ses propres dires, soulignant la contingence de ses humeurs et opinions, sujettes au branle et à l’universelle vicissitude (Je ne peins pas l’être, je peins le passage), Montaigne nous laisse une œuvre ouverte, dont l’inachèvement semble une invitation à poursuivre l’enquête et le dialogue.”
Le livre du Congo, un essai total écrit comme un roman (Prix Médicis Essai 2012 ; Prix du Meilleur Livre Étranger – Essai 2012). De la préhistoire aux premiers chasseurs d’esclaves, du voyage de Stanley missionné par Léopold II à la décolonisation, de l’arrivée de Mobutu puis de Kabila à l’implantation industrielle d’une importante communauté chinoise, ce livre retrace, analyse, conte et raconte 90.000 ans d’histoire : l’Histoire d’un immense pays africain au destin violenté…
Dans la presse :
“Attention, phénomène ! Congo n’est pas simplement un essai rigoureux, dense et très documenté. Congo se lit vraiment comme un roman, un grand roman.” (Lire)
“Un mélange de multiples (et passionnantes) tranches de vies privées, d’historiographie, de reportage, de littérature et même de poésie. (…) C’est le Voyage au Congo de Gide transposé dans la modernité, relu par Lévi-Strauss, annoté par Fernand Braudel et remixé par Studs Terkel, Howard Zinn ou n’importe quel tenant de l’histoire orale ! (…) Un roman vrai et bouillonnant qui s’offre aussi comme un étonnant miroir de nous même et des complexités Nord-Sud.” (Le Monde des livres)
“Un ovni éditorial qui mêle habilement les approches historiques, journalistiques, et littéraire. Un de ces rares ouvrages que l’on ne parvient pas à reposer une fois qu’on l’a ouvert…” (Jeune Afrique)
“David van Reybrouck signe un libre de référence extrêmement riche, un hymne jubilatoire à la vitalité et à l’extraordinaire volontarisme de cette nation en mouvement. Un essai écrit comme un roman, best seller dans sa langue d’origine, et qui a valu à son auteur le prestigieux prix Ako 2010. Ce livre est l’histoire, fidèle, rigoureuse, éminemment documentée et absolument romanesque d’un pays.” (Afrique Education)
“D’une écriture captivante, d’une composition savante et bourré d’observations saisissantes. Van Reybrouck se moque des querelles d’historiens qui agitent son pays. Il a voulu prendre ses lecteurs au collet, et a parfaitement réussi.” (Humo)
“Fusion de documents, de témoignages inédits et de récits, cette fresque gargantuesque se dévore comme un roman.” (Géo)
“Congo fait partie des rares ouvrages de non-fiction historique qui allient histoires vécues et analyse de ces histoires en transmettant avec virtuosité données pures et vue d’ensemble.” (Der Spiegel)
“Une lecture essentielle qui éclaire l’histoire de cet immense pays et des relations belgo-congolaises, mais plus largement aussi celles des pays européens avec le reste du monde ou la mondialisation. Immanquable.” (Imagine demain le monde)