Ce matin, je n’ai pas le moral. Je suis stressé. Un dossier administratif en attente depuis des semaines m’obnubile. “Mais quand vont-ils enfin se décider à me répondre ?” me dis-je en me retournant dans mon lit. Les injonctions m’envahissent. “Je dois bosser, répondre au mail d’untel, payer le gaz…” Et au fond de moi je sens que toutes ces tâches ne seront pas pour aujourd’hui. La veille je me suis démené derrière mon ordinateur pour avancer dans la rédaction de mon livre. Aujourd’hui, j’ai besoin d’ancrage… je dois perdre mon temps pour en gagner.
Je finis d’avaler ma tasse de café, j’enfile une tenue adéquate, attrape mon appareil photo et saute dans ma voiture. Passé le nécessaire moment de pollution véhiculaire, je me retrouve le long de l’Ourthe dans un petit plan d’eau à l’écart du cours d’eau principal.
La nature m’accueille. Une libellule sur le chemin me salue et prend la pose au soleil. Quelques mètres plus loin, un héron semble me dire “ah… on t’attendait”. Je me faufile parmi les herbes touffues et me love dans un recoin discret, le long de l’eau. A peine arrivé, j’aperçois un castor se faufiler dans un fourré… Vraiment la matinée s’annonce sous les meilleurs auspices.
Soudain, un voyant s’allume sur mon appareil photo. C’est la batterie qui menace de me laisser tomber. Mais quand ? Dans dix, cinquante clichés ? Je décide de fonctionner à l’économie. Je ne déclencherai que lorsque ça en vaudra vraiment la peine.
Les minutes passent et mon stress se dégonfle comme un ballon de baudruche. J’entends le bruit du vent, les chants des oiseaux. Pas encore de martin-pêcheur à l’horizon mais il ne saurait tarder… Ah je l’aperçois d’un peu loin. Oui il est bien là, posé sur une branche… Il s’en va… Une heure passe. Je continue ma méditation, ma contemplation.
Une autre heure. J’hésite à plier bagage mais je sens qu’aujourd’hui j’aurai droit à un cadeau si je me montre patient. J’ai là, juste en face de moi, une branche qui rendrait envieux n’importe quel être vivant se sentant un tant soit peu martin-pêcheur. Je suis certain qu’il finira par s’y poser. Je le sens, là entre mon cœur et mes tripes.
Le récit serait moins beau s’il ne s’y était pas posé. Il s’y pose une première fois brièvement… Première série de photographies… Maudite feuille dans le champ.
Je me sens veinard et en verve… je prends mon téléphone et commence à rédiger la chronique que vous lisez en cet instant. Deuxième arrêt au même endroit…. Merci la nature… Une troisième et une quatrième visite. C’est un festival de martins-pêcheurs… Ma batterie tient miraculeusement. Je suis comblé. Et dans le même temps. Je vous ai écrit ces quelques lignes.
Vraiment, aujourd’hui il fallait que je perde du temps…
[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : rédaction et iconographie | auteur : Benoît NAVEAU | illustrations : © Benoît NAVEAU.
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