VIENNE : Dijon et le pays des ceps d’or (CHiCC, 2001)

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En Bourgogne, au Moyen Age, grâce au sol calcaire, les moines ont abondamment planté des vignes pour les besoins du culte. Plus tard, les laïcs ont continué la viticulture pour les plaisirs de la table. Or donc, aux alentours de Dijon, les viticulteurs ont de tout temps accordé un soin jaloux à leurs vignobles, d’abord avec des moyens rudimentaires ensuite à l’aide de techniques plus efficaces. Une tapisserie représente un vigneron tout habillé en train d’écraser les raisins avec ses pieds. Par contre, jadis, de jeunes vignerons nus comme des vers se glissaient dans de grandes cuves et allaient piétiner les grappes de raisins. Ils ont été appelés les “bareuzais“. À Dijon, sur la place François Rude, s’élève la sculpture du “bareuzai” devenu le symbole de la Bourgogne vineuse. En septembre, en pleines “fêtes de la vigne”, la ville pavoise aux couleurs du folklore international : des groupes venus du monde entier s’y rassemblent et animent la cité pendant toute une semaine.

Le fondateur de la fameuse dynastie de Bourgogne, c’est Philippe le Hardi. Il a donné une vive impulsion à l’activité artistique de Dijon, il a aimé la bonne chère, le jeu et les femmes. Son successeur a été Jean sans Peur, un prince rongé d’orgueil mais très maladroit pour gérer les affaires de l’état. Philippe le Bon, troisième Duc de Bourgogne et sans doute le plus célèbre, était né à Dijon et mort à Bruges. Il s’est conduit durant toute sa vie comme un prince fort habile, ambitieux, mécène et bon vivant. Philippe le Bon a profondément aimé les fêtes et les festins. Les historiens rapportent la magnificence d’un banquet donné par lui à Lille et à l’issue duquel son fils Charles le Téméraire et tous les seigneurs de sa Cour, ont fait le vœu de partir en croisade pour repousser les Turcs. Les serments ont été prononcés sur la tête d’un faisan vivant d’où sa dénomination : Festin du Vœu du Faisan.

Les femmes ont beaucoup intéressé Philippe le Bon. Il paraît qu’il eut 30 maîtresses et, bien entendu, 17 bâtards affichés ainsi que plusieurs filles illégitimes. Un des bâtards de Philippe le Bon a été baptisé David de Bourgogne et, grâce à son père, il a été nommé évêque d’Utrecht, principauté située à un croisement de l’Europe entre l’Allemagne et l’Angleterre. Son fils légitime, Charles le Téméraire, est devenu un seigneur plein de convoitises territoriales. Il a voulu englober Liège dans son domaine ducal mais nos révoltes à son encontre nous ont valu les trop célèbres sac et carnage de la ville en 1468. Désireux d’être pardonné, il a offert à Liège, trois ans plus tard, un reliquaire, joyau d’orfèvrerie. Il est conservé dans le trésor de la cathédrale Saint-Paul à Liège.

Prononcez “Dijon” et immédiatement les personnes pensent “moutarde”. Elles ont bien raison car elle y est confectionnée depuis six siècles ! L’usine Amora-Maille s’est édifiée près du canal de Bourgogne et il est bon de savoir que la production de ce condiment peut atteindre les 100 tonnes par jour !

Une artère fluviale a également enrichi Dijon et ses environs : le canal de Bourgogne. Ce vénérable chemin d’eau qui a 180 ans s’étire sur 242 km et joint l’Yonne à la Saône. Le déclin commercial s’est amorcé à la fin du 19e siècle. Heureusement, de nos jours, la vocation de ce merveilleux canal, c’est la plaisance. Quant aux cyclistes, ils apprécient beaucoup les chemins de halage.

Les Chemins de Fer de Bourgogne gardent le souvenir d’un de leurs ingénieurs du P.L.M. qui a eu la fibre littéraire : Henri Vincenot. Il a été tour à tour rédacteur en chef du magazine “La Vie du Rail”, écrivain, peintre, sculpteur et conteur. Henri Vincenot est né à Dijon et il est mort à Commarin, à 77 ans. Citons, parmi ses ouvrages : Le Pape des escargots, La Billebaude, Le maître des abeilles et bien d’autres…

Ici est née une armada de personnalités artistiques variées. Tout d’abord, Jacques Bénigne Bossuet, fils d’un avocat, a étonné le monde théologique parisien par sa précocité oratoire. Puis, Jean-Philippe Rameau qui est devenu à Paris claveciniste, organiste, compositeur d’opéras. Il a été le contemporain de Bach et de Haendel. Le plus connu des Dijonnais, c’est Gustave Eiffel. Il a réalisé la structure métallique de la Statue de la Liberté de Bartholdi, édifié en rade de New-York ; au Portugal, le pont sur el Douro à Porto et, enfin, la Tour Eiffel enviée dans le monde entier ! Enfin, le célèbre chanoine Kir dont l’attitude courageuse pendant la Deuxième Guerre Mondiale lui a valu d’être élu maire de Dijon, puis député. Sympathique défenseur des petits salariés, des anciens combattants, des travailleurs âgés, le nom du chanoine Kir ne s’est pas oublié. Il a donné son nom au célèbre apéritif à base de crème de cassis.

Dès la sortie sud de la capitale, les rangées de vignes nous font rêver. Certes, l’harmonie entre une plante, un sol et un climat permet d’avoir la bonne maturité pour obtenir un vin remarquable. Cependant, la solide paysannerie locale, de par son travail opiniâtre, a largement contribué au succès de la culture de la vigne. Les vignobles de la Côte d’Or sont plantés sur des coteaux exposés au levant. Ces terres valent plus chers que les parcelles des Champs-Elysées à Paris !

À Chenôve, au Clos du Roi et du Chapitre, nous remarquons un pressoir du 13e siècle qui a pu presser en une fois la vendange de 100 pièces de vin et la pièce représente 228 litres. Cela veut dire plus de 30 tonnes de vendanges ! Sur ces bornes de bois s’est assise, dit-on, Marguerite de Bourgogne pour suivre le foulage du raisin. Ce travail était fait par de jeunes hommes dévêtus et la princesse a pu ainsi en admirer la plastique. Femme de sang royal, Marguerite de Bourgogne a possédé aussi du sang chaud car elle a collectionné les amants !

Gevrey-Chambertin, vin mondialement connu, était le préféré de l’empereur Napoléon Ier. Faisant partie de ce fameux cru, la maison-forte remonterait à l’An mil et elle a un riche passé historique. Le château du Clos de Vougeot a été une propriété cistercienne puisqu’elle avait été construite par Jean Loisier, abbé de Cîteaux. Elle est restée dans les mains des moines durant près de 700 ans, c’est-à-dire jusqu’à la Révolution. Enfin, le vin rosé de Marsannay-la-Côte, pas très connu des touristes, est également un bon cru.

Nous quittons les vignobles pour nous diriger vers une région très bucolique : l’Auxois. Nous apprécions beaucoup la flore sauvage qui pousse sur le surplomb des falaises de Baulme-la-Roche. Nous avons beaucoup aimé le panorama découvert de ce belvédère naturel qui rappelle une description écrite par Henri Vincenot : “De chaque côté triomphait l’Auxois comme une mer houleuse de pâturages, une mer bordée par les falaises de Baume, par les douces collines boisées, tout cela noyé dans la brule des beaux jours…” Et c’est sur ces merveilleuses images que s’achève notre voyage historique et touristique en Bourgogne.

Claudine et Robert VIENNE

  • image en tête de l’article : vignobles Château de Marsannay ©destinationdijon.com

La CHICC ou Commission Historique et Culturelle de Cointe (Liège, BE) et wallonica.org sont partenaires. Ce texte est le résumé d’une conférence de Claudine et Robert VIENNE, organisée en janvier 2001 par la CHiCC : le voici diffusé dans nos pages. Pour les dates des autres conférences, voyez notre agenda en ligne

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