DJURIC, Miodrag dit DADO (1933-2010)

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Miodrag Djuric, connu sous le pseudonyme Dado, est né en 1933 au Monténégro, en Yougoslavie. Très jeune, il assiste aux violences et à la famine liées à la Seconde Guerre mondiale. En 1947, il intègre l’Ecole des Beaux-Arts de Herceg Novi. Ensuite, il étudie à celle de Belgrade. En 1956, ayant terminé ses études, il déménage à Paris. D’abord, il travaille en tant que peintre de bâtiments de chantiers. Toutefois, il continue à peindre et dessiner dans son temps libre. Il peint par exemple en 1957 l’huile sur toile Tête. Ensuite, il trouve son premier emploi artistique en tant qu’assistant dans l’atelier de lithographie de Gérard Patris. Ce travail lui permet d’acquérir des compétences en estampes, mais aussi de faire la connaissance de Jean Dubuffet, le premier théoricien de l’art brut.  Ce dernier le présente au marchand et galeriste Daniel Cordier, qui aide au développement de son art. En 1958, Cordier organise la première exposition personnelle de Dado, regroupant peintures et dessins.

Ses œuvres sont de style surréaliste, fantastique, ou encore peuvent appartenir à l’art brut. Ses peintures, souvent des huiles sur toile de très grandes tailles, sont très marquées par les horreurs du second conflit mondial. Il abandonne rapidement la recherche du détail pour laisser place à la démonstration de ces calamités. Ainsi, il conçoit des figures monstrueuses, macabres, et angoissées. Leurs âmes torturées dépeignent une forte violence, comme il est visible dans l’huile sur toile La Rebellion de Pancraisse de 1968. De plus, dans le but d’accentuer ce mal, il laisse entrevoir l’anatomie de certains personnages et les peint avec des couleurs vives. C’est le cas de l’huile sur toile Guerre civile au Monténégro de 1968. Le fond, aux tons neutres et aux couleurs paisibles, leur fait contraste. De fait, ceci donne lieu à des compositions dynamiques, puissantes, et aux nombreuses explosions de couleurs. Ses dessins, quant à eux, sont très détaillés. Il privilégie en premier lieu l’usage d’une technique unique, généralement en mine de plomb ou encre de Chine. Le Champ de Bataille dessiné en 1956 en est un exemple. En second lieu, il privilégie la conception de techniques mixtes regroupant la peinture, le dessin, et le collage. En effet, Dado aime découper ses dessins pour les coller sur ses peintures dans le but de leur donner plus de sens et de force. Tel est le cas de Boukoko, une encre de chine et un collage sur toile réalisé en 1975.

Détestant vivre en ville, Dado déménage près d’un vieux moulin à Hérouval au début des années 1960. En 1962, il commence à sculpter. Le style de ses sculptures est inédit : restant dans le registre des horreurs de la guerre, il réalise souvent des montages à l’aide d’ossements d’animaux. Toutefois, il continue de peindre. En 1964, il expose pour la dernière fois chez Cordier. Néanmoins, il n’arrête pas d’exposer ses œuvres. Au contraire, il fait la rencontre de nombreux artistes et galeristes lui permettant de présenter ses œuvres à l’international. Ensuite, à la recherche de nouvelles expressions artistiques, il explore les différentes techniques de l’estampe. En 1966, il conçoit sa première gravure. L’année suivante, il réalise de nombreuses lithographies, taille-douce, et eau-forte. Il travaille même dans plusieurs ateliers de gravures.

Durant les années 1970 et 1980, les œuvres de Dado continuent à être exposées dans le monde entier. Toujours à la recherche de nouvelles formes d’art, il se lance dans l’illustration de livres à partir du début des années 1980. Il illustre par exemple en 1985 Le Terrier de Franz Kafka.

Dans les années 1990, Dado découvre les peintures murales. Les plus célèbres sont celles peintes dans l’ambassade de la IVe Internationale à Montjavoult. De plus, il explore la céramique. Pour cet art, il s’inspire principalement d’études d’oiseaux. En outre, il réalise le décor de deux spectacles, en 1993 et en 1996. A partir de cette dernière année, il se plonge également dans les collages numériques. Toutes ces formes d’art sont aussi marquées par les horreurs de la Seconde Guerre.

Lors de la décennie suivante, il se concentre principalement sur la sculpture. Ainsi, il conçoit la plupart de ses volumes durant cette période. Ils connaissent un grand succès, comme en témoigne sa participation à la Biennale de Venise en 2009. Sa sculpture la plus connue reste Souliko, réalisée en 2008. Par ailleurs, il continue modestement l’illustration d’ouvrages tels que les Viscères polychromes de la peste brune de Jean-Marc Rouillan. De plus, il continue les collages numériques. En 2007, il fonde même un site internet, un “anti-musée virtuel”, dans lequel ils figurent. En 2010, il participe à l’Exposition universelle de Shanghai. La même année, Dado s’éteint à l’âge de 77 ans.

Aujourd’hui ses œuvres sont conservées dans de grands musées du monde entier, tels que le Centre Pompidou à Paris, le Stedelijk Museum à Amsterdam, ou encore le Musée Guggenheim à New York.

d’après EXPERTISEZ.COM


Dado © expertisez.com

Le peintre et sculpteur Dado est mort, le 27 novembre [2010], à l’âge de 77 ans, à Montjavoult (Oise), dans son moulin sis dans le hameau d’Hérouval. Dado était l’un des derniers artistes vivants dont l’oeuvre est marquée par le surréalisme.

Né le 4 octobre 1933 à Cetinje (Monténégro) dans ce qui est alors la Yougoslavie, Miodrag Djuric, dit Dado, est recueilli en 1944, après la mort de sa mère, par un oncle peintre qui habite Ljubljana (Slovénie). Après des études à l’Ecole des beaux-arts de Herceg Novi (Monténégro), puis à l’Académie des beaux-arts de Belgrade, le jeune artiste cède en 1956 à l’appel de Paris. Il y rencontre Jean Dubuffet et Roberto Matta. Sa peinture attire vite l’attention de tous ceux qui, dans la mouvance du surréalisme, espèrent de l’art visions et sensations troublantes. Elle joue alors de l’ambiguïté entre l’organique et le minéral, la chair et la terre, le corps et le paysage. Des êtres hybrides paraissent surgir de l’écorce des pierres. En 1958, une première exposition la fait connaître dans la galerie de Daniel Cordier, qui accueille l’année suivante l’ultime Exposition internationale du surréalisme à Paris. Grâce à elle, Dado achète le moulin d’Hérouval.

Son plus proche ami est alors Bernard Réquichot, autre artiste des métamorphoses corporelles. Un peu plus tard, il se lie avec Hans Bellmer et sa compagne Unica Zürn, figures majeures du surréalisme. Et c’est un autre proche du mouvement, le poète Georges Limbour, qui définit sa peinture en 1960 :

Tout ce qui compose le monde de Dado, les bébés précoces, les vieillards prématurés et les pierres, tout se fendille. S’il y a des murs ou des monuments, ils s’effritent, tombent en ruines. D’ailleurs, maintes créatures roses ou rougeâtres, parfois blanchâtres, paraissent faites de terre cuite ou d’argile sèche, donc susceptibles de se fendiller ou d’éclater. Elles souffrent d’une soif mortelle dans un pays déserté par l’eau, ravagé par la dessiccation.

d’après LEMONDE.FR