Ayant boité tout l’été,
L’Ours se trouva fort dépourvu,
Quand la Renarde lui apparut.
Rousse de poil et
Rose de muqueuse,
Princesse Goupil n’était pas gueuse.
Belle et menue,
Elle jouait encore au cerceau,
Qu’un grand oiseau la sortit du ruisseau.
Évadée de son terrier,
La belle garçonne n’était pas roulure,
Elle savait goûter une fière allure.
Messire Héron n’en manquait guère.
Lors, quand d’un castel il hérita,
La belle poilue lui emboîta le pas.
A poils et à plumes,
Longtemps, les nuits furent de fête,
Jusqu’à ce que le chœur des grenouilles lui tournèrent la tête.
Sa tête à lui, mais à elle pas,
Dame Renart n’a que faire des batraciens,
Qui, face au grand Butor, s’agitent comme des chiens.
Alors que lui, dans sa superbe,
Piétant noblement dans l’herbe,
Se délectait de chaque croâ, comme il se doit.
On connaît l’échine des renardes,
Qui, devant l’adversité,
Le museau savent baisser, sans s’abaisser.
Mais ces femelles ont le cœur rude
(elles, toutes, si faussement prudes)
Et le malheur elles savent tourner, en un heur qui leur sied.
Lors donc, la Belle vécut,
De Longues-Pattes gérant les écus,
Par là gagnant sa paix, au beau milieu des échassiers.
Face à ce clinquant contrat,
Où la rousse ne perdait pas,
Cupidon, déçu, ne sut que faire et délaissa la belle fermière.
Le héron même le sait,
Il n’est pas de chantante rivière,
Qui d’eau n’ait besoin et qui, sèche, ne livre plus rien.
Il en va ainsi de l’amour qui,
Faute d’être bien arrosé,
Quand s’éteint la fête des corps, s’en vient à sentir la mort.
Or, un jour que la Renarde se promenait,
Aux côtés d’une grenouille qui sans tête coassait,
Elle avisa un Ours bourru qui de vrai amour ne voulait plus.
Le plantigrade était en rade mais,
Perclus de peines de cœur,
Martin n’en voulait pas moins chanter les fleurs.
La roussette en l’entendant,
Ne put qu’avec lui partager le chant,
Et de l’amour sentant l’odeur, elle sentit s’ouvrir le cœur.
Hola, hola, fit la Fée bleue,
Tout ceci n’est qu’histoire de queues,
Et de l’amour où la vie danse, ce n’est ici que l’apparence.
La belle Renarde a son caractère,
Et d’une magique marraine n’a que faire,
Ce qu’elle veut vraiment savoir, c’est là où la mène son devoir.
Pas son devoir de religieuse,
Pas les doctrines de la marieuse,
Mais son devoir envers la vie, celui aussi qu’elle souhaite pour sa fille.
Alors, elle dit à l’Ours d’attendre,
Avec force caresses et baisers tendres :
Un jour, bientôt, elle saura et, peut-être, elle le voudra.
Et voilà Noël pour le Martin,,
Mi-joyeux, mi-chagrin,
Qui ne sait rien de ce que sera demain.
Et voilà Noël pour les châtelains,
Mi-ennuyeux, mi-assassin,
Où la Renarde ne sent plus rien.
La fête est triste, sans âtre au cœur,
Mais l’Ours vivra, il chantera,
Et la belle, rose de rosée, ne pourra que l’entendre l’aimer.
fable préparée par Patrick Thonart
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