VACCA : L’indispensable inutilité du point-virgule

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[TRENDS.LEVIF.BE, 13 octobre 2022] Venise, 1494. Aldus Manutius, imprimeur et éditeur, publie le texte de l’humaniste Pietro Bembo intitulé De Aetna, un récit qui relate sous forme de dialogues une ascension de l’Etna. Il lui faut à tout prix domestiquer la prose éruptive de son auteur s’il veut que ses lecteurs – même cultivés, le texte est rédigé en latin – puissent s’y retrouver.

Nous sommes à la Renaissance, la ponctuation est encore une affaire personnelle et des signes naissent comme nos start-up d’aujourd’hui. Afin de ménager des respirations dans le texte, Manutius a une idée. Pourquoi pas une virgule chapeautée d’un point pour baliser son texte ? Une pause plus appuyée qu’une virgule et un peu moins qu’un point. C’est ainsi que voit le jour le plus controversé des signes de ponctuation : le point-virgule.

Aussitôt on se l’arrache ; il connaît un succès foudroyant ; il pousse sa petite corne de pages en pages à travers les publications des Humanistes. Il devient signe de ralliement et s’invite partout : dans les essais philosophiques, les recueils de poésie, les textes juridiques, la grande littérature et aussi les romans populaires…

Paul Vacca © roularta

Mais très vite, son statut hybride déconcerte et dérange. Par quel bout prendre ce drôle d’attelage ? Et surtout qu’en faire ? Certains se retrouvent impuissants face à ce signe fourbe et fuyant. N’a-t-il pas, par essence, le cul entre deux chaises (ni point, ni virgule, mais un peu des deux quand même) ? D’autres n’ont que mépris pour ce signe bâtard. Pour le romancier américain Donald Barthelme, “ils sont aussi laids qu’une tique sur le ventre d’un chien.

Adulé, incompris et honni ; tel fut longtemps le destin du point-virgule. Cecelia Watson, historienne et philosophe des sciences, raconte dans Semicolon (éditions 4th Estate), un ouvrage passionnant consacré au point-virgule, comment ce signe typographique a toujours développé un don particulier pour provoquer des querelles autour des questions de langage, de classe sociale ou d’éducation, et envenimé les débats savants ou littéraires. En 1837, deux professeurs de droit de l’Université de Paris se seraient même battus en duel pour lui !

Aujourd’hui, c’est plutôt un autre sentiment qu’il provoque : l’indifférence. Largement délaissé par les écrivains, enseigné du bout des lèvres, utilisé avec embarras, incompris ou simplement ignoré : il est devenu vieillot, académique, snob ou ringard. Alors pourquoi diable s’encombrer d’un signe que visiblement plus personne ne comprend ni n’utilise ? Tout ne serait-il pas plus simple si l’on s’en débarrassait ?

Mais voilà, retirez les points-virgules que Marcel Proust a placés avec minutie comme autant de précieuses chevilles dans la Recherche du temps perdu et, soudain, c’est tout l’édifice romanesque qui s’écroule. C’est également grâce aux points-virgules distillés par Virginia Woolf que nous pouvons nous glisser dans les flux de conscience de Clarissa dans Mrs Dalloway : une pensée rebondit, se métamorphose en une autre ; des sentiments s’enchaînent, se bousculent au sein d’une seule et même phrase ; au moment même où elles prennent naissance chez elle. Et enfin, confisquez les points-virgules à Michel Houellebecq et ce sont autant de rapprochements incongrus, aussi malicieux que certains haïkus, qui s’évaporent : “Il n’arrivait plus à se souvenir de sa dernière érection ; il attendait l’orage.

Mais le point-virgule a un atout maître : lui n’assène rien, il préfère suggérer ; il pose un lien, mais ne l’impose pas. Il est espace de liberté bienvenu, une oasis dans notre société toujours plus polarisée. N’est-ce pas ce qui devrait rendre ce signe inutile totalement indispensable aujourd’hui ?

Paul Vacca, romancier


© twitter

Ce point-virgule est bien plus qu’un tatouage : quelle est sa signification ?

[LALIBRE.BE, 13 juillet 2015] Que signifie le tatouage point virgule ? Et d’où vient l’idée ? Les tatouages composés d’un point-virgule ont fait récemment leur apparition en nombre sur les réseaux sociaux. Ils symbolisent la lutte contre la dépression…

Les poignets tatoués de ce signe font partie du projet Semicolon. L’idée ? Se tatouer un point virgule pour lutter contre la dépression, l’addiction, l’automutilation et les tendances suicidaires. L’initiative a été lancée en 2013 par une Américaine, Amy Bleuel, suite au suicide de son père. “Le point virgule est choisi par un auteur qui pourrait décider de terminer la phrase, mais qui ne le fait pas“, peut-on lire sur le site du projet, “l’auteur, c’est vous. Et la phrase c’est votre vie.” Le point virgule marque donc le tournant qu’on peut prendre dans sa propre vie. L’emplacement de ce point-virgule sur le poignet n’est pas choisi au hasard puisque c’est l’endroit où des personnes peuvent se tailler les veines. Une variation est de mettre le point-virgule à la place du “i” dans le mot “continue“.

Les détracteurs du tatoo point-virgule. Cette thérapie virtuelle collective pose toutefois question, comme le souligne la psychosociologue spécialisée dans les tatouages, Marie Cipriani, dans une carte blanche pour le Nouvelobs. “L’injonction “tatouez-vous ce symbole si vous êtes une personne fragile” me dérange. Marquer volontairement son corps par un signe évoquant la faiblesse “avouée” ainsi en s’appuyant sur l’argument d’un appel à l’aide est surprenant, écrit-elle, il y a un côté copier-coller qui va totalement à l’encontre des fondements de l’histoire du tatouage ancestrale qui perdure encore de nos jours.” Elle explique aussi le potentiel impact stigmatisant d’un tel tatouage, qu’elle recommande donc de ne pas faire sur un coup de tête.

La rédaction, lalibre.be


[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : partage, correction, édition et iconographie | source : Le vif ; La libre Belgique | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : © roularta group ; ©  lalibre.be.


Plus de Wallons et de Bruxellois à la libre tribune…

Dépression : le mécanisme de la dépression (étude anonyme)

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Hiromu Kira, Le penseur (The Thinker, The Hollywood Reservoir Dam, c. 1930)
Les modèles psychologiques de développement personnel

Annexe 2 : Le mécanisme de la dépression

Une personne sur deux est confrontée à la dépression au cours de sa vie et personne ne peut être certain de ne jamais en souffrir. Il a paru utile, en complément de ce qui a été évoqué, de revenir sur cette question par des éléments plus précis. Ces quelques remarques sont données à titre indicatif et ne se substituent en aucun cas à un traitement médical.

La dépression est une forme d’autopunition coupable amplifiant nos états d’âme de tristesse. Ses causes sont multiples. Elle peut être provoquée par la perte d’un être cher et la douleur de la séparation. La recherche des plaisirs faciles et les addictions, ou plus généralement l’abus de biens de consommation inutiles, peuvent aussi conduire par effet de bascule (principe d’ambivalence) à la dépression. Les troubles suivants figurent parmi ses symptômes :

  • Variation excessive du désir de se nourrir (anorexie ou boulimie).
  • Troubles du sommeil et insomnies.
  • Irritabilité.
  • Isolement social.
  • Baisse de motivation et d’énergie émotionnelle.
  • Perte des centres d’intérêt.
  • Pensées négatives et persistantes à propos de soi.
  • Sentiment de honte et de culpabilité.
  • Absence d’empathie, faculté de sympathiser avec autrui et de ressentir les mêmes impressions que lui.
  • Perte de libido.
  • Pensées suicidaires.

L’un des éléments les plus fondamentaux pour sortir d’une dépression est de se débarrasser de tout sentiment de honte. La dépression doit être considérée objectivement comme un problème de santé, devant être détecté si possible précocement, par celui qui est atteint, de manière à pouvoir chercher de l’aide.

Le problème de la dépression est que cet état induit un comportement qui aggrave la maladie. Il y a donc une amplification naturelle des symptômes, pouvant être fatale, si cela n’est pas pris en compte de manière extérieure.
La difficulté pour le dépressif, consiste à apprendre à surmonter ses humeurs et faire l’opposé de ce que la dépression donne envie de faire. Par exemple, faire l’effort (pouvant paraître colossal) , de se lever et s’habiller, de répondre au téléphone et de sortir pour voir des amis. Lutter contre la tendance naturelle à l’inactivité de la dépression, est une condition essentielle pour se sentir mieux.

La rumination mentale alimente la dépression, par le processus de pensée circulaire au cours duquel l’esprit revient sans cesse sur les mêmes questions :

  • Pourquoi moi ?
  • Qu’est-ce que j’aurais pu faire pour arrêter cela ?
  • Si seulement il s’était produit ceci ou cela, etc.

L’état dépressif dicte d’essayer de comprendre pourquoi on se sent mal, mais la rumination ne fonctionne pas, car elle constitue, par essence, une tentative erronée de résolution des problèmes. Elle doit être combattue par l’occupation ou l’exercice physique. Il est également possible d’apprendre à recentrer son attention par la méthode de concentration sur la tâche, permettant de se focaliser sur des aspects externes de son environnement (la beauté d’un paysage, la sincérité et la spontanéité d’un enfant ou l’humble réconfort d’un animal domestique, peuvent suffire à changer d’optique).

Comment faire dès lors pour résoudre les problèmes ? Il n’existe pas de recette miracle mais seulement quelques principes permettant d’aborder rationnellement le sujet :

  • Définir les problèmes à l’origine de la dépression.
  • Explorer des solutions différentes pour chacun de ces problèmes (comment ai-je solutionné un problème de ce type dans le passé ? Comment font les autres personnes en pareille situation ?).
  • Évaluer ces solutions en pesant soigneusement le pour et le contre.
  • Choisir et essayer la meilleure solution, en procédant par étapes (pour ne pas se sentir submergé par la difficulté).
  • Faire un bilan et tirer des conclusions sur l’aide apportée par cette solution.  Perfectionner éventuellement le scénario ou l’abandonner en essayant une autre solution puis passer au problème suivant.
  • Faire preuve de patiente dans cette démarche et garder avant tout l’espoir d’un retour à la normale avec le temps.

*L’article original a été posté, avant révision, sur SCRIBD.COM par Jefferson F. Dos Santos sans mention de l’auteur. Plus d’infos ? Contactez notre contributeur.
Source : scribd.com


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